La goélette de recherche française, Tara Oceans, a identifié près de 200 000 espèces de virus dans les océans du monde entier, dont près de la moitié dans la région arctique. Des informations essentielles pour analyser l’impact du changement climatique sur les écosystèmes marins.
Une équipe de biologistes marins embarqués à bord du Tara Oceans ont parcouru les mers et océans du globe afin d’en étudier les écosystèmes. Au terme de leur traversée – l’expédition (2009-2013) a étudié un total de 80 sites océaniques allant de la surface à 4000 mètres de profondeur – ils ont découvert qu’il existe des centaines de milliers de virus dans les océans de la Terre. Jusqu’à présent, seuls 16 000 d’entre eux avaient été identifiés par l’homme. De fait, chaque cuillère d’eau de mer en contient des millions.
C’est finalement sur quelques 200 000 virus qu’il faut désormais compter – bien qu’une large partie d’entre eux ne puisse pas être réellement considérée comme des formes de vie à part entière. Il s’agit effectivement d’espèces de sacs de matériels génétiques qui élisent domicile dans les cellules vivantes des faunes et flores marines. Plus largement, ces virus se divisaient en cinq catégories répartis en fonction de leur localisation et leur profondeur. Les courants océaniques ne sont donc en définitive pas responsables d’autant de « brassage » qu’initialement estimé.
Autre surprise, la majorité de ces virus se trouve dans les eaux de l’Arctique, ce qui en fait un « berceau » méconnu de la biodiversité virale. Jusqu’à maintenant, nous pensions en effet que la plupart des populations virales se situaient au niveau des tropiques. Une découverte qui a son importance, cet océan étant le plus sensible aux changements climatiques. L’étude précise en revanche qu’il existe ans doute d’autres « hotspots » dans l’océan. De nombreuses parties des océans Indien et Pacifique, ainsi que des mers, restent de fait encore à échantillonner.
Les détails de l’étude sont publiés dans la revue Cell. Cette dernière a permis de revoir sérieusement à la hausse nos estimations sur le nombre de virus marins, mais également de mieux en connaitre la répartition dans les écosystèmes de l’océan. L’analyse de cette répartition pourrait permettre d’obtenir de plus amples informations sur les différents dynamismes océaniques. La connaissance de ces virus permettra à terme d’établit l’importance de leur présence sur l’ensemble des organismes du plancton marin.
Ces derniers jouent en effet un rôle crucial dans les cycles planétaires. « Au cours des vingt dernières années, nous avons appris que la moitié de l’oxygène que nous respirons provient d’organismes marins […] De plus, les océans absorbent la moitié du dioxyde de carbone de l’atmosphère », souligne Matthew Sullivan, microbiologiste à l’Ohio State University et auteur principal de l’étude. Ce phénomène est souvent appelé la pompe biologique. Les scientifiques envisagent donc la possibilité de modifier les populations virales marines afin d’améliorer la captation du CO2.