Une baisse importante du prix du lait de brebis a durement impacté Sardaigne, le premier producteur en Italie. Alors que la colère des éleveurs menace les élections régionales et fait craindre une contagion, le gouvernement italien va chercher de l’aide à Bruxelles.
Début février, le prix du litre de lait de brebis est tombé à 50 centimes pour atteindre un niveau historiquement bas : moins de 60 centimes au litre – contre 85 centimes en 2017. Cette chute est due à une baisse drastique des ventes du Pecorino Romano [fromage à base de lait de chèvre]. Il avait connu un boom dans les années précédentes, mais en 2018, la tendance s’est inversée (moins 47 % en un an, alors que les exportations française et espagnole augmentaient de 45 % et 12 %).
« Les éleveurs accusent les producteurs de fromage d’avoir mis en place un cartel pour tenir les prix bas. Une accusation contre laquelle s’insurgent les producteurs. Le Pecorino Romano qui se vendait il y a quelques années 8 euros le kilo, a chuté en 2018. Et le 4 février dernier, il était à 5,40 le kilo », explique Il Corriere della Sera. Ces derniers ont refusé la proposition négociée par Matteo Salvini de porter à 60 centimes le litre le prix du lait.
Depuis 10 jours, les protestations sur la place publique se multiplient – principalement le déversant des litres et des litres de lait sur la chaussée, des blocages de routes et des attaques de fromageries. Samedi dernier, un groupe d’éleveurs a même bloqué le bus de l’équipe de football de Cagliari (seule équipe sarde qui figure en première division). Le lendemain, les joueurs rentraient sur le terrain portant tous un t-shirt de soutien : « Solidaires avec les bergers sardes ».
Les sardes demandent désormais que le prix du litre de lait de brebis soit porté à 1 euro. Avec des élections régionales prévues pour le 24 février prochain en Sardaigne, cette situation embarrasse le gouvernement Italien. Certains éleveurs ont même menacé de bloquer les bureaux de vote dimanche. D’abord un mouvement de secteur, la colère des bergers et exploitants sardes a désormais gagnépar la population et les élus sardes – la région dispose en effet d’un parlement indépendant.
La grogne des éleveurs a fait boule de neige, si bien que les oléiculteurs d’autres régions italiennes ont décidé de prendre part au mouvement né en Sardaigne. Ils réclament du gouvernement une aide pour pallier l’importante baisse de leur production liée aux ravages causés par le gel et la xylella. De plus, la crise menace de faire tache d’huile dans d’autres régions de la péninsule, à commencer par la Sicile. Aussi, le mécontentement des agriculteurs italiens a attiré l’attention de l’opinion publique italienne.
Avec des élections européennes qui se profilent, le gouvernement italien, qui criant d’être fragilisé par la crise, a décidé de demander de l’aide à nul autre que Bruxelles ! Ainsi, le ministre italien de l’Agriculture, Gian Marco Centinaio, s’est rendu à Bruxelles le 19 février pour rencontrer le commissaire européen à la santé, Vytenis Andriukaitis, et le commissaire à l’agriculture, Phil Hogan. Il doit y présenter un plan gouvernemental pour augmenter le prix du lait de brebis.
La demande a, pour l’instant, trouvé des échos favorables auprès de l’exécutif européen. La Commission a notamment appelé les producteurs devaient s’unir pour avoir un plus grand pouvoir de négociation et pour parvenir à restabiliser les prix. Les présidents de la Commission et du Parlement ont tous deux récemment fait savoir qu’il n’était pas normal que le prix d’un litre de lait soit moins élevé que celui d’un litre d’eau ou d’une tasse de café.