Après des années de sur-place, la Commission européenne semble avoir trouvé un terrain d’entente pour adopter « rapidement » une taxe carbone aux frontières.
L’instauration d’un « mécanisme d’ajustement carbone aux frontières » du marché unique européen (aussi appelé « taxe carbone aux frontières ») voulue par la nouvelle résidente de la Commission, Ursula von der Leyen, est la mesure la plus controversée du Green Deal européen. Les ministres du Commerce et de l’Industrie des états membres seraient toutefois en passe de trouver un accord « d’ici peu » d’après Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur
La mesure vise à élargir le marché carbone européen (SEQE-UE) aux importations afin de préserver la compétitivité des acteurs continentaux. Elle doit ainsi permettre de défendre les efforts des entreprises européennes pour réduire leurs émissions dans un contexte de normes environnementales de plus en plus contraignantes. A l’heure actuelle, le SEQE-UE est le plus grand marché du carbone au monde, couvrant l’Espace Économique Européen, soit 31 pays.
Selon une nouvelle étude du Commissariat général au développement durable (CGDD), les émissions importées représentent 57 % de l’empreinte carbone de la France. Celles-ci ont quasiment doublé entre 1995 et 2018. Pour l’UE, responsable d’environ 10% des GES dans le monde, l’ensemble des acteurs économiques mondiaux doivent être incités à réduire leurs émissions. Mais cette mesure incitative peine à prendre forme. De fait, l’UE se penche sur la question depuis 1991, et la préparation du Sommet de la Terre de à Rio l’année suivante.
Phil Hogan, le commissaire au commerce, et Kadri Simson, chargée des questions énergétiques, travaillent aujourd’hui sur une proposition qui serait conforme aux règles de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) – le texte doit être soumis au Parlement européen d’ici la fin de l’année. Mais le ministre espagnol de l’Industrie, Reyes Maroto, juge ce processus trop long et susceptible de permettre des « fuites de carbone » — à savoir la délocalisation de la production dans d’autres pays aux règles environnementales moins strictes.
« La probabilité de la mise en place d’un tel mécanisme n’a jamais été aussi proche », assure toutefois Paul Malliet, chercheur à l’Observatoire français des conjonctures économiques, « et le débat actuel sert déjà d’outil diplomatique pour inciter les partenaires de l’UE à donner un prix au carbone ». Il pourrait dans un premier temps viser l’acier, l’aluminium et le ciment, pour lesquels les données relatives aux émissions sont connues et fiables.