
Porté par l’Union européenne, le marché mondial du Bio devrait atteindre les 100 Mrd€ d’ici peu. Une croissance qui cache cependant certaines dérives.
Le marché mondial du Bio (agriculture biologique) devrait très bientôt atteindre les 100 milliards d’euros d’après Ecocert, un organisme de certification français. Avec 178 pays producteurs dans le monde (IBL-Ifoam), ce secteur connait une croissance soutenue, bien que l’agriculture biologique demeure un phénomène relativement mineur en dehors du monde occidental. En 2017, l’Ifoam (fédération internationale du bio) estimait ainsi le marché à 90 Mrd€ – en 1999, 11 milliards. Elle ne représente cependant encore qu’une infime partie des 5000 Mrd$ annuels du marché alimentaire mondial (McKinsey, 2015).
Sur ces presque 100 milliards d’euros, 40 sont consommés aux États-Unis et 37 dans l’UE. « Mais à la différence des Etats-Unis, l’UE connait aussi une forte évolution de la production », note Michel Reynaud, vice-président d’Ecocert. L’Union européenne se place ainsi devant les États-Unis, avec 2,9 % de sa surface agricole utile contre 0,9% outre-Atlantique. On compte désormais 400 000 agriculteurs bio en UE – un chiffre en croissance rapide.
C’est aujourd’hui l’Allemagne qui se place tête des états membres, avec 10 milliards d’euros de produits bios consommés tous les ans, soit 11% du marché mondial. Le second pays est la France, avec 7,8 Mrd€ (8% du marché mondial). Suivent l’Italie (3 %), le Royaume-Uni (3%), la Suisse (3 %) et la Suède. Mais la France affiche le marché le plus dynamique. « Le différentiel avec l’Allemagne se réduit, pour ainsi dire, de jour en jour », note Michel Reynaud. « Nous avons bon espoir de les dépasser. »
Ce phénomène est dû à l’intérêt qu’a exprimé la grande distribution hexagonale pour le secteur du Bio : elle représente environ 44 % de ce marché et contribue le plus à sa croissance. E. Leclerc en est aujourd’hui la première enseigne. Un temps une aubaine, cette tendance n’est pas sans risque. Elle entraine une politique de prix bas, dénoncée par les acteurs historiques du bio qui craignent un effet d’entrainement, accompagné d’une perte de revenus pour les agriculteurs.
« Produire bio coûte plus cher », rappelle la Fédération nationale de l’agriculture biologique. « Les semences, les traitements, les insecticides naturels et même les aliments d’élevage sont plus chers en bio. À surface égale, l’AB est aussi plus gourmande en main-d’œuvre que l’agriculture conventionnelle. »
En outre, cette hausse de la demande entraine une hausse des importations. Aussi, le label ne prend pas en compte le bilan carbone du transport des produits. Plus largement, nombre de ces produits ne respectent pas les codes éthiques qui ont poussé au développement d’une agriculture biologique : bien-être animal, respect des circuits courts, serres non chauffées… Aussi, la « déferlante » bio est-elle à double tranchant, toujours plus ne signifiant pas toujours mieux.