Après avoir évoqué une politique volontaire de soutien au développement de l’énergie solaire – notamment chez les particuliers – le Parlement européen semble vouloir rétropédaler un texte peu favorable aux petits producteurs d’énergies renouvelables.
En janvier dernier, la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie Parlement européen a adopté trois rapports législatifs appelant à une part plus importante d’énergie renouvelable dans le mix énergétique européen. Ces orientations visaient à rehausser l’objectif contraignant européen à un de minimum 35 % d’énergie renouvelable d’ici à 2030. Miguel Arias Cañete, commissaire européen au climat et à l’énergie avait alors applaudi cette ambition, annonçant que la Commission européenne ferait « tout son possible pour faciliter un accord ambitieux ».
« C’est une excellente nouvelle pour l’énergie solaire, car elle renforce le droit à l’autoconsommation et propose de nouveaux modèles commerciaux innovants tels que la propriété de tiers, les échanges entre pairs et les accords d’achat d’électricité », s’était alors enthousiasmé Aurélie Beauvais, directrice des politiques chez SolarPower Europe – une association de soutien aux politiques de développement durable. Pourtant, l’enthousiasme qu’avait suscité ce « grand pas » vers « une transition énergétique propre menée par les consommateurs » pourrait bien être prématuré.
La question est ici de savoir si les petites installations doivent bénéficier d’un traitement de faveur par rapport aux grands fournisseurs. La Commission répond par l’affirmative : « les consommateurs et les communautés seront amenés à participer activement au marché de l’électricité et à produire leur propre électricité, la consommer ou la vendre sur le marché ». Pour le parlement, toutefois, la réponse est moins claire. Le Parti populaire européen (PPE) de centre droit et l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE) semblent en effet vouloir faire marche arrière.
Selon les nouvelles règles préparées par le Parlement européen, les producteurs de renouvelables à petite échelle, comme les hôpitaux, les agriculteurs et les écoles, dont l’activité principale n’est pas liée à la production d’électricité, ne devraient pas bénéficier d’un régime simplifié. « Fournir des exemptions à certains acteurs du marché implique une discrimination envers les autres, ce qui nuit fondamentalement à la structure du marché, augmente les coûts pour les consommateurs et crée de l’incertitude pour les investisseurs », lit-on dans un paragraphe justificatif du brouillon de rapport.
L’annonce n’a pas fait que des heureux. Sebastian Mang conseiller énergie chez Greenpeace UE a dénoncé une politique qui va « à l’encontre de l’objectif annoncé par l’UE de donner le contrôle au consommateur ». Même son de cloche chez SolarPower Europe. « Aujourd’hui, il n’existe pas d’équité entre un fournisseur étatique disposant d’un très grand parc solaire et un agriculteur ayant installé des panneaux sur son toit », a réagi Aurélie Beauvais. « Les fardeaux administratifs et financiers [prévus par la proposition du rapporteur] seront fortement dissuasifs », a-t-elle déploré.
« Cela risque de tuer un modèle d’entreprise qui sera extrêmement bénéfique pour une transition énergétique efficace et rentable en Europe, l’autonomisation des consommateurs d’énergie, ainsi que le dynamisme social et économique des communautés locales », conclut-elle. Une récente étude a en effet démontré que la généralisation d’installations photovoltaïques sur les toits des particuliers avait le potentiel de créer trois fois plus d’emplois que les centrales solaires au sol.