Les mécanismes de capacité permettent aux états membres d’assurer leur sécurité d’approvisionnement en électricité. En voulant ouvrir ce marché à la concurrence, tout en imposant des normes environnementales, la commission s’est attiré les foudres des pays encore fortement dépendants des énergies fossiles.
Les négociations se poursuivent sur le reste du paquet énergie propre à Bruxelles. Au cœur des tensions on retrouve la problématique des mécanismes de capacités. Il s’agit d’un système visant à couvrir la surconsommation électrique des clients pendant les périodes de pointe (en hiver, le soir à 19h…) et éviter que les moyens de production électrique disponibles ne suffisent plus à satisfaire une consommation trop importante. Aussi, pour couvrir ces besoins, les producteurs d’électricité maintiennent en l’état des centrales (hydrauliques ou thermiques).
Ces dernières ne fonctionnent que quelques dizaines d’heures par an au maximum, si nécessaire. Mais cela n’est pas sans coût. Le principal point de discorde est la rémunération des producteurs d’électricité pour cette « disponibilité » – maintenir le parc existant et aussi de faciliter la construction de nouvelles installations. Le système est en principe organisé individuellement pas les états membres, mais la Commissions craint désormais que cela créé des atteintes à la concurrence.
En dépit de ses inquiétudes, en février dernier, elle a autorisé des appels d’offre sur des mécanismes de capacité en Allemagne, en Belgique, en France, en Grèce, en Italie et en Pologne. La Commission « a estimé que ces mesures contribueront à garantir la sécurité d’approvisionnement tout en préservant la concurrence dans le marché unique », justifiait alors Margrethe Vestager, Commissaire européenne à la Concurrence dans un communiqué.
Mais dans le même temps l’exécutif européen a rappelé ses réticences à ce que les marchés nationaux se développent au détriment d’un marché unique européen. La Commission a ainsi fixé des obligations pour les États membres souhaitant instaurer de tels mécanismes, dont « l’ouverture » de ces derniers à d’autres États membres qui doivent pouvoir y participer. Elle veut également interdire aux centrales rejetant plus de 550 grammes de CO2 par kWh de participer aux mécanismes de capacité.
« Conformément aux lignes directrices européennes, de plus en plus d’États intègrent dans leurs mécanismes de capacité la possibilité de coopération transfrontalière », explique Colas Chabanne, de la direction du système électrique chez RTE. « Cela va dans le sens de la construction de l’Europe de l’électricité : des mécanismes de capacité d’abord nationaux mais avec des coopérations transfrontalières permettant de progressivement européaniser le système. »
Mais cette position ne convainc pas tout le monde, et certains lui opposent que les mécanismes de capacité restent une prérogative des États membres – surtout les pays encore fortement dépendants des énergies fossiles. « Chaque État membre est responsable de son approvisionnement », a défendu Maciej Burny, secrétaire général de l’Association polonaise d’électricité. Varsovie craint en effet que ce nouveau marché n’entraine la fermeture de certaines de ses centrales à charbon qui, sans pouvoir participer aux mécanismes de capacités, ne seraient pas rentables.