Des chercheurs suédois ont mis au point un fluide moléculaire capable de stocker l’énergie solaire pendant 18 ans.
L’énergie solaire (thermique, photovoltaïque et concentrée) résulte de la captation de l’énergie électromagnétique provenant du soleil. Si le recours à cette énergie est très ancien – les Grecs allumaient la flamme olympique grâce à un système de miroirs concentrant les rayons du Soleil – cette source renouvelable est encore marginale dans nos sociétés. Le CNRS estime que seul 0,7% de la consommation mondiale d’énergie finale totale est solaire. En Europe, où le recours aux énergies renouvelables est plus commun, l’énergie solaire représente 6,3 % du total de l’énergie produite.
Les principales raisons expliquant ce développement plutôt restreint sont que la production d’énergie solaire est irrégulière (elle devient nulle la nuit et les jours où le ciel se couvre) et que la conservation de l’énergie produite est très limitée (ce qui rend son stockage pour compenser l’irégularité de l’ensoleillement difficile). Une équipe de chercheur de l’Université de technologie Chalmers, en Suède, pourrait avoir trouvé un moyen de contourner cette double limite grâce en mettant au point d’un liquide capable de stocker l’énergie solaire durablement. Kasper Moth-Poulsen, qui a dirigé ces travaux, a présenté ces résultats dans la revue Energy & Environmental Science.
Les chercheurs suédois ont ainsi mélangé des molécules sous forme liquide (du carbone, de l’hydrogène et de l’azote). L’organisation des atomes se modifie lorsqu’elle reçoit les rayons du soleil (ils sont alors appelés « isomères ») et la chaleur est « piégée » par les fortes liaisons chimiques de l’isomère. Cela permet d’utiliser ce liquide comme un carburant solaire thermique. « Un carburant solaire thermique est comme une batterie rechargeable, mais au lieu de l’électricité, vous emmagasinez de la lumière et restituez de la chaleur à la demande » explique Jeffrey Grossman, ingénieur en matériaux au MIT.
Pour récupérer cette énergie, les scientifiques font passer le fluide dans un catalyseur, pour que la molécule retrouve sa forme d’origine et que l’énergie soit libérée sous forme de chaleur. « Lorsqu’on veut extraire cette énergie et l’utiliser, on obtient une augmentation de chaleur supérieure à ce que nous avions espéré », note l’étude. Le cycle d’extraction de la chaleur ainsi captée peut déjà être répété plus de 125 fois sans que la molécule s’en trouve trop dégradée, note l’étude. « Nous avons réalisé des progrès significatifs ces derniers temps, et aujourd’hui, nous disposons désormais d’un système énergétique sans émission qui fonctionne tout au long de l’année » poursuit-elle.
Un prototype du système énergétique a été placé sur le toit de l’université, et a donné des résultats très encourageants. « L’énergie peut être contenue dans cet isomère pendant 18 ans », affirme Kasper Moth-Poulsen. Mais il reste encore une importante marge pour quelques améliorations : « Nous avons un système qui fonctionne. Il faut maintenant nous assurer que tout est conçu de manière optimale », concède ce dernier. Les chercheurs devraient parvenir à améliorer la puissance calorifique de ce système, de telle sorte qu’il atteigne une température d’au moins 110 degrés Celsius.