Après une condamnation à baisser leurs barrières douanières contre les biocarburants argentin et indonésien, l’UE prend de nouvelles mesures contre l’agrobusiness.
La guerre des biodiesels entre dans une nouvelle phase. Dans un jugement rendu le 25 janvier, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a estimé que les barrières tarifaires mises en place par l’UE sur les importations de biodiesel indonésien n’étaient pas justifiées. Cette décision enfonce le clou après que l’Argentine ait elle aussi obtenu gain de cause – d’après l’organisation du biodiesel européen, les subventions du gouvernement argentin sur l’ester d’huile de soja atteindraient environ 27 % de sa valeur totale.
L’UE accuse en effet les deux pays de verser des aides d’État illégales à leur producteurs afin d’artificiellement baisser leurs prix de vente. Aussi, depuis 2013 Bruxelles a mis en place des tarifs douaniers antidumping pour sa propre production – entre 22 et 25,7 % pour l’Argentine et entre 8.8 et 20.5 % pour l’Indonésie. Ce sont ces taxes qui ont fait l’objets des recours des intéressés devant l’institution internationale. L’Argentine et l’Indonésie considèrent ces mesures comme protectionnistes.
Malgré ce double revers, l’Europe ne lâche rien. La Commission européenne a réagi à l’annonce en soulignant que « le panel [de l’OMC] s’est (…) rangé du côté de l’UE sur d’autres points », ce qui pourrait inciter l’UE à faire appel de la décision. Le lendemain, elle a annoncé une « procédure antisubvention concernant les importations de biodiesel originaire de l’Argentine », arguant que le pays pratiquait des prix artificiellement bas ainsi que de prêts préférentiels ou de traitements de faveur en matière fiscale.
Ce débat pourrait cependant être rendu obsolète considérant les récentes orientations du Parlement européen. Lors de la session plénière de janvier, les eurodéputés du Parti populaire européen (PPE), les socialistes et démocrates (S&D) et l’alliance des libéraux et démocrates européens (ALDE) se sont prononcés en faveur d’une élimination de l’huile de palme des biocarburants d’ici à 2021. Une décision qui fit écho à une étude remettant en cause les vertus écologiques de ces combustibles – ils sont en réalité trois fois plus polluants que le diesel traditionnel.
Si elle est susceptible de mettre un terme au débat, cette décision pourrait toutefois faire revenir l’OMC par la porte de derrière. La Malaisie a réagi à cette annonce en dénonçant un « apartheid des cultures » et en estimant que la décision européenne constituait une barrière commerciale protectionniste et d’une violation des engagements pris par l’UE dans le cadre de l’OMC. « Nous n’hésiterons pas à prendre des mesures correctives », a averti le ministre malaisien des Industries de plantation et des produits de base, Mah Siew Keong.