L’avenir de l’utilisation des outils biotechnologiques pour développer l’agriculture n’a jamais été aussi sombre dans l’Union européenne (UE).
Le 25 juillet 2018, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a rendu un arrêt qui juge que toutes les variétés cultivées issues de techniques de modification génétique postérieures à 2001 sont des OGM et doivent être soumis à la réglementation régissant la mise en culture, l’importation et l’utilisation de ces produits dans l’Union européenne, c’est-à-dire les dispositions de la directive 2001/18/CE et les textes postérieurs associés. A sa suite, en France, le Conseil d’Etat vient de prononcer le 7 février 2020 la transposition dans le droit français de cette décision juridique.
Il en ressort que les nouvelles variétés végétales issues de techniques éprouvées comme la mutagenèse mais ayant bénéficié de perfectionnements technologiques récents des nouvelles biotechnologies d’édition du génome doivent être soumises à la réglementation sur les OGM.
De l’avis général, cette réglementation est très lourde et très chère. Seules les grands consortiums internationaux comme Corteva, ChemChina, ou Bayer peuvent financièrement en assumer le coût élevé (plus de 100 millions de dollars par dossier). Cette réglementation est non seulement coûteuse mais elle est aussi disproportionnée par rapport aux risques encourus.
En effet, plus de vingt ans de recul ont démontré que les biotechnologies et les OGM se sont révélés des outils très utiles pour l’améliorer non seulement la santé humaine et animale mais aussi la santé végétale et environnementale (adaptation aux changements climatiques par exemple) comme le soulignent les récentes publications de la Fondation pour l’innovation politique (1). Avec les nouvelles dispositions énoncées par le Conseil d’Etat, même les plantes issues de mutations spontanées observées au champ, et qui ensuite sont passées dans les mains des sélectionneurs pour obtenir des lignées distinctes, homogènes et stables afin de remplir les critères pour être inscrites au Catalogue officiel des espèces et variétés cultivées, seront concernées !
Deux démarches pour sauver l’UE Biotech
Face à ce renforcement réglementaire restrictif, des voix se font entendre pour refondre la réglementation de l’Union européenne sur les OGM.
Ce sont celles du Groupe de conseillers scientifiques principaux auprès de la Commission européenne (le Scientific Advice Mechanism) qui a souligné dans une déclaration publique (2) que la directive 2001/18/CE est devenue inadaptée en raison des avancées en matière de connaissances scientifiques et des récents progrès techniques. Cette haute instance s’est prononcée pour que ce soit les caractéristiques du produit final qui soient évaluées et non la méthode d’obtention. Elle insiste sur la nécessité « de créer un environnement réglementaire favorable à l’innovation » afin que « la société puisse tirer parti des nouvelles sciences et technologies », et appelle au dialogue sociétal entre toutes les parties concernées et le grand public.
Et c’est bien aujourd’hui le grand public qui est saisi de la question grâce à l’action d’un groupe d’étudiants européens de huit nationalités différentes de l’Université de Wageningen aux Pays Bas (3). Bien décidé à « encourager l’innovation agricole de manière responsable dans l’UE », il a lancé une initiative citoyenne européenne intitulée « Cultiver les progrès scientifiques: les cultures sont importantes! » (4). Agréée par la Commission européenne (décision 2019/1184), cette initiative est hébergée sur le site web de la Commission. Son but est de recueillir avant le 27 juillet 2020, date de clôture de la démarche, un million de signatures pour demander la révision de la directive 2001/18 et une modification de la législation en vigueur afin qu’elle se concentre « sur le produit final plutôt que sur la technique, de sorte que la sécurité soit garantie sans que les avantages précieux des nouvelles techniques soient perdus en raison d’obstacles réglementaires absurdes ».
Il faut aider ces jeunes qui prennent en main leur avenir pour que notre futur européen soit tourné vers le progrès. Citoyens européens, il est crucial que la Commission européenne nous entende !
Signez ! https://europa.eu/citizens-initiative/initiatives/details/2019/000012_fr
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(1) Catherine Regnault-Roger. Des outils d’édition du génome au service de la Santé humaine et animale, janvier 2020, 56 pages ; et Des plantes biotech au service de la santé du végétal et de l’environnement, janvier 2020, 56 pages, Fondation pour l’innovation politique (http://www.fondapol.org/)
(2) Une perspective scientifique sur le statut réglementaire des produits dérivés de l’édition génomique et ses implications pour la directive OGM – Déclaration du groupe des conseillers scientifiques principaux- EU Publications Office, Published: 2019-06-04, https://publications.europa.eu/en/publication-detail/-/publication/a9100d3c-4930-11e9-a8ed 01aa75ed71a1/ language-fr
(3) Grow scientific progress https://www.growscientificprogress.org/meet-us
(4) Cultiver les progrès scientifiques: les cultures sont importantes! https://europa.eu/citizens-initiative/initiatives/details/2019/000012_fr
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Je préfère consommer des produits agricoles dont la résistance aux maladies et ravageurs a été obtenue par NBT ou OGM que par traitement avec des pesticides. Pourquoi serais je limité dans mes choix par une réglementation trop restrictive qui ne tient aucun compte des faits et se base sur des craintes alimentées par des suspicions infondées.
Marchandier s’imagine que les OGM remplacent les pesticides. C’est tout le contraire, les OGM, à l’origine (mon810 etc.), sont créés pour résister aux pesticides. Donc : on plante des graines OGM (ou VrTH), elles donnent des plantes OGM et comme aux alentours il pousse aussi quelques adventices, pour s’en débarrasser on arrose bien copieusement le tout avec des pesticides et, résultat des courses, les adventices meurent et il ne reste plus que les fameuses plantes OGM bien imprégnées de pesticides. Bon appétit ou plutôt Bonne chance Marchandier mais je n’irai pas manger chez vous.