La centrale de Drax, en Grande-Bretagne, a mis en place un système de captation de ses émissions dans des chaudières à biomasse – une pratique s’appuyant sur les technologies d’émissions négatives. Ces dernières ne convainquent toutefois pas tout le monde.
« Tous les scénarios qui limitent le réchauffement climatique à 1,5°C, avec un dépassement limité ou inexistant, incluent l’utilisation de ‘Carbon Dioxide Removal’ de l’ordre de 100 à 1000 gigatonnes de CO2 au cours du 21ème siècle » mettait en garde le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) du 8 octobre dernier. Cette analyse préconisait en effet de capter le CO2 issu de l’activité humaine pour le séquestrer dans des formations géologiques pour parvenir à la neutralité carbone d’ici 2050.
Le fait de retirer du CO2 de l’atmosphère est une pratique connue dans le milieu scientifique comme les « émissions négatives ». Pour ce faire, nous disposons déjà d’une grande diversité de technologies à émissions négatives (TEN) aux coûts et à l’efficacité variables. La plus simple est de planter des forêts – le CO2 est alors capté par photosynthèse, puis stocké dans les troncs, les branches et les racines, ainsi que dans les sols. Il est également envisagé d’augmenter la population de phytoplanctons consommateurs de carbone. Le gaz à effet de serre peut aussi être capté directement là où il est produit pour être utilisé dans la gazéification de bière ou la croissance de légumes en serre.
Aussi, la centrale électrique de Drax – la plus puissante du Royaume-Uni avec 4000 MW produits – vient de lancer, jeudi 7 février, un programme expérimental d’émissions négatives basé sur l’utilisation de cuves à biomasse. L’installation capte actuellement 1t CO2/jour. La direction de la centrale a par ailleurs engagé des discussions avec la British Beer and Pub Association pour que les bières britanniques soient gazéifiées avec leur gaz carbonique. Cependant, pour fonctionner, ce système consomme déjà 7 Mt de briquettes de bois, importées de Louisiane – donc avec une emprunte environnementale considérable, tant en termes d’émissions que de coupe.
C’est pour cette raison que les TEN sont loin de faire l’unanimité auprès de la communauté scientifique. Entre les répercussions probables sur les écosystèmes et le coût d’un déploiement à une échelle suffisante pour faire une vraie différence, les amissions négatives ont de nombreux détracteurs. Le Conseil scientifique des académies des sciences européennes (EASAC) soulignait ainsi récemment le « potentiel réaliste limité » de ces méthodes. Selon certains scénarios, il faudrait en effet consacrer entre 5 et 18% de la surface terrestre pour alimenter l’ensemble des centrales thermiques mondiales. Un chiffre qui fait réfléchir sur notre consommation énergétique.