L’association de prévention contre l’abus de drogues polonaise SIN a assigné Facebook en justice pour la suppression injustifiée de sa page – un procédé qui s’apparente à de la censure d’après l’ONG.
Facebook est dans le collimateur de l’Initiative sociale contre la toxicomanie (SIN) polonaise. Cette ONG adoubée par de institutions internationales, dont les Nations unies, l’UE et la Croix Rouge, se plaint d’avoir vu ses comptes sur les réseaux sociaux Facebook et Instagram – tous deux possédés par le groupe de Mark Zuckerberg – supprimés en janvier 2019. Ces pages ont été fermées pour une communication « en violation des normes de la communauté Facebook ».
« En bloquant nos canaux de communication, Facebook nous empêche d’aider les gens qui en ont le plus besoin », explique Jerzy Afanasjew, de SIN. « En laissant entendre que nous faisons quelque chose d’illégal, cela nuit aussi à notre réputation. » Ce dernier appelle « lutter pour défendre le droit des utilisateurs dont la liberté d’expression a été restreinte par une interdiction arbitraire du géant de la tech ». Aussi, SIN soutient que ces suppressions sont contraires aux dispositions du Code civil polonais.
Dorota Głowacka, avocate à la Fondation Panoptykon, one ONG de défense des droits fondamentaux et libertés dans le contexte du développement numérique, s’est saisie du dossier. Selon elle, « l’objectif stratégique de notre poursuite en justice est de provoquer les plateformes en ligne et de les pousser à s’éloigner de leurs méthodes actuelles opaques et arbitraires de modération de contenu et à introduire des mesures pour mieux protéger notre liberté d’expression. »
D’après elle, plus largement, Facebook ne devrait pas avoir de compétence discrétionnaire exclusive sur les questions de modération de contenu. « L’utilisateur doit pouvoir savoir pourquoi son contenu a été bloqué et présenter des arguments pour sa défense » avance-t-elle. « Les décisions finales des plateformes [sur les suppressions de contenus] devraient faire l’objet d’un examen indépendant par les tribunaux », a-t-elle déclaré.
A noter qu’à compter de décembre 2018, un protocole d’entente signé entre le ministre polonais des Affaires numériques et Facebook donne aux utilisateurs polonais de la plateforme un recours supplémentaire pour contester une suppression de contenu. Le géant du numérique a toutefois continué à appliquer une politique de retrait unilatérale. « Notre affaire concerne Facebook, mais nous espérons qu’elle établira des normes qui influenceront aussi les politiques des autres plateformes », a déclaré Dorota Głowacka.