La chancelière allemande a exclu toute construction du gazoduc Nord Stream II sans qu’un rôle soit assuré à Kiev dans le transit gazier de la Russie vers l’Europe.
Alors que les relations entre l’occident et le Kremlin semble se tendre chaque semaine un peu plus, la chancelière Angela Merkel a fait peser une menace inattendue sur le projet de gazoduc Nord Stream II, qui doit acheminer le gaz russe en passant par la mer Baltique. Cette installation permettait ainsi à Moscou de contourner l’Ukraine, pays avec lequel la Russie est indirectement en guerre depuis qu’elle a décidé de soutenir militairement les séparatistes du Donbass en 2014.
Récemment, Berlin avait pourtant donné son feu vert de principe pour le projet. Mais Angela Merkel a désormais assorti la construction de Nord Stream II à certaines conditions. « Il n’est pas possible que l’Ukraine n’ait aucune importance dans le transit du gaz à cause de Nord Stream 2 », a insisté la chancelière lors d’une conférence de presse avec le président ukrainien Petro Porochenko. Gazprom avait en effet indiqué vouloir se passer du transit via l’Ukraine à l’expiration du contrat en 2019.
Un revirement pour Berlin assurait jusqu’ici qu’il s’agissait d’une infrastructure purement « commerciale ». « Il y a aussi des facteurs politiques à prendre en considération », a finalement admis la chancelière. Et ce d’autant que le volume de gaz en transit par l’Ukraine a sensiblement augmenté ces dernières années, en faisant un point d’équilibre fragile dans son rapport avec Moscou. Selon les statistiques ukrainiennes, 93,5 milliards de m3 de gaz russe a transité via ses réseaux en 2017, soit une hausse de 13,7 % par rapport à 2016.
Réagissant à cette annonce, le géant d’état russe Gazprom a assuré mardi être disposé à maintenir le transit de gaz pour l’Europe par l’Ukraine, sous certaines conditions. « Un certain transit (par l’Ukraine) peut être conservé, d’un volume de 10-15 milliards de mètres cubes par an, mais la partie ukrainienne doit justifier l’intérêt économique d’un nouveau contrat de transit », a déclaré dans un communiqué le patron de Gazprom Alexeï Miller.
« Nous n’avons jamais envisagé un refus total du transit par l’Ukraine, mais les ressources russes se trouvent désormais plus au nord, et il n’y aura plus les mêmes ressources qu’avant pour le corridor gazier central », a assuré M. Miller. Il justifie Nord Stream II par la croissance prévue de la demande européenne dans les années à venir, notamment liée à l sortie du nucléaire de plusieurs états membres.