
Le recours à l’électricité dans le bâti neuf, comme le prévoit la nouvelle réglementation environnementale RE2020 qui doit entrer en vigueur à l’été prochain, permettrait de décarboner un secteur qui représente près de 30 % de nos émissions de CO2.
Et si l’été indien que connaît actuellement la France étaient l’occasion de parler de… chauffage ? En réalité, il sera davantage question d’économie d’énergies et de lutte contre le dérèglement climatique, thèmes bien plus actuels, à l’heure où les villes se verdissent et les citoyens s’engagent massivement pour le climat et la préservation de la biodiversité.
La France est en pleine révision de la réglementation thermique de ses bâtiments, la nouvelle réglementation environnementale (dite RE2020) devant entrer en vigueur dans le courant de l’été 2021, à la place de l’actuelle RT2012. Ses trois objectifs principaux sont de « diminuer l’impact carbone des bâtiments, poursuivre l’amélioration de leur performance énergétique et en garantir la fraîcheur pendant les étés caniculaires » – ce dernier point peut nous intéresser à l’heure actuelle –, comme le mentionne le ministère de la Transition écologique sur son site Internet. Dont l’ancienne locataire, Elisabeth Borne, rappelait en janvier dernier que « les bâtiments représentent près de 30 % de nos émissions de CO2 », le gaz à effet de serre responsable en (grande) partie du réchauffement climatique.
Or, il ne fait plus aucun mystère que pour refroidir les températures globales, les quantités de dioxyde de carbone « injectées » par l’humain dans l’atmosphère, qui empêchent la chaleur de s’évaporer, doivent être drastiquement limitées. Le gouvernement l’a compris, d’où l’ambition de la RE2020 de réduire les émissions de particules carbonées issues des bâtiments neufs, ceci sur l’ensemble de leur cycle de vie.
Favoriser un bâti performant utilisant des équipements et des matériaux émettant peu de gaz à effet de serre
La nouvelle réglementation « devra pour cela favoriser un bâti performant utilisant des équipements et des matériaux émettant peu de gaz à effet de serre, et le recours aux énergies décarbonées comme l’électricité, le bois et les réseaux de chaleur alimentés par des énergies renouvelables, indique le site Construction 21. Pour certaines typologies de bâtiments, tels que les logements collectifs, le recours à des énergies fossiles est actuellement majoritaire. Pourtant, utiliser l’électricité pour le chauffage et l’eau chaude sanitaire permet de s’assurer d’une exploitation faible en émissions de CO2 », poursuit-il.
L’électricité, future énergie du bâti neuf en France ? Sans hésitations, pour Patrick Le Dévéhat et Eric Baudry, respectivement directeur technique et président de la commission thermique du Gifam, un groupement de quelque 50 marques d’appareils pour la maison. « A l’heure des concertations en cours sur la future réglementation thermique des bâtiments neufs (RE2020), il est nécessaire de rappeler l’importance d’encourager les solutions bas-carbone pour répondre à l’urgence climatique », estiment-ils dans une tribune publiée fin juillet dernier.
« Aujourd’hui, l’électricité constitue l’énergie principalement envisagée par les pouvoirs publics pour répondre à cet enjeu. Produite en France à 93 % par des centrales non émettrices de CO2 (nucléaires, hydrauliques), la part de l’électricité issue des énergies renouvelables (éolien, solaire…) ne cesse de croître, rappellent-ils également. En encourageant le recours aux énergies faiblement carbonées dans les bâtiments neufs, et ce dès l’été 2021, la RE2020 a pour objectifs, non seulement de réduire leur impact carbone, mais aussi de garantir aux occupants un logement répondant à l’urgence climatique ».
Faire de l’économie française la plus décarbonée d’Europe
N’oublions pas que parmi les propositions émises fin juin par la Convention citoyenne sur le climat, certaines ont pour but de réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre en France d’ici à 2030. Un objectif, rappellent les auteurs de la tribune, réaffirmé par le Premier ministre, Jean Castex, lors de sa déclaration de politique générale, le 15 juillet dernier, qui souhaite « faire de l’économie française la plus décarbonée d’Europe ».
S’il y a encore du boulot – le Haut conseil pour le climat, dans son rapport annuel remis récemment, a rappelé que l’Hexagone était encore loin des objectifs fixés par la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui permettraient la « neutralité carbone » d’ici 2050 –, la voie semble donc tracée, pour ce qui concerne en tout cas le logement neuf. D’autant plus que de nombreuses solutions à l’électricité existent aujourd’hui, ce qui signifie de moindres coûts en termes d’investissement. Comme, par exemple, le chauffage électrique « intelligent », pilotable à distance, ou les pompes à chaleur, qui réutilisent les calories d’un milieu extérieur (sol, eau, air) pour alimenter en chaleur/froid un milieu ambiant.
« Le défi est ambitieux mais nous sommes sur la bonne voie », veulent croire Patrick Le Dévéhat et Eric Baudry. « Les équipements de chauffage électrique intelligents [sont] un levier puissant, disent-ils encore dans leur tribune, [et devraient contribuer] aux objectifs environnementaux que s’est fixés la France ». Ils serviraient à coup sûr à abandonner le gaz dans le chauffage bâtimentaire, dont une étude de l’Institut français pour la performance du bâtiment (IFPEB) et du cabinet de conseil Carbone 4 rappelle qu’il est « le vecteur le plus émissif » de substances carbonées, et ce quelle que soit la « typologie » du bâtiment.