Ayant lancé la série la Querelle Raoult sur European Scientist, il nous paraissait difficile de ne pas nous-même donner notre avis sur ce sujet phare lié à l’épidémie de Covid-19 ; même si presque tout à ce jour a sans doute déjà été dit, il nous semble que le fond de cette histoire n’a pas encore été clairement expliqué (1).
De par nos travaux précédents nous sommes familiers avec le concept de « querelle scientifique » concept pour lequel nous avions identifié deux sous-catégories : d’une part, les controverses (un désaccord entre experts sur les faits) et polémiques (un désaccord portant sur des arguments ad hominem). Si certaines querelles scientifiques permettent de clairement utiliser ces outils, dans le cas de l’affaire Raoult, il faut reconnaitre que controverses et polémiques sont sans arrêt imbriquées l’une dans l’autre, ce qui rend plus difficile l’analyse. Même si d’une manière générale on s’aperçoit que la controverse à proprement parler porte sur l’efficacité des posologies contre le covid 19, et la polémique concerne les acteurs et leurs conflits d’intérêt politiques et économiques. Or, il est important de préciser d’entrée de jeu qu’il s’agit moins d’une opposition idéologique, que d’une opposition méthodologique.
Ajoutons à ce préliminaire que cette situation est unique : il n’y a qu’en France qu’on a assisté à de tels échanges autour de la possibilité de prescrire de la Chloroquine alors que cette posologie a été proposée partout dans de nombreux autres pays sans pour autant susciter les mêmes débats (2) ou tout du moins pas à ce point.
Ainsi comme en a témoigné dans nos colonnes Grzegorz Cessak, le Président de l’Office d’enregistrement des médicaments polonais :
Le 13 mars 2020, j’ai rendu une décision concernant un médicament contenant la substance active « Chloroquini phosphas », en comprimés de 250 mg pour ajouter sur sa prescription une nouvelle indication: « Traitement de soutien dans les infections à bêta-coronavirus telles que SARS-CoV, MERS-CoV et SRAS CoV-2 ». Il ne s’agit pas d’une innovation dans la lutte contre une pandémie, mais plutôt d’utiliser cette solution pour réduire les souffrances humaines. Pour utiliser une terminologie militaire – ce qui est légitime dans cette situation! – nous renforçons nos positions de défense plutôt que de mener une attaque décisive. Pour un avis définitif, nous devons encore attendre d’avoir une connaissance complète du virus. Celle-ci, espérons-le, ne devrait plus tarder.
De même en Belgique, le médecin Marc Wathelet a rappelé que :
L’hydroxychloroquine, qui est 7-8 fois plus efficace que la chloroquine, est autorisée en Belgique dans le milieu hospitalier. De la même manière qu’il faut prendre des mesures drastiques le plus tôt possible dans une épidémie pour la limiter, il faut donner un antiviral aussi tôt que possible, mais ce n’est pas le cas en Belgique et dans d’autres pays d’Europe, et donc l’efficacité clinique de cette molécule n’est pas testée de manière qui puisse la démontrer ou l’invalider.
On aura vite fait de comprendre que ce sont les prises de positions clivantes de Didier Raoult qui ont eu pour conséquence d’animer le débat. Pourtant, à notre avis, c’est un problème bien plus profond qui sous-tend cette querelle qui n’est qu’un épiphénomène du rapport complexe entre science et médecine. Aussi pour bien comprendre celui-ci, nous allons nous appuyer sur les arguments des auteurs que nous avons eu le plaisir de publier en adoptant le parti-pris suivant : regrouper les attaques anti-Raoult dans la catégorie « Mauvais scientifique » et les soutiens pro-Raoult dans la catégorie « Bon médecin », deux catégories qui renvoient à un jugement de valeur a priori afin de dresser un état des lieux sur les questions en jeu.
Nous prions le lecteur de quelque côté qu’il penche, d’aller jusqu’au bout et de ne pas prendre au pied de la lettre ces deux catégories qui nous sont simplement commodes pour analyser le problème. Notre objectif est moins de parler de la querelle en elle-même que de répondre à la question de savoir pourquoi elle a eu lieu.
Mauvais scientifique ?
Lors de l’audition devant la commission parlementaire Philippe Berta, membre de la commission d’enquête a demandé à Didier Raoult pourquoi il n’avait pas fait des essais cliniques randomisés. L’infectiologue marseillais a répondu « je suis un grand scientifique, je sais ce que c’est qu’un essai » et il a défendu sa méthodologie et pourquoi il n’avait pas fait ce type d’essais considérés comme étant indispensables à toute méthode scientifique. Cette dernière question de l’audition nous plonge directement au coeur du débat. En effet, les premières attaques sur Didier Raoult portent sur sa toute première étude et le fait qu’il ne se serait pas comporté en scientifique en produisant un travail médiocre qui ne respecte pas le protocole de « la bonne science » qui obéit à des études randomisées.
Mauvaise Intuition
C’est ainsi que dans nos colonnes, le Docteur Laurent Alexandre a publié l’Intuition médicale tue et défend en conséquence les essais randomisés.
« notre intuition médicale est mauvaise conseillère et nous l’avons admis même si cela a été une terrible blessure narcissique. Le passage de la médecine du bricolage empirique à l’expérimentation scientifique a été essentielle quand les médecins de Molière ont été remplacés par des scientifiques. L’ère de l’idéologie et des rebouteux a pris fin, pour laisser place à la preuve statistique. On ne soigne plus au hasard. Ce fut la fin de la médecine dogmatique, on a cessé d’administrer saignées et clystères… Comme l’explique le Professeur Patrice Jaillon : « L’intérêt des essais cliniques contrôlés randomisés est de soumettre à une démarche expérimentale l’intime conviction du médecin prescripteur, c’est à dire de l’amener à fonder sa pratique sur la prise en compte de résultats expérimentaux objectifs plutôt que sur des arguments subjectifs reposant sur des expériences individuelles non contrôlées, ou sur des impressions non validement étayées, ou sur des prises de position présentées comme certaines par des leaders d’opinion mais qui ne résistent pas à une analyse critique objective. »
Il cite alors l’exemple de CAST dans lequel, l’absence d’essai contrôle versus placebo dans la prescription d’antiarythmiques pendant les infarctus a tué 60.000 personnes jusqu’à l’étude CAST c’est-à-dire plus que la guerre du Vietnam.
« L’intuition de la totalité des cardiologues mondiaux convaincus que les antiarythmiques diminuaient la mortalité a tué énormément de malades. La leçon a été retenue par les cardiologues. Manifestement pas chez les infectiologues marseillais qui privilégient l’intuition aux essais cliniques réalisés selon les standards internationaux. »
Big Data
Un autre argument connexe sur l’absence de scientificité de la médecine est celui selon lequel Didier Raoult a dénigré le recours aux dernières technologies sur lesquelles une médecine sérieuse doit s’appuyer et notamment le Big Data. C’est l’argument que développe Thierry Berthier, spécialiste d’intelligence artificielle, qui répond à une des phrases choc du professeur marseillais qui a affirmé à la suite de la parution de l’étude du Lancet que le « Big Data était une fantaisie délirante ».
Jeter le discrédit sur la science des données sans être un expert de la discipline et sans fournir le moindre argument rationnel étayant la critique relève de la désinformation la plus complète. Didier Raoult s’est-il déjà intéressé aux réussites du Big Data ? Sait-il que ses collègues scientifiques chinois n’ont mis que 14 jours pour dresser la carte génétique du coronavirus grâce aux sciences des données, au Big Data ? Sait-il que la recherche de nouvelles molécules s’appuie sur les données massives et sur les statistiques ?
Tout est relatif
Une troisième critique porte sur l’approche relativiste du savant marseillais. François Vazeille, qui a lu les principaux extraits de l’ouvrage de Didier Raoult « De l’ignorance et de l’aveuglement. Pour une science postmoderne » (3), dénonce la philosophie de Didier Raoult qui d’après le scientifique du CERN mépriserait la raison et se réfère à la philosophie des sciences de Paul Feyerabend.
Sa défense d’une ″science postmoderne″ échappant, d’après lui bien entendu, à ces idéologies du moment, est en parfait accord, comme nous l’avons vu, avec ses travaux qui ne cadrent pas du tout avec les critères d’approches rationnelles et objectives et où le manque de rigueur est patent. Son goût pour communiquer ses résultats au grand public avant publication est en parfait accord avec ce que défend, par ailleurs, Aurélien Barrau lorsqu’il écrit : Il est ″tout à fait acceptable, voire souhaitable … que des hypothèses incertaines soient divulguées dans la presse″. Enfin, ses annonces hasardeuses sur l’inutilité du confinement, puis la diminution du nombre de personnes infectées en raison de la saison (et non du confinement) vont encore dans le sens du relativisme : chacun a sa vérité et toutes les vérités se valent.
Gourou
Il y a une tentative de « gourouisation » qui fait que l’infectiologue marseillais a cherché à toucher directement l’opinion via les médias sociaux et traditionnels. Voici un argument massue qui a été abordé dans un second texte publié chez nous par Laurent Alexandre, très prolixe sur le sujet :
Cette mutation a des conséquences dans le monde médical : Didier Raoult a réussi grâce à sa présence sur Youtube à contourner tous les filtres académiques traditionnels en s’adressant directement à l’opinion. Cela lui a permis de masquer les énormes failles méthodologiques de ses études qui n’ont aucune valeur scientifique. Une opinion déboussolée a transformé Raoult en gourou. L’immense majorité des français pense que son protocole est magique. La « Trumpisation » et la « GiletJaunisation de la médecine » ont été foudroyantes : la rationalité, les élites parisiennes, les essais cliniques rigoureux sont voués aux gémonies par les pro-Raoult. Nous assistons à des phénomènes para-sectaires, des adhésions religieuses, sur lesquelles les arguments et les études n’ont pas de prise, car nous sommes sortis du rationnel.
Vices de science
Afin de compléter cette dernière critique, nous ajouterons encore celle du célèbre vlogueur la Tronche en biais qui rappelle les quatre vices cardinaux (4) des scientifiques des attitudes que les vrais hommes de science doivent éviter d’avoir car « on ne pourrait plus savoir si leur parole a de la valeur ou non »
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- « L’imprudence épistémique » qui consiste à soutenir des vérités non sourcées et qu’ils affirment sans preuves ; à l’opposé on trouve la « prudence épistémique » qui consiste à douter,
- « Personnaliser le sujet » revient à confondre sa personne et son propos et prendre les critiques contre ces propos comme des attaques ad hominem,
- « Le double standard » une attitude qui consiste à faire du cherry picking pour sélectionner les arguments auxquels on croit plutôt que les autres,
- Le « populisme scientifique » selon le vlogueur, réunit les trois précédents : on court-circuite la méthodologie scientifique habituelle pour aller parler directement devant les médias… or on ne peut se passer de la méthode scientifique qui vient corriger l’intuition.
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Bien qu’il ne soit jamais cité nommément, on comprend ici qu’il s’agit d’une critique du professeur Raoult qui est dessinée en creux.
Pseudo-sciences
On le voit, les critiques évoquées précédemment tendent toutes vers la même affirmation : « Didier Raoult n’est pas un bon scientifique »…. Mais pour autant, cela veut-il dire qu’il faut en faire un pseudo-scientifique ? C’est ce que certains n’ont pas hésité à laisser entendre. Et pourtant si on s’arrêtait à cette analyse, on n’aurait pas saisi toute la dimension du problème. En effet, contrairement à d’autres « querelles » opposants scientifiques et pseudo-scientifiques, la nature de l’opposition n’est pas idéologique, mais méthodologique (5). Ici on se situe à un tout autre niveau. Or si certaines critiques sont justifiées du point de vue méthodologiques, il n’en reste pas moins qu’elles appliquent leur jugement comme si Didier Raoult opérait dans le domaine des sciences pures et dures, alors qu’il s’agit ici de médecine. Comme nous l’avons déjà souligné le désaccord porte davantage sur la méthodologie que sur toute forme d’idéologie.
Précisons enfin que la plupart de ces critiques sont fondées sur une vision un peu exacerbée et parfois hors contexte de certains propos de Didier Raoult….ce qui montre à quel point on se situe dans une véritable guerre des tranchées de la communication. Si on prend le temps d’écouter toutes les vidéos disponibles sur le net on peut cependant affiner le sujet. Tout d’abord l’expert n’a jamais dit explicitement que la Chloroquine était une panacée mais pour reprendre ses mots qu’elle était prometteuse. Ensuite, il n’a jamais remis en question les études randomisées mais il a jugé que dans de telles circonstances et étant donnée la pandémie c’était impossible à réaliser et contraire à l’éthique ; il a d’ailleurs précisé récemment qu’aucune étude randomisée sérieuse en double aveugle n’avait été réalisée et qu’on lui reprochait à lui ce que l’on n’avait jamais fait pour les autres (6). Dans une vidéo de présentation de l’IHU (7), il loue les vertus du big data et explique que l’avenir de son institut passera forcément par là. Il ne cesse de répéter à plusieurs reprises qu’il n’est pas devin et n’a pas de capacité de prédiction d’un prophète. Par ailleurs dans une audition réalisée il y a de cela quelques années au Sénat, il explique qu’en cas de pandémie, il ne faut pas laisser la parole aux politiques et il faut que les experts virologistes et infectiologues mobilisent la parole pour rassurer le public et faire passer informations crédibles et éviter les messages catastrophistes (8), un point important et qui explique beaucoup de choses. Chacune de ces positions allant à l’encontre des critiques listées précédemment.
Bon médecin ?
Nous avons décidé de regrouper sous cette catégorie les arguments des auteurs qui soutenaient Didier Raoult et que nous avons pu publier. Et le premier d’entre eux et aussi le plus original permet de comprendre l’univers totalement différent dans lequel nous nous retrouvons projeté et qui n’est pas celui de la science.
Stratège
Un argument sans cesse évoqué par l’infectiologue marseillais est que, lui il se projetait dans l’action et que, de ce fait, il n’avait de temps à perdre à faire de longues analyses. Par ailleurs, il a toujours mis en avant sa stratégie centrée sur l’action : « tester, tester, tester, puis traiter, traiter, traiter et isoler » Ce que l’historien Philippe Fabry a traduit pour nous dans un texte intitulé Un nouveau Rossbach :
L’affaire a scindé la France en deux camps : d’un côté ceux qui, même sans l’aduler, voient en Raoult l’homme de bon sens et d’action, qui refuse de subir purement et simplement la situation et préfère prendre des mesures qui ne soient pas toujours techniquement impeccables mais permettent une relative maîtrise morale sur les circonstances ; de l’autre ceux qui voient en Raoult un populiste scientifique, un insubordonné, une menace pour l’autorité de la chaîne de commandement de l’administration scientifique française. En somme, la France proactive qui attend de ses dirigeants de l’audace, de l’initiative, de la détermination sans se soucier du risque d’erreur, et la France immobiliste, qui craint le jour d’après et les procès, se soucie d’abord de maintenir l’autorité gouvernementale et administrative. La France du principe d’action contre la France du principe de précaution. La France qui veut une solution au problème critique du moment, même partielle, même simpliste, face à la France qui cherche avant tout à se prémunir des conséquences du problème, en comptant sur l’absence de solution pour finir par le résoudre. Le meilleur exemple de cette absence de solution est l’étude Discovery, par laquelle le gouvernement et l’INSERM entendaient éteindre la polémique sur l’hydroxychloroquine en promettant une étude claire et méthodologiquement impeccable, dont les résultats ne devaient finalement jamais arriver : ils ont été annoncés pour début avril, puis pour fin avril, puis pour mi-mai, puis pour fin mai… Et l’on finit par percevoir derrière cet échec-né, puisqu’il comptait sur une aide européenne qui n’était pas acquise et qu’il ne testait même pas le protocole suggéré par le professeur Raoult, qu’il s’agissait surtout de donner du grain à moudre à l’opinion en attendant que la crise passe.
En lisant Fabry, on pourrait croire que Didier Raoult privilégie l’action au mépris de toute prudence qui sied à son exercice de la médecine et sans aucune méthode. Se fiant purement à son intuition comme l’a dénoncé Laurent Alexandre, mais ce n’est pas le cas.
Observateur
Contre l’argument qui soutenait que seules les études randomisées en double aveugle pouvaient valoir pour valider un traitement médicamenteux et que, par conséquent, il fallait absolument bannir l’intuition, il est possible au contraire de défendre les études observationnelles.
C’est le point de vue du statisticien Marc Rameaux dans un texte fleuve intitulé A la recherche de la raison dans la controverse sur l’hydroxychloroquine. L’auteur commence par rappeler que la RCT, bien qu’étant la méthode la plus fiable, n’est toutefois pas un absolu
Les RCT ne sont cependant pas un accès direct aux faits. La science n’a jamais accès directement aux faits, elle teste des hypothèses. Les essais en double aveugle randomisés sont la meilleure méthode de test. Ils ne sont pas la vérité absolue.
Aussi l’auteur nous invite à ne pas prêter davantage que nous le souhaitons à la statistique
La statistique ne pense ni ne décide à notre place. Elle soumet nos hypothèses à une mesure quantitative de fiabilité la plus rigoureuse possible, ce qui est déjà très bien. Elle aide également à savoir où chercher, si des biais inattendus apparaissent, en évitant de mélanger toutes les causes concourant au résultat, ce qui est également très bien. Mais nul n’échappe à une interprétation et une vérification humaine, pour savoir si l’échantillonnage aléatoire est effectivement représentatif ou s’il renferme encore des biais non repérés.
Précisons que ce texte a été écrit bien avant l’épisode du Lancet Gate et qu’il faut en tirer toutes les conséquences. Marc Rameaux nous invite également à une prudence à l’égard de ceux qui prêtent une puissance absolue au hasard et ont une définition « absolutiste » de l’EBM :
Il y a à ce propos une terminologie inquiétante dans le terme d’« Evidence Base Medicine », qui me fait irrésistiblement penser au « Fact checking », la même mégalomanie et la même malhonnêteté intellectuelle consistant à s’approprier l’objectivité. Le glissement sémantique entre « essais randomisés », qui n’est qu’une demande légitime de davantage de rigueur et EBM, qui est la croyance que l’on est capable de lire directement les faits dans toute leur objectivité, résume la dérive de cet usage de la statistique.
Mais tout cela ne serait qu’anecdotique si Marc Rameaux ne rappelait pas qu’il existe une méthode qui a fait ses preuves en matière d’études observationnelles, celle qui respecte les critères de Bradford Hill et que celle-ci est complémentaire de la RCT.
Les personnes qui divinisent les tirages aléatoires et les RCT n’en ont compris le sens que très superficiellement. Elles ont généralement appris la statistique comme une technique formelle, qu’elles peuvent appliquer très rigoureusement dans leur domaine, mais sans en connaître les limites. Bradford Hill est issu du même creuset intellectuel que Pearson et Fisher. Ces pères fondateurs de la statistique moderne connaissaient très bien l’impossibilité d’un tirage aléatoire neutre et les questions épistémologiques sur les rapports entre causalité, corrélation et hasard que la statistique pouvait poser. Opposer l’analyse par tirage aléatoire et le raisonnement causal ou observationnel était pour eux un non-sens : ils ont forgé des outils rigoureux aussi bien pour l’un que pour l’autre.
Pour conclure le statisticien montre que la démarche de Raoult qui vise à préconiser de hydroxychloroquine + azithromycine est bien plus qu’un pari hasardeux :
Je pense que ceux qui estiment qu’il faudrait administrer préventivement le traitement du Pr Raoult font ce type de calcul d’espérance mathématique. Le Pr Raoul a tort sur certains points de méthodologie mais raison pragmatiquement : en espérance mathématique, les effets secondaires létaux ont très peu de chances de l’emporter sur les guérisons, même sur une population importante, si l’on écarte du traitement tous les patients contre-indiqués : les bases observationnelles de son traitement sont beaucoup plus profondes qu’elles ne l’étaient sur le cas d’école de la Flécaïne. Et le compteur tourne, de plusieurs milliers de morts par jour. L’on fait ce type de calcul en situation critique, ou aucune décision n’est bonne, mais lorsque le temps court : comment maximiser ses chances de survie dans le crash d’un avion ou lorsque l’on croise un grizzly en forêt ? La situation est dramatique. Le calcul n’en est pas moins rationnel.
Adaptation
Or, le fait de privilégier l’action et la démarche observationnelle permet à l’auteur une véritable souplesse d’action. C’est ainsi qu’il a pu faire évoluer son traitement et toujours insisté sur la nécessité d’effectuer des tests comme nous explique le Professeur Claude Escarguel , preuve s’il en est ici de l’importance donnée à l’observation, à l’expérience et que le bon médecin doit pouvoir changer rapidement ses prescriptions.
Heureusement pour la suite de l’histoire qui est en train de s’écrire, Didier Raoult et l’équipe de l’IHU ont eu la bonne initiative de l’associer à un antibactérien, dont l’utilisation, dans la prévention des surinfections pulmonaires des viroses respiratoires, est assez classique. Leur démarche, celle qui aurait du être appliquée partout en France (tester, tester, tester, puis traiter, traiter, traiter et isoler) a permis de sauver près de 50% de patients de la mort : même s’il s’est trompé sur la molécule « miracle » (l’AZI et non l’HCQ), on lui sera toujours reconnaissant d’avoir ouvert une piste qui nous aura permis de rectifier le tir : sans lui, sans son tableau de la chute de la charge virale, la piste de « l’effet préventif » de l’Azithromycine et celle d’une coopération bactérie/virus n’aurait pas pu être ouverte.
Positivisme et éthique
Comme on le sait enfin, Didier Raoult a toujours martelé qu’il ne croyait pas aux modèles prédictifs qu’affectionnent particulièrement les scientifiques des sciences dites « dures ». C’est ce que nous a rappelé le journaliste des sciences allemand Edgar Gartner en distinguant « scientisme » d’une part, et « sens commun » de l’autre.
C’est selon cette même idéologie scientifique qui prévaut actuellement que l’on peut également expliquer l’un des plus grands scandales scientifiques de la crise du Corona. Il s’agit de la campagne de lobbying apparemment orchestrée par de grandes sociétés pharmaceutiques contre l’utilisation de la chloroquine (CQ), un antipaludique et un antirhumatismal, qui a fait ses preuves depuis plus de sept décennies et est également très bon marché, ou ses dérivés plus tolérables, l’hydroxychloroquine (HCQ) et le phosphate de chloroquine en combinaison avec l’antibiotique azithromycine (AZ), qui est également devenu un classique. En France, le professeur Didier Raoult a prescrit ces deux médicaments à ses patients testés positifs pour Covid-19 à l’hôpital de Marseille « La Timone » dans la phase initiale de la maladie. Il n’a jamais prétendu que ces médicaments, qui sont destinés à des usages complètement différents, pouvaient à eux seuls arrêter la maladie déjà avancée. Ils devraient plutôt empêcher l’aggravation de l’infection virale, de sorte qu’ils appartiennent davantage à la catégorie des prophylaxies. Il a évoqué les bonnes expériences de son collègue chinois Zhong Nanshan et du serment d’Hippocrate, qui lui ont ordonné d’aider les patients en l’absence de thérapie reconnue avec des méthodes non conventionnelles. Grâce à son approche empirique et son bon sens, Raoult a pu s’appuyer sur ses décennies d’expérience en tant qu’infectiologue ainsi que la reconnaissance mondiale dont il bénéficie en tant que microbiologiste de premier plan (dont agents pathogènes bien connus portent le nom), ce qui se reflétait également dans l’indice Science Citations. Didier Raoult a montré avoir raison, avec des résultats initialement atteints chez plus de 1000 et enfin chez près de 4000 patients. Presque nulle part ailleurs, moins de patients sont décédés de Covid-19 qu’à Marseille (0,9%). L’arythmie cardiaque tant redoutée (allongement de l’intervalle Q-T) n’a été décelé que chez 25 patients (0,67%). Le traitement n’a été interrompu que dans trois cas pour cette raison.Cependant, il n’a pas été reconnu par les mandarins des services de santé publics français. Au contraire, ils se sont moqués du fait que Raoult dans le sud de la France est maintenant adoré comme un messie par le commun des mortels, et l’ont accusé de sa procédure ne répondant pas à «l’étalon-or» des études cliniques. Seules les études randomisées en double aveugle dans lesquelles une partie des sujets sont traités avec des placebos à leur insu sont considérées comme répondant au standard exigé.
Par ailleurs, Gartner insiste sur l’argument souvent répété par Didier Raoult qu’il n’est pas éthique de pratiquer des essais randomisés en double aveugle dans une période d’épidémie.
Dans le cas de maladies potentiellement mortelles telles que Covid-19, il était éthiquement injustifiable d’administrer des placebos aux patients porteurs, a répondu Didier Raoult. La médecine ne se limite en effet pas à l’application de règles rigides dérivées de la « science », mais est également connue pour être un art basé sur des décennies d’expérience et d’intuition. Il s’agit donc moins de certitude que de probabilités. Après tout, Didier Raoult peut s’appuyer sur la polémique de Paul Feyerabend contre la contrainte méthodologique.
L’EBM en question
Ces quatre points de vue des « pro-Raoult » appuient clairement la thèse selon laquelle l’infectiologue est un bon praticien. Or à ce stade du raisonnement nous voudrions encore répondre à une objection qui a été faite par les détracteurs de l’infectiologue marseillais selon laquelle il ne pratiquerait pas l’Evidence Based Medecine. Si nous avons déjà évoqué cela en partie avec les arguments de Marc Rameaux, nous voudrions ajouter à cet argument ceux que rapporte le vlogueur Jean Baptiste Alexanian, dans « EVIDENCE BASED MEDICINE : Les Suisses qui prescrivent de l’Hydroxychloroquine font-ils de l’EBM ? » (9) Dans cette vidéo il cite un article tiré du JAMA (10) et un autre tiré du Lancet (11) qui critiquent une définition caricaturale de l’EBM et généralement diffusée sur les réseaux sociaux selon laquelle, celle-ci ne pourrait se pratiquer qu’avec des médicaments à fort niveau de preuve. Or d’après les textes fondateurs,
« L’EBM c’est proposer à son patient le traitement avec le plus haut niveau de preuves disponible en accord avec lui et en fonction de ses préférences. » L’avis du patient est très important quand le niveau de preuve n’est pas clair. Et quand il n’y a aucun niveau de preuve élevée, on a la possibilité d’utiliser d’autres critères que purement scientifiques. En s’appuyant sur un papier du Lancet qui dit qu’il n’y a pas de niveau de preuve suffisant pour recommander ou ne pas recommander l’HCQ, ceci est donc tout à fait cohérent dans le cadre de l’EBM.
Un argumentaire qui n’était pas destiné à Raoult mais permet de clore définitivement le débat sur le fait de savoir s’il pratique l’EBM ou non.
Mais alors si Didier Raoult est considéré par ses détracteurs comme un mauvais scientifique et par ses défenseurs comme un bon médecin, il nous faut interroger le rapport « science-médecine ». C’est ce que nous nous proposons de faire pour conclure.
Science et médecine
Ayant énoncé les arguments des « anti » et des « pro », nous faisons objectivement face à une contradiction, car il est difficile de poser ces deux termes et affirmer qu’on puisse être un bon médecin tout en étant un mauvais scientifique. Car le plus généralement, on définit la médecine comme une pratique qui s’appuie sur les connaissances scientifiques de son époque.
Pour approfondir cette notion sommaire nous proposons de nous appuyer sur le Normal et le Pathologique de Georges Canguilhem. La thèse soutenue par ce dernier en 1943 est que :
« Le médecin a pris le parti de la vie. La science le sert dans l’accomplissement des devoirs qui naissent de ce choix. L’appel au médecin vient du malade. C’est l’écho de cet appel pathétique qui fait qualifier de pathologique toutes les sciences qu’utilise au secours de la vie la technique médicale. C’est ainsi qu’il y a une anatomie pathologique, une physiologie pathologique, une histologie pathologique, une embryologie pathologique. Mais leur qualité de pathologique est un import d’origine technique et par là d’origine subjective. Il n’y a pas de pathologie objective. On peut décrire objectivement des structures et des comportements, on ne peut les dire « pathologiques » sur la foi d’aucun critère purement objectif. Objectivement, on ne peut définir que des variétés ou des différences, sans valeur vitale positive ou négative. »(11)
Que veut dire ici ce philosophe également docteur en médecine ? Il faut resituer cette analyse dans son contexte : comme on sait l’ouvrage répond essentiellement aux thèses positivistes d’Auguste Comte et à la physiologie de Claude Bernard. Ce dernier considérait le pathologique comme une variable purement quantitative du normal. Canguilhem revient sur cette définition et soutient qu’un phénomène pathologique n’est pas réductible à une analyse de normes et d’invariants. Pour lui « ce qui distingue le physiologique du pathologique ce n’est pas une réalité objective de type physico-chimique, c’est une valeur biologique ». Il y a donc un saut qualitatif. Nous ne pouvons déduire le pathologique des normes observées au niveau physiologique. Il nous faut partir de l’expérience d’un cas.
Mais attention, il est important de comprendre que ce n’est pas l’apport de la science qui est nié ici, tout phénomène pathologique peut bien être décrit scientifiquement, mais sa valeur biologique, fait qu’il ne peut être réduit à cette même définition scientifique. Et le plus important est que la pathologie ne peut se passer d’expérience :
«C’est d’abord le malade qui a constaté un jour que quelque chose n’allait pas (…) le médecin a tendance à oublier que ce sont les malades qui appellent le médecin. Le physiologiste a tendance à oublier qu’une médecine clinique et thérapeutique, point toujours tellement absurde qu’on voudrait dire, a précédé la physiologie. » La pathologie ne peut donc être fondée avant la physiologie. (…) Aujourd’hui une pathologie objective procède de la physiologie, mais hier la physiologie a procédé d’une pathologie qu’il faut dire subjective, et par là imprudente certainement, mais certainement audacieuse et par là progressive. Toute pathologie est subjective au regard de demain….
Cette phrase est fondamentale et Canguilhem d’ajouter
Est-ce seulement au regard de demain que la pathologie est subjective ? En ce sens, toute science objective par sa méthode et son objet est subjective au regard de demain, puisque, à moins de la supposer achevée, bien des vérités d’aujourd’hui deviendront des erreurs de la veille.
Ainsi, comme la dit le philosophe Claude Debru, en commentant l’oeuvre de Canguilhem, « Tout en s’appuyant sur des sciences, la médecine n’est pas une science c’est une technique fondée sur des propriétés vitales, utilisant des propriétés vitales « la fameuse normativité », au service de la vie. Canguilhem développe une philosophie pour la médecine plutôt qu’une philosophie de la médecine, qui porte finalement sur l’expérience de la vie et sur la vie comme expérience. »(13)
Ces quelques rappels jettent un éclairage nouveau sur notre problématique.
Ne pourrait-on pas supposer en effet que cette querelle a eu lieu parce que certains ont oublié que la médecine n’est pas toute la science et que « toute pathologie est subjective au regard de demain » ; de ce fait, ils voudraient réduire la médecine à une science en retirant ce moment où le médecin doit agir sans disposer de toutes les informations sur la maladie et le traitement. Ce moment où l’intuition et l’expérience sont nécessaires.
Ayant posé que la médecine était la science et que la seule médecine dite scientifique ne pouvait se faire qu’en ayant recours à la RCT, et adoptant une définition stricte de l’EBM, ils négligent cette phase essentielle qui fait que la médecine commence par l’observation d’une pathologie subjective. Comme on l’a déjà souligné, ils considèrent pour pseudo-scientifique un médecin qui ne s’appuierait pas uniquement sur la RCT… ce qui révèle une approche réductrice.
Pour autant, le professeur Raoult n’est pas totalement innocent. Car même s’il n’a jamais prétendu disposer de la panacée, qu’il s’appuie sur des études peu convaincantes aux yeux de la communauté scientifique pour faire la promotion d’une posologie fait qu’il se permet sans doute de dire plus qu’il ne peut. Et de ce fait, il aurait lui aussi dû accepter que « toute science objective par sa méthode et son objet est subjective au regard de demain. » Il a prêté plus à la médecine que ce qu’elle n’était en mesure de faire. Sans doute aurait-il mieux valu tenir une position humble et se contenter de faire comme dans les autres pays et dire que la Chloroquine un traitement possible, à défaut de tout autre.
Reconnaissons-le, d’un côté comme de l’autre il y’a eu une confusion des genres. Certains critiques ont nié la spécificité de la médecine et ont accusé de pseudo-scientifique un exercice de la médecine qui ne l’était pas. On lira pour s’en persuader la dernière tribune de Marc Rameaux que nous venons tout juste de publier, intitulée « Preuves cliniques sur les traitements du COVID-19 : la question de l’automatisation de la médecine » (14)
De l’autre, un médecin s’est cru obligé d’en faire plus qu’on n’attendait de lui. Très concrètement, ce désaccord méthodologique s’est exprimé dans la querelle entre les partisans de la RCT et ceux de la méthode observationnelle.
Les premiers ont critiqué ceux qui voulaient faire leur travail de médecin sans avoir recours à cette pratique, les seconds ont pensé qu’ils disposaient d’une méthodologie nécessaire et suffisante du point de vue de l’exigence rationnelle, pour affirmer une « vérité d’aujourd’hui » qui deviendra une erreur de la veille »
Notons toutefois que si le marseillais a eu tant de succès auprès de l’opinion publique, c’est parce que le bon sens fait que chacun sait qu’il ne va pas consulter un médecin pour qu’il nous dise qu’il va expérimenter sur nous, et encore moins pour qu’il nous dise que la posologie qu’il va nous prescrire n’a pas été prouvée.
Il faut bien évidemment que la science reconnaisse la spécificité de la médecine et que la médecine ne prétende pas outrepasser ses capacités eu égard au domaine scientifique.
Le fait est que Didier Raoult est un bon médecin surtout parce qu’il a toujours su s’adresser au patient et à sa maladie. Ne serait-ce pour commencer par le caractère rassurant de ses propos qui contrastait fortement avec le caractère angoissant de la communication gouvernementale. Et il a réussi à le faire en prenant la parole sur Youtube. Il s’est appuyé sur la science dont il disposait. Là où il a outrepassé son rôle de médecin c’est quand il a voulu faire comme si on avait affaire à une « pathologie objective » alors qu’elle était nouvelle et qu’il n’y avait pas de traitement avéré. C’est aussi à notre avis ce qui explique cette querelle franco-française, qui n’a pas eu lieu dans les autres pays, alors que eux aussi, ils ont choisi ce traitement par défaut, pour adresser une pathologie subjective (15).
Selon nous, cette querelle, est donc le reflet d’une tension permanente entre science et médecine sur un fond d’émergence d’une nouvelle problématique : certains voudraient réduire la médecine à la méthode scientifique, oubliant que la spécificité du phénomène vital fait qu’on ne pourra jamais se passer de la relation patient médecin. Un sujet sur lequel nous aurons l’occasion de revenir.
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(1) En qualité d’éditeur, se prononcer sur un tel sujet présente un risque : celui de perdre la moitié de son lectorat. C’est la raison pour laquelle, nous avons donc donné la parole à des auteurs « pro » et « anti » Raoult. Or la lecture de ces arguments a été fructueuse, car elle nous a permis de comprendre l’articulation de cette opposition.
(2) L’IHU a fait la liste des pays où l’usage de la Chloroquine était autorisée dans le Monde https://www.mediterranee-infection.com/coronavirus-pays-ou-lhydroxychloroquine-est-recommandee/
(3) De l’ignorance et de l’aveuglement. Pour une science postmoderne″, CreateSpace Independent Publishing Platform, 2015.
(4) Les 4 vices cardinaux des scientifiques https://www.youtube.com/watch?v=QhX7SQb1BMg&t=4s
(5) Beaucoup de critiques de Raoult ont vu dans le fait qu’il s’occupait davantage de communiquer en direct avec l’opinion plutôt que de faire valider ses expériences par les pairs, une occasion de le comparer à un pseudo-scientifique. Dans la querelle des OGM, nous avons démontré que les anti-OGM posaient comme croyance récurrente l’absence d’équivalence en substance entre les organismes génétiquement modifiés et les organismes issus de la sélection classique (Oury, PUF 2006). C’est en se conformant à ce principe qu’ils ont falsifié certaines expériences pour affirmer à tort que les OGM représentaient un danger pour la santé humaine. Des affirmations qui ont été réfutées par la communauté scientifiques. On pensera à Arpad Pusztai, par exemple, dont les études ont été réfutées par la Royal Society, ou encore à Gil Eric Séralini, dont les études ont été dépubliées. Derrière ces auteurs il y avait un combat idéologique sous-jacent : démontrer que les modifications du vivant qui ont recours à la transgenèse végétale ne sont pas « naturelles » et qu’elles sont à éviter. On se trouve donc dans une toute autre dimension que la querelle Raoult sur l’Hydroxychloroquine et c’est à notre sens une erreur de croire que parce que parce que Didier Raoult s’est adressé au public plutôt qu’à ses pairs, tout comme l’ont fait Pusztai, Séralini, ou encore bien d’autres pseudo-scientifiques sur une quantité d’autres thématiques (ondes, nucléaires, glyphosate…). Comme nous allons le montrer dans la partie suivante, les raisons de cette prise de parole sont toutes autres.
(6) Des mots et des chiffres https://www.youtube.com/watch?v=og7doP37AI8
(7) 5 ans avant la crise du coronavirus, découvrez comment travaille le professeur Raoult https://www.youtube.com/watch?v=esFAIpNbuiM&t=7s
(8) Didier Raoult en 2012 : La France, « un pays de seconde zone » sur les maladies infectieuses ? https://www.youtube.com/watch?v=H7p5TfbT-ms&t=4s
(9) https://www.youtube.com/watch?v=kvNVsqfEzjU&t=57s
(10) https://jamanetwork.com/journals/jama/article-abstract/2765410
(11) https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28215660/
(12) Georges Canguilhem, in le Normal et le pathologique, PUF, Quadrige, p.153
(13) Claude Debru : Canguilhem : le normal et le pathologique sous le regard de l’éthique https://www.youtube.com/watch?v=Csi1e10hvKU
(14) La « méthode scientifique » ne consiste pas en une formalisation qui élimine tout facteur humain et toute intuition. Elle est un balancier incessant entre la preuve formelle et l’hypothèse plus ou moins intuitive. Elle atteint les précisions extraordinaires des sciences non parce que sa démonstration est absolue, mais parce que ce balancier converge de plus en plus, éliminant les hypothèses non pertinentes comme des scories de plus en plus petites.
(15) A l’heure où nous mettons en ligne il semblerait que les choses évoluent en ce qui concerne la Chloroquine en France. Ainsi comme on peut le lire sur le blog de Gérard Maudrux sur le site du Quotidien du médecin : « La presse, si prompte à mettre en avant les informations anti chloroquine, ne semble pas avoir remarqué que la prescription de Plaquénil semble avoir été assouplie en catimini par le gouvernement. Un de nos lecteurs a soulevé le problème. Face à ce qui semble être une évidence, en premier lieu les témoignages des médecins prescripteurs, les très nombreux pays qui dans le monde l’utilisent de plus en plus, les études qui sortent montrant la diminution des cas graves traités par HCQ et AZI,.. je me demandais comment, après tout ce qu’il a affirmé, le gouvernement allait faire marche arrière, et s’il le ferait. » https://blog.gerardmaudrux.lequotidiendumedecin.fr/2020/07/15/la-prescription-dhydroxychloroquine-elargie/
Je suis d’une famille de médecin.Dont une partie depuis Louis XVI.Mes 2 grands pères étaient médecins ont fait la guerre de 14 et mon père était ingénieur civil des Mines.Moi même j’ai fait des études de médecine jusqu’en 5ème année, puis j’ai pris un poste d’infirmière en EHPAD au DC de mon mari.
Je vous remercie de cet article qui me semble faire élégamment le tour de la question avec objectivité, mot dont l’usage m’a été appris par les infirmières. Bien sûr, je suis une Raoult acharnée par intuition très objective et très subjective. La médecine est un art pas un protocole et je pense que quoiqu’il en soit DR a fait ce qu’il fallait faire.
Quant au reste « Gouverner c’est prévoir »: DR n’avait-il donné d’excellents conseils très objectifs et basés sur l’évolution des techniques scientifiques de détection des microbes pathogènes dès 2005 (une intuition? de la science)???? Comme disent si justement les pompiers, un départ de feu, ça s’éteint très facilement, mais après c’est foutu.
En vous remerciant encore
Chère madame je vous remercie pour votre commentaire qui m’a fait plaisir à lire.
Bon scientifique, bon médecin. Mauvais journaliste.
Cet article est non seulement clivant, mais structurellement porté vers un anti Didier Raoult primaire. C’est pas vous qui allez donner des leçons de méthodologie, de recherche de traitement à une sommité mondiale de l’infectiologie. On a bien compris que vous n’appréciez guère l’homme. Mais hélas, vous faîtes parler Laurent Alexandre sur des questions dont il n’a pas la compétence. Quelle est sa légitimité sur cette question. Désolé de vous le dire, ni l’auteur de cet article, ni les différentes références citées n’ont le background scientifique du Scientifique marseillais. Donc , arrêtez de vous faire du beurre sur lui et allez-y plutôt le confronter en un tête-à-tête si vous en êtes capable. Et là, on verra.
Marrant, cet édito fait réagir négativement aussi bien les pro que les anti Raoult qui sont très « engagés » … il faut croire qu’il touche juste !
La situation sur la connaissance de l’efficacité de la HQ
https://www.hug.ch/sites/interhug/files/structures/coronavirus/documents/hydroxy-chloroquine_et_covid-19.pdf
Aucune raison de penser que ce traitement fonctionne….
Franchement, cet affrontement est saoulant au possible, et j’en veux beaucoup aux autorités de ne pas avoir fait leur travail de verification.
Le principal argument de Raoult est la baisse rapide de la charge virale ainsi que la durée de portage qu’il estimait à plus de 30% (9 jours au lieu de 14 si je ne me trompe).
Y a-t-il besoin d’un double randomisé + placebo à coût et délai important pour vérifier une affirmation chiffrée ?
Est-ce compliqué de demander à des structures hospitalières de vérifier par des mesures si oui ou non un groupe de x patients avec Azitro+Hydroxychloroquine dès les premiers symptomes montre une diminution tant de la charge que du portage de manière significative comparé à un groupe sans traitement ?
Pourquoi les autorités sanitaires n’ont-elles pas mis fin au débat avec cette simple vérification ?
On a préféré éprouver la chloroquine sur malades en detresse respiratoire, alors que son « promoteur » affirmait que c’était inefficace à ce stade.
Personnellement, j’attends simplement cette vérification pour me faire une opinion. Le reste n’est que querelle stérile.
C’était bien évidemment à la charge de Raoult de faire cette comparaison entre groupe témoin et traité en ce qui concerne la charge virale et la durée de portage. Je rappelle par ailleurs que l’Hydroxychloroquine n’est pas dénuée d’effets secondaires, cardiaques mais pas seulement, et que certains patients traités avec cette molécule ont montré de tels effets secondaires . Le rapport bénéfice /risque est le mètre étalon d’un essai clinique …..
Je suis médecin , scientifique ( Docteur en Médecine, Docteur en Biologie Humaine) et j’ai passé près de 45 ans a pratiquer la recherche médicale à l’INSERM, et à enseigner à l’ EPHE (Chaire de Neurobiologie du développement, dont j’ai été titulaire pendant 30 ans). J’ai conduit plusieurs essais cliniques de phase 1, 2, et 3, y compris sur des patients en urgence absolue victimes d’accidents de la route. Ces essais multicentriques ont été conduits suivant les principes scientifiques admis par tous, à savoir randomisation et double aveugle. Fort de cette expérience, j’estime que D. Raoult avait tous les moyens et tous les patients nécessaires pour conduire un essai clinique suivant ces principes, ce qu’il n’a pas fait. Pourquoi? avait -il peur des résultats?
Par ailleurs je note qu’il est l’auteur de plus de 3000 articles « scientifiques » en 30 ans, en moyenne deux par semaine, donc qu’il ne les a pas tous écrits, et donc pas tous lus . Certains articles tronqués lui ont valu d’être interdit de publication dans des revues connues. le premier article paru sur son essai Covid l’a été dans un journal inconnu dont le rédacteur en chef est l’un de ses collaborateurs, par ailleurs co-auteur de cet article.
Tout cela, qui est parfaitement vérifiable, témoigne d’une forme de tricherie qui n’est ni celle d’un bon scientifique, ni celle d’un bon médecin….
Pr Alain PRIVAT
Membre de l’ Académie de Médecine
Bonjour
Enfin un article objectif qui fait intelligemment le point sur cette controverse. En résumé il fait bien le mien entre médecine, science et statistique. Il montre que Raoult est une pointure en médecine, que rien ne prouve que son traitement ne soit pas bon, qu il a fait ce qu il avait à faire en tant que médecin, c est à dire soigner les malades avec le traitement qu il pense être le bon, et même si ses études n ont pas l orthodoxie statistique, cela ne discrédite ni lui ni son traitement.
Je comprends que les anti Raoult congénitaux, apartenant souvent au milieu médical, jaloux ou corrompus, ou ne maîtrisant pas ou mal le lien médecine /science, ne l apprécient guère.
Votre article est intéressant, et les réactions qu’il a suscité également.
Pour ce qui me concerne, ayant vu ce qu’est l’expérimentation en agriculture et en élevage dans le cadre de mon travail, je n’ai jamais pensé beaucoup de bien du Dr Raoult. Pour autant, je crois que c’est un bon médecin, écouté de ses patients parce qu’il est convainquant.
Ce pouvoir de conviction est fondamental.
On le voit avec l’homéopathie, le fait de prendre soin de soi-même d’une part, et d’autre part la conviction qu’on se donne les moyens de guérir, sont à mon sens la raison de la satisfaction des usagers de médications dont on a prouvé par ailleurs l’inefficacité.
Et ce dans un contexte où les français sont très peu observants, c’est-à-dire qu’ils suivent très peu les ordonnances et recommandations de leurs médecins, qui sont bien formés pour le diagnostic, et la prescription mais pas pour convaincre les patients de suivre soigneusement cette prescription.
C’est la force du Dr Raoult d’être très convainquant, et il me semble que c’est ce qui aide vraiment les patients.
Bonjour monsieur Waksman, merci pour votre commentaire. Entièrement d’accord avec vous sur le pouvoir de conviction. Je pense qu’il y a de belles occasions de laisser de côté la polémique sur ce sujet si chacun fait l’effort d’être plus nuancé et de discerner les choses. Raoult est l’épiphénomène d’un sujet bien plus important qui est de savoir si la médecine se réduit à la science. Or ce n’est pas parce qu’elle utilise et se doit d’utiliser la méthode scientifique, qu’elle se réduit à celle-ci. Pour moi, c’est le sujet qu’illustre cette histoire.
Pauvre Feyerabend. Un tout grand épistémologue qui prône un certain relativisme certes, mais dont les thèses mal comprises ont été récupérées par la sociologie post moderne. Feyerabend recommande certainement de ne pas négliger d’autres formes de connaissance. Ainsi, le vaudou est peut-être utile pour découvrir ou comprendre certains aspects de ce que nous appelons réalité; le vaudou reste cependant le vaudou et la science reste la science. Feyerabend est utilisé par les mauvais scientifiques pour justifier tout et n’importe quoi, pourtant il est clair qu’il s’inscrit à la suite de Khun dans l’épistémologie.
Feyerabend n’est pas au cœur de cet edito. Vous feriez mieux de mettre votre commentaire sous le texte qui en parle ce serait plus approprié.
Bonjour,
qui promeut encore l’usage de l’hydroxychloroquine dans le traitement de la Covid-19?
Voici une excellente compilation qui fait le point:
https://www.pseudo-sciences.org/Hydroxychloroquine-les-recommandations-des-agences-sanitaires-et-societes
Cordialement
François Vazeille
Monsieur Vazeille merci pour ce lien. Ceci-dit le principe généralement, quand on laisse un commentaire, c’est de réagir à la thèse qui est défendue dans l’article et non de venir faire de la publicité d’un autre site (trolling). Cordialement. Jean-Paul Oury
Bonjour Monsieur Oury,
Je suis actuellement thésard en physique et j’attache beaucoup d’importance à la méthode scientifique et au peer-review. Comme beaucoup de concitoyens, je pense m’être laissé emporter dans cette tempête médiatique Raoult et m’être rangé du côté des « anti », car, comme vous l’avez souligné, le refus de la RCT par DR lui a attiré le discrédit des défenseurs d’une définition stricte de la méthodologie scientifique communément admise.
Mais j’avoue me précipiter trop souvent dans cette approche actuelle simpliste qui consiste à tout catégoriser selon qu’on est pour ou contre. Et j’obtiens alors deux boîtes où je range d’un côté, pêle-mêle : pro-Trump, pro-Raoult, anti-vax, anti-média, complotistes en tout genre, bref, les partisans de la croyance, etc., et de l’autre, les partisans de la connaissance dont je fais parti.
Et je tombais sur un os lorsque je lisais des articles sur Raoult car même si le personnage m’insupporte par sa prétention, que je n’aime pas tomber dans la piège des discours clivants et que je suis fatigué de voir sa tête dans tous les médias, force est de constater qu’il est un spécialiste très reconnu dans son domaine.
Je suis donc très content d’être tombé sur votre article, que j’ai trouvé parfaitement clair et bien documenté, pour démêler les controverses des polémiques. L’apparente dualité bon médecin/mauvais scientifique est également très bien analysée et beaucoup plus intéressante que le binaire bon/mauvais qui fait actuellement débat.
Je tenais donc à vous remercier pour cet article formidable.
Cordialement.
Un anonyme
Merci pour vos encouragements.