Petit écolo-bêtisier de l’été
Dans le débat médiatique entre techno-prophètes et partisans de l’écologisme, les deux camps en place ne s’épargnent désormais plus rien. Aussi, il sera de plus en plus difficile aux thuriféraires d’une écologie politique de manipuler les opinions sans se faire rattraper par la « patrouille des rationalistes » qui fait preuve désormais d’une vigilance impartiale. Une drôle d’ambiance s’est installée sur le web. La bien-pensance « écologiste » n’est plus épargnée et devient une cible de choix pour les chasseurs de fake news et autres dénicheurs d’hypocrisies, schizophrénie ou toutes formes de discours contradictoires. Si vous étiez en congés voici donc un petit écolo-bêtisier de l’été.
Les moustiques d’Aymeric sont nos amis
C’est sur cette histoire que nous nous étions quittés fin juillet : une vidéo improbable du chroniqueur Aymeric Caron qui appelait le plus sérieusement du monde les internautes à épargner les moustiques (1)…. vidéo qui avait suscité un énorme « bzzzz » et l’hilarité générale des internautes. L’idéologie fait dire beaucoup de choses et tout antispéciste qui s’affiche n’en reste pas moins une cible potentielle pour les différentes maladies virales (chikungunya, dengue, Zika, encéphalite japonaise, fièvre du Nil occidental) et parasitaires (paludisme, filariose lymphatique) transmissibles via une piqure de moustique. Ironie de l’histoire, le lendemain on apprenait que des tiques géantes avaient fait leur apparition en Europe et qu’elles étaient capables de poursuivre leurs proies (2) : Aymeric Carron va-t-il nous conseiller de nous laisser rattraper et potentiellement inoculer la maladie de Lyme ?
Le naufrage médiatique de Greta Thunberg
Si vous ne connaissez pas encore la jeune suédoise, c’est que vous vivez dans une grotte. Grâce au pouvoir incroyable des nouvelles technologies, Greta Thunberg a pu toucher la terre entière et s’imposer en quelques semaines comme la nouvelle icône de l’écologisme. Hélas, celle qui déchaîne les passions s’est fait de nouveau épingler pendant l’été et l’aspect « Artefact de communication »(3) se dévoile chaque jour un peu plus. Alors que son inconséquence avait déjà soulignée lors un repas dans un train, entourée d’emballages industriels (4), et qu’une rumeur de plus en plus forte monte pour dénoncer la manipulation derrière le phénomène médiatique (5), voici qu’on apprend que son voyage en voilier avec 0 émission de carbone, nécessitera pas moins de six vols en avion. En conséquence, l’opération de communication est non seulement mensongère, mais en plus contre-productive à la cause qu’elle affirme servir (en se rendant à New-York en avion accompagnée de son papa, Greta n’aurait utilisé que deux billets d’avion). L’effet est un peu celui d’un spectacle de magie dont on nous dévoilerait les trucs et astuces, ou pour le dire plus prosaïquement : « ce voilier de Greta Thunberg, c’est un peu le traîneau du Père Noël… le jour où on découvre la supercherie, on se dit qu’on s’est sacrément moqué de nous ». Combien de temps le phénomène fera-t-il encore recette, sachant que les critiques de cette entreprise de communication sont chaque jour un peu plus nombreuses : ainsi, Naomi Seibt, une jeune Youtubeuse allemande, se présente dans ses vidéos comme l’anti-Greta et prend le contrepied de la stratégie en diffusant un discours scientifique de haut niveau plutôt que de jouer sur les peurs (6).
Dans les coulisses du bio, c’est pas beau
Autre mauvaise surprise pour les défenseurs de l’écologisme, en plein cœur de la période estivale, où les gens portent une attention particulière à leur alimentation, la très sérieuse revue de consommateurs Que Choisir sort une enquête impitoyable qui démontre que via les sur-marges sur les fruits et légumes bio, « la grande distribution matraque toujours les consommateurs ». Des prix en moyenne « 75 % plus élevées qu’en conventionnel ». Et les chiffres donnent le vertige : « sur les 3 fruits et légumes les plus consommés (la pomme de terre, la tomate et la pomme) les marges brutes sont respectivement 83 %, 109 % et 149 % supérieures au conventionnel. La palme des sur-marges revient au poireau, où la grande distribution marge 2,5 fois plus sur le bio que sur le conventionnel (+ 165 %) » (7).
Le journaliste expert de la thématique Gil Rivière Wekstein, que nous avions interviewé, ne s’est pas privé pour relever l’arnaque
Ce qu’il faut surtout retenir de l’enquête @UFCquechoisir, c’est la différence de prix entre le panier annuel non bio et le panier bio : 278 euros (+73,4%!!!) pour une bénéfice 0 en termes sanitaire et gustatifhttps://t.co/awXgekG1Bz
— GRW (@AEGRW) August 24, 2019
Le « bénéfice 0 » dénoncé pourrait être bien pire, puisque les médias désormais n’hésitent plus à relever les risques sanitaires liés au bio (ce qui n’est pas le privilège de l’industrie agro-alimentaire, bien au contraire) : ainsi, on a appris qu’un lot de farine bio avait été rappelé car il pouvait provoquer des hallucinations (SIC) (8).
Le « gouvernement anti-fake news » pris à son propre jeu
C’est sans doute un des plus gros buzz international de l’été, car même la chaîne publique US NPR news en a parlé. Le 22 août, le président français Emmanuel Macron a twitté une photo vieille de 16 ans pour illustrer la situation actuelle et pour dire que la forêt amazonienne était le poumon de la planète. Or comme l’affirme Alain Pave, professeur émérite à l’université Claude Bernard Lyon 1, ex-directeur du programme Amazonie du CNRS : “J’étais à un sommet de l’ONU sur le climat en 1992, et déjà les scientifiques s’agaçaient de cette expression (…) Alors non, c’est un symbole mais ce n’est pas une image scientifiquement exacte. » (9) Louis Sarkozy a été le premier à relever la fake new, mais ensuite les internautes se sont emparés de l’histoire pour révéler notamment que l’Afrique brûlait aussi et que la situation était bien pire que celle de l’Amazonie (10). Notons au passage que le président Macron – ou tout du moins son conseiller scientifique – est accoutumé de l’imprécision, puisque il avait déjà repris à tort l’information selon laquelle la pollution cause plus de 48 000 décès par an (11), information erronée que l’expert Philippe Stoop avait dénoncé dans nos colonnes dans le texte : Pollution de l’air : 38 000 morts par an dans le monde, dont 48 000 en France…
Mais le président à l’origine de la loi anti fake-news n’est pas isolé au sommet de l’Etat. En effet, ses Ministres ne sont pas en reste pour propager des discours erronés, voire même, pseudo-scientifiques. Ainsi la nouvelle ministre de l’écologie Elizabeth Borne a affirmé à tort que « les OGM ne sont pas autorisés en Europe, ils ne le sont pas aujourd’hui, ils ne le seront pas demain » ce qui est totalement faux, il suffit de consulter le dernier rapport de l’ISAAA (12) . Si cette incompétence est remarquable, elle n’est cependant pas aussi grave que celle qui consiste à propager des pseudo-science. Or, là où la stupeur est à son comble, c’est quand on découvre que le ministère de l’Agriculture fait la promotion de la biodynamie (13), une pratique agricole considérée par tous les rationalistes comme totalement pseudo-scientifique. Or si cette page date de 2016, il n’en reste pas moins que le nouveau ministre Didier Guillaume qui prônait un retour à l’agriculture de nos grands parents (14), au moment où nous publions, ne l’a toujours pas fait supprimer.
Au travers de ce petit bêtisier, on constate que c’est toujours la même mécanique qui est en jeu. Il s’agit de plaquer de l’idéologie sur toute forme d’action et/ou de prise de position. Il n’y a que l’idéologie qui peut vous faire épargner un moustique, prendre le bateau quand il est plus judicieux de prendre l’avion, acheter plus cher un bien qui ne présente aucun bénéfice, propager de fausses informations à des fins politiques… Sur le fond, cette idéologie, c’est celle qui pose que la nature est bonne en soi et que l’homme est mauvais… c’est elle qui finit par nous faire commettre les pires bêtises. Et au final, on constate que ces individus qui font facilement la leçon aux autres, sont des humains comme les autres… des personnages qui auraient régalé Molière : ils tomberont malades s’ils se font piquer, ils ont besoin de la technologie moderne pour faire la promotion de leurs idées, ils ont besoin de faire des bénéfices s’il font du commerce et de manipuler les opinions pour faire de la politique…
Ces phénomènes ne sont d’ailleurs pas nouveaux. On connaissait le greenwashing ou encore les NYMBY (not in my back yard), mais maintenant ce sont les icônes mêmes de l’écologisme qui se font prendre dans leurs contradictions (on pensera encore à ces stars d’Hollywood qui volent en jet privé et voudraient interdire l’aviation au grand public). Le fait est qu’en prêtant ainsi à rire, ces « porte-paroles » finissent par desservir la cause environnementale elle-même… une raison supplémentaire pour se méfier de l’écologie politique et revenir d’urgence à l’écologie scientifique… autrement dit : se méfier des beaux parleurs et toujours plus, faire confiance à la science.
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(1) Nous en avions profité d’ailleurs pour rappeler que cette petite vidéo n’était que le gentil moustique qui cachait le troupeau de buffles, puisque le même jour on apprenait qu’une quarantaine d’ONG s’étaient opposées à l’opération Target Malaria dont l’objectif était d’éviter la propagation du paludisme en Afrique, via une solution biotechnologique.
(3) https://www.linkedin.com/pulse/greta-thunberg-peut-on-ou-pas-parler-dartefact-de-olivier-cimelière-/
(4) https://www.20min.ch/ro/news/monde/story/Greta-Thunberg–la-photo-qui-passe-mal-sur-la-Toile-26166426
(6) https://www.youtube.com/watch?v=GJVl1qLm_IM&feature=share
(11) https://twitter.com/emmanuelmacron/status/1067360738430382080
(12) « In Europe, Spain and Portugal continued to adopt biotech maize to control European corn borer. » http://isaaa.org/resources/publications/briefs/54/
(13) https://agriculture.gouv.fr//secrets-de-fabrication-le-vin-biodynamique-de-terre-et-de-lune
(14) https://www.lopinion.fr/edition/economie/ministre-didier-guillaume-veut-revenir-a-l-agriculture-nos-grands-185437