Dans les débats sur le réchauffement climatique, l’agriculture est souvent mise en cause pour sa contribution importante aux émissions de CO2. C’est oublier que la production d’hydrates de carbone contenus dans les récoltes est autant de CO2 soustrait à l’atmosphère pour le bien de tous, et que le bilan carbone de l’agriculture, entre les effets favorables et défavorables, est largement positif.
Il faut avoir à l’esprit que le CO2 est un gaz rare dans l’atmosphère. En un siècle, sa proportion est passée de 300 ppm (partie par million) à 400 ppm, c’est-à-dire de 0.03% à 0.04%.
Le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) estime que l’augmentation du CO2 atmosphérique est déterminée par les émissions anthropiques au cours de l’ère industrielle. Ces émissions sont rendues responsables du réchauffement climatique. Mais d’autres voix s’élèvent pour expliquer que c’est l’augmentation de la température, en particulier à la surface des océans, qui est la source majeure de l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère, qui aurait pour cause le réchauffement dû au cycle de notre système interplanétaire.
C’est l’histoire de la poule et de l’œuf. Je n’ai pas la compétence pour trancher cette bataille d’experts. Je pense simplement que si nous pouvons réduire nos émissions et économiser l’énergie fossile, qui par définition n’est pas illimitée, nous amènerions notre contribution à la problématique posée. Je pense à l’énergie nucléaire, seule production d’énergie décarbonée capable de nous fournir l’hydrogène par électrolyse de l’eau en capacité de remplacer les moteurs à énergie fossile, et bien sûr à l’agriculture et à la chimie verte, au-delà de son rôle nourricier.
L’agriculture est rendue pourtant responsable en France de 18% des émissions des gaz à effet de serre, ce qui est une contrevérité notoire. Je m’explique : l’agriculture – à travers la photosynthèse des plantes – est le premier puits de carbone de la nation. Sur les 14 millions d’hectares cultivés toutes espèces confondues, l’agriculture capte en moyenne 295 MT de CO2, ce qui représente 21 T/hectare. C’est le résultat de la photosynthèse, qui combine le carbone du C02 de l’air avec les atomes de l’hydrogène de l’eau du sol, et forme ainsi les composés de base de l’architecture de la plante quelle qu’elle soit et ses réserves qui migrent dans les graines récoltées.
L’ensemble de l’énergie et des intrants mis en œuvre pour réaliser la production représente en moyenne 23 MT, soit 1,650 tonne de CO2/hectare. Si l’on y rajoute l’équivalent de l’effet de serre du protoxyde d’azote, le total s’élève à un équivalent de 40 MT. Ce protoxyde d’azote provient essentiellement de la nitrification de l’azote de la matière organique ou des engrais azotés. A mon avis, une partie de ces pertes aurait lieu dans le cycle naturel de la décomposition de la biomasse des parcelles en friche. En tout état de cause, même avec la prise en compte du protoxyde d’azote, la somme nette des tonnes de CO2 captée est de 255 MT (295-40), que l’on peut comparer aux 165 MT séquestrées par la forêt française sur 16 millions d’hectares.
Alors, pourquoi une accusation supplémentaire de l’activité agricole, assortie d’une menace de certificats carbone à payer ?
En fait, la production agricole – directement ou indirectement – nourrit nos concitoyens et cette consommation est à l’origine d’un relargage, y compris sous forme de gaz à effet de serre (je passe sur les détails …).
De plus, les résidus de récolte – paille, feuilles et racines – représentent la moitié de la biomasse produite aux champs et sont souvent enfouis, ce qui alimente la teneur en matière organique des sols. Pendant mes 40 ans d’exercice du métier d’agriculteur, j’ai augmenté mon taux d’humus de 1%, ce qui représente entre 25 et 30% de séquestration de carbone supplémentaire.
Cette efficacité peut encore être accrue par le non labour et les cultures intermédiaires, si la climatologie et surtout la pluviométrie estivale le permettent.
Pour les prairies, l’INRA de Clermont Theix a démontré depuis longtemps que la biomasse produite par un hectare d’herbe plus le stockage racinaire de la matière organique compensent largement – ou dans tous les cas est neutre – vis-à-vis des émissions des animaux qu’elle nourrit, émissions de méthane comprises.
La surface prairiale française est d’environ 10 millions d’hectares. Dans ces conditions, comment peut-on rendre l’agriculture responsable de 18% des émissions de ce pays ?
En fait, entre la ferme et la table du consommateur, transport et transformation intermédiaire compris, l’ensemble des émissions nous sont attribuées puisque nous sommes à l’origine du flux, y compris du C02 relargué par le consommateur final ; c’est comme si les pétroliers devaient supporter les taxes du carburant que vous utilisez dans votre voiture !
Cette interprétation est fausse, inique et abusive. Elle doit être dénoncée avec force et l’apparition de certificat carbone à la charge de l’agriculture dénoncée, y compris en cours de justice.
Et si la PAC doit être verte, elle doit reconnaître le rôle fondamental de décarbonisation couplé à celui de notre souveraineté alimentaire, et nous attribuer une rémunération pour le carbone séquestré voire capté.
Pour cela, il faut une agriculture efficace qui conserve ses moyens de production car, vous l’avez compris, cette efficacité est en lien direct avec le rendement. C’est ainsi que l’agriculture et les agriculteurs retrouveront des perspectives en apportant des solutions aux défis majeurs d’aujourd’hui et de demain.
Puissent nos décideurs en prendre conscience sans prêter l’oreille aux brailleurs incompétents ou mal intentionnés qui professent des contrevérités.
Je parie que le bon sens finira par l’emporter.
(Edito publié initialement dans la revue Paysans)
Image par Colin Behrens de Pixabay
Mon dieu… European Scientist devient vraiment un fourre-tout infâme.
« Le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) estime que l’augmentation du CO2 atmosphérique est déterminée par les émissions anthropiques au cours de l’ère industrielle. Ces émissions sont rendues responsables du réchauffement climatique. Mais d’autres voix s’élèvent pour expliquer que c’est l’augmentation de la température, en particulier à la surface des océans, qui est la source majeure de l’augmentation du CO2 dans l’atmosphère, qui aurait pour cause le réchauffement dû au cycle de notre système interplanétaire. »
Si les océans se réchauffent, c’est qu’il y a une cause sous-jacente à ce réchauffement. Les océans ne peuvent pas spontanément réchauffer l’atmosphère (transfert d’énergie thermique) ET à la fois se réchauffer aussi.
L’augmentation de l’effet de serre est quelque chose que nous observons. Il s’agit d’observations physiques, pas de modélisation. Nous pouvons démontrer physiquement l’augmentation de l’effet de serre.
https://www.nature.com/articles/nature14240
https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1029/2003GL018765
https://www.nature.com/articles/35066553
« L’agriculture est rendue pourtant responsable en France de 18% des émissions des gaz à effet de serre, ce qui est une contrevérité notoire. Je m’explique : l’agriculture – à travers la photosynthèse des plantes – est le premier puits de carbone de la nation. Sur les 14 millions d’hectares cultivés toutes espèces confondues, l’agriculture capte en moyenne 295 MT de CO2, ce qui représente 21 T/hectare. C’est le résultat de la photosynthèse, qui combine le carbone du C02 de l’air avec les atomes de l’hydrogène de l’eau du sol, et forme ainsi les composés de base de l’architecture de la plante quelle qu’elle soit et ses réserves qui migrent dans les graines récoltées. »
Le carbone capturé par la photosynthèse est à très court terme relâché par la respiration humaine. C’est vraiment la base de la base du cycle du carbone. Un puits de carbone doit pouvoir séquestrer le carbone durablement, le but étant d’avoir un impact durable sur le CO2 atmosphérique. La photosynthèse dans le but de produire de la nourriture n’a aucun effet durable sur le CO2 atmosphérique.
Bonjour European Scientist n’est pas une revue scientifique à comité de lecture. C’est un média qui publie des opinions sur la science et la politique scientifique. L’objectif est de favoriser le débat entre les experts scientifiques et les leaders d’opinion. Nous prenons bonne note de votre commentaire ainsi que de notre jugement de valeur nous concernant.
Comprenez bien que je respecte parfaitement l’idée de publier des opinions sur la science mais je me doute bien que vous exigez un certain standard malgré tout. Je ne pense pas que n’importe qui puisse venir raconter n’importe quoi dans votre média.
Le problème à mes yeux est que durant les dernières semaines, il y a eu plusieurs articles faisant des commentaires déplacés sur la climatologie, même lorsque ce n’était pas le sujet de l’article. Attention à ne pas devenir une plate-forme servant d’hautparleurs pour les climato-réalistes. J’espère ne pas voir European Scientist devenir comme Contrepoints où on retrouve à la fois des critiques à l’encontre de la pseudoscience exprimée par les écolos (comme sur les OGM) à côté d’articles défendant des positions pseudoscientifiques sur le climat.
Pardonnez-moi ce coup de gueule, j’exprimais un certain ras-le-bol mélangé à de l’inquiétude.
Pour revenir au cœur de l’article, cette affirmation :
« En fait, entre la ferme et la table du consommateur, transport et transformation intermédiaire compris, l’ensemble des émissions nous sont attribuées puisque nous sommes à l’origine du flux, y compris du C02 relargué par le consommateur final ; c’est comme si les pétroliers devaient supporter les taxes du carburant que vous utilisez dans votre voiture ! »
Est fausse. Vous ne bénéficiez pas que la photosynthèse agricole puisse être considérée comme un puits de carbone certes, mais on ne vous attribue pas non plus les émissions de CO2 en lien à la consommation humaine ou animale de vos produits. On ne vous attribue pas le CO2 relargué par le consommateur final.
Monsieur Alexandre
Pour votre information il y a débat d’experts sur le réchauffement.Pour les uns ,il est dû aux cycles des éruptions solaires et à la variation du degré d’inclinaison de la terre .Ceci provoquant une augmentation de température en surface des océans , responsable du relargage du CO2 qu’ils stockent dans l’atmosphère.Pour d’autres la cause provient des activités humaines et donc des émissions anthropiques. Je n’ai pas émis d’avis sur le sujet, j’ai simplement signalé le fait.
Par contre pour l’agriculture il est indéniable que celle-ci est le plus grand puits de carbone en solde net devançant largement la forêt .
Cette affirmation n’est pas une opinion mais le résultat des calculs liés à la photosynthèse de nos plantes et à leur physiologie
Ce sont des faits facilement démontrables pour tous ceux qui s’intéressent sérieusement au sujet.
C’est 255 millions de tonnes de CO2 capté déduction faite des émissions liées à l’acte
de production.
La moitié environ de ce stockage peut venir enrichir l’humus des sols par enfouissement des débris végétaux .
L’autre moitié est rejetée par le consommateur final mais ne peut-être mis au débit de l’agriculture.
Nous sommes donc une fois de plus devant une contre vérité notoire que je me suis permis de dénoncer ne vous en déplaise.
Face au défi climatique à relever, quelque soit la cause,l’agriculture efficiente fait partie de la panoplie des solutions.
Concernant les causes du réchauffement actuel, vous trouverez une liste d’institutions scientifiques qui défendent unanimement la responsabilité humaine :
https://climate.nasa.gov/scientific-consensus/
Parmi elles, la NASA, la société américaine de géologie, les associations américaines de physique, de chimie, de géophysique, de météorologie, etc. Plus bas, vous pouvez trouver plusieurs listes d’institutions internationales défendant le même point de vue.
De même pour les académies nationales, que ce soit la France, l’Allemagne, la Chine, la Russie ou les États-Unis, toutes soutiennent que la responsabilité humaine est avérée (et ce malgré leurs intérêts divergents) :
https://www.nationalacademies.org/documents/link/LF5F46A0F4D8D3765F6DBFFA9DD3EA606B9CCD57CD98/file/DD545DB2BB17731A876DF838087FC19943CADEE27AFA
Il n’y a pas de débat d’experts, il y a juste une minorité de personnes qui font passer leurs intérêts ou leurs opinions avant leur rigueur scientifique. On trouve la même situation avec les OGM, la théorie de l’évolution, la 5G ou les vaccins. Dans chaque exemple il y a des scientifiques qui défendent des positions pseudoscientifiques et font croire aux gens qu’il y a un débat encore actif sur ces questions dans le monde scientifique.
Concernant le Soleil, le rayonnement solaire diminue légèrement depuis les années 60 et l’inclinaison terrestre fait que le rayonnement reçu dans les régions arctiques diminue depuis 8000 ans. Je rappelle que le rayonnement solaire reçu en arctique est le moteur principal des cycles glaciaires/inter-glaciaires selon la théorie de Milankovitch. Tout indique que le Soleil ou l’orbite terrestre n’y sont pour rien.
Merci M. Pagesse pour cet article qui a reçu beaucoup de compliments dans mon cercle.
Par contre je n’ai pas apprécié cette histoire de dire : il n’y a pas de controverse sur le climat. C’est exactement le contraire. Pas de controverse dans les médias français, peut-être oui, mais pas dans la communauté scientifique. Je vous invite à lire cet article de mon professeur, titulaire de la chaire de chimie à l’Université Libre de Bruxelles : http://www.science-climat-energie.be/2018/04/26/du-bon-usage-de-la-formule-de-stefan-boltzmann/
C’est bien dommage que l’on se fasse insulter dès que l’on dit que l’augmentation de température est bien réelle, mais que cela est déjà arrivé plusieurs fois avant l’ère industrielle.
La climatologie est une science jeune, très jeune à l’échelle de la science. Comment peut-on prétendre qu’il n’y a pas de controverse. Al Gore peut le dire, pas European Scientist?
Devinette : qui est le brillant climatologue qui a démissionné du GIEC alors qu’il était un des principaux rédacteurs parce que le GIEC ne fait plus de science mais de la politique? Une piste ? Il est marié avec une parisienne.
Bonjour,
Je présume que vous êtes Samuele Furfari, président de la Société Européenne des Ingénieurs et Industriels?
Vous direz à votre professeur de chimie que les valeurs de la NASA sont déduites de leurs programmes satellites. Je lui conseille vivement l’article de Kevin Edward Trenberth intitulé Earth’s Global Energy Budget.
http://www.cgd.ucar.edu/staff/trenbert/trenberth.papers/BAMSmarTrenberth.pdf
Pour rappel, votre professeur ne rejette pas seulement le réchauffement anthropique, il rejette aussi l’existence de l’effet de serre en lui-même. Ce qui est quand même assez fort de café.
Pourriez vous argumenter sur ce que dit le Prof Geuskens au lieu de parler de café. J’ai l’impression que ce n’est pas de café que vous parlez mais de buvette d’après match. Ne réagissez pas inutilement : c’est sur les équations physiques que je vous invite à réagir. Peut-être qu’il se trompe. Je suis à votre écoute pour la réfutation
Le fond du problème avec les affirmations du Prof Geuskens c’est qu’elles sont construites sur des hommes de paille. Il ne répond pas réellement à la littérature scientifique. La démonstration que les affirmations sont fausses, je l’ai déjà donné plus haut. Si l’interprétation des lois de Stefan-Boltzmann et de l’effet de serre était erronée, nous ne serions pas en mesure de vérifier les prédictions des climatologues par l’observation.
Je vous redonne les liens:
Radiative forcing ‐ measured at Earth’s surface ‐ corroborate the increasing greenhouse effect
https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1029/2003GL018765
Increases in greenhouse forcing inferred from the outgoing longwave radiation spectra of the Earth in 1970 and 1997
https://www.nature.com/articles/35066553
Global atmospheric downward longwave radiation over land surface under all‐sky conditions from 1973 to 2008
https://agupubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1029/2009JD011800
Observational determination of surface radiative forcing by CO2 from 2000 to 2010
https://www.nature.com/articles/nature14240
Si ces publications vous semblent dans l’erreur, merci d’expliquer de quelle manière.
Je pense que l’activité agricole avec la photosynthese joue son role dans le cycle du carbone et permet par sa captation de produire de la biomasse (dont des aliments ) qui au final repart en carbone
Le point noir sur le C02 c’est que l’activité humaine utilise aussi de l’énergie fossile (issue d’une photosynthèse et donc d’une accumulation de biomasse de millions d’années ) et ce rejet de CO2 viens en trop dans l’atmosphère maintenant …
Comment fait on pour réduire ce stock libre de CO2?
-L’agriculture doit y contribuer par l’optimisation de ses pratiques (augmenter le stockage du carbone dans le sol …)
-la société doit trouver des solutions pour économiser et utiliser une énergie sans impact carbone (nucléaire, énergie renouvelable yc à partir de la biomasse agricole)