L’actuel blocage sur l’évaluation de la toxicité des pesticides sur les pollinisateurs en Europe empêche toute mesure de protection sérieuse de nos abeilles.
Ce lundi 20 mai 2019 est la Journée mondiale des abeilles. « Le 20 mai coïncide avec l’anniversaire d’Anton Janša, qui, au 18e siècle, fut le pionnier des techniques apicoles modernes dans sa Slovénie natale et rendit hommage à l’abeille pour sa capacité à travailler dur tout en n’ayant besoin que de peu d’attention » note l’ONU sur son site, expliquant pourquoi avoir retenu cette date pour célébrer nos plus importants pollinisateurs.
Cette date est l’occasion de rappeler leur rôle essentiel que les abeilles jouent dans nos écosystèmes et aux cultures. Mais aussi la grande précarité de leur condition du fait des activités humaines, qui les affectent directement (pesticides) ou indirectement (appauvrissement des ressources mellifères notamment). L’ONU relève en effet que « le taux d’extinction des pollinisateurs est aujourd’hui de 100 à 1000 fois plus élevé que la normale ».
En 2013, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a établi les protocoles pour évaluer la toxicité d’un pesticide sur les pollinisateurs (abeilles mellifères ou sauvages, bourdons…). Mais, depuis leur publication, ces lignes directrices – notamment l’interdiction en avril 2018 de trois néonicotinoïdes sur le marché européen – n’ont pas été mises en œuvre. La Scopaff, comité d’experts désignés par le conseil européen, ne parvient pas à s’entendre sur les mesures à prendre pour assurer leur application.
« Depuis six ans, l’adoption des nouveaux ‘tests abeilles’ a été mise plus de 20 fois à l’ordre du jour du Scopaff, qui l’a systématiquement bloquée et qui demande maintenant à la Commission européenne de lui fournir de nouvelles lignes directrices plus conformes aux exigences de l’agrochimie », souligne Julie Pecheur, directrice du plaidoyer chez Pollinis, une ONG de défense des pollinisateurs sauvages. Elle dénonce un « blocage » de toute mesure positive.
La plupart des pesticides présents sur le marché de l’UE aujourd’hui ne passeraient pas ces tests : « S’ils étaient adoptés, 79 % des herbicides, 75 % des fongicides et 92 % des insecticides ne passeraient pas le premier niveau des tests en laboratoire, notamment ceux concernant la toxicité chronique » note l’association. « L’opacité qui entoure ce comité empêche les citoyens de connaître les raisons de ce blocage et les Etats membres qui en sont à l’origine », déplore Mme Pecheur.
Comme dans le dossier des perturbateurs endocriniens, le sujet fait l’objet d’une vive opposition des fabricants de pesticides, en l’occurrence l’European Crop Protection Association (ECPA), qui appelle à une « révision significative » de ces lignes directrices. Des appels qui semblent avoir trouvé un public : la Commission évoque aujourd’hui une révision complète des lignes directrices de l’Efsa, avec un réexamen des taux de mortalité et des valeurs-seuils de toxicité.