Le groupe de luxe Kering a annoncé mettre définitivement fin à l’utilisation de fourrure animale. Une décision favorable au bien-être animal saluée par les associations. Quid de l’impact environnemental de la fausse fourrure ?
C’est désormais chose faite : à compter des collections de l’automne 2022, le groupe de luxe Kering, présidé par François-Henri Pinault, n’utilisera plus de fourrure animale pour ses magasins et ses défilés. Le tournant vers un groupe entièrement sans fourrure était déjà à l’œuvre dès 2017, Gucci ayant ainsi annoncé renoncer à la fourrure. Balenciaga, Bottega Veneta et Alexander Mc Queen avaient aussi franchi le cap. Parmi les marques du groupe, seules Saint Laurent et Brioni y avaient encore recours. Cette décision, François-Henri Pinault l’a annoncée vendredi 24 septembre aux 20 heures de France 2 : « C’est une décision qu’on a prise en 2017, ça fait partie de notre engagement sur le bien-être animal ».
Les associations réclamaient depuis longtemps l’arrêt de l’utilisation de fourrure animale dans la mode. Le 10 mars 2021, l’organisation PETA (Pour une Éthique dans le Traitement des Animaux) avait manifesté devant le siège de Saint Laurent, situé avenue Montaigne à Paris. Une manifestation qui faisait suite à de nombreuses protestations sur les réseaux sociaux, après qu’une publicité mettant en scène Kate Moss portant un manteau en renard avait déclenché une polémique. PETA avait alors demandé dans une pétition à la marque du groupe Kering de « rejoindre les centaines d’autres créateurs et enseignes – dont Armani, Burberry, Chanel, Gucci, Macy’s, Michael Kors, Prada et Versace – qui refusent désormais de vendre des vêtements ou accessoires en fourrure ».
Les associations de professionnels dubitatives
Mais dans quelle mesure la prise en compte du « bien-être animal » global avance-t-il vraiment ? Si les associations se félicitent de cette nouvelle, certains experts des politiques RSE mettent en avant l’aspect symbolique de ce type d’annonces. L’association La Fourrure française dénonce de son côté une « hypocrisie évidente » de la part « d’un groupe qui possède, en France et dans le reste du monde, des tanneries de peaux exotiques (crocodiles, pythons…) et utilise, à juste titre, toutes les autres matières naturelles animales comme le cuir ou la laine ». Quant à La Fédération de la fourrure, elle s’étonne de la décision du groupe, qui avait pourtant « confirmé encore l’an dernier son souhait de maintenir ses approvisionnements ».
La fin progressive du commerce de peaux animales par les marques de luxe interroge également l’empreinte environnementale effective des « fermes ». D’après Daniel Natusch, biologiste australien, président de l’Epic Biodiversity et membre de l’équipe de surveillance des reptiles au sein de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’empreinte environnementale des fourrures d’originale animale reste faible. Le scientifique rappelle que «nous avons 150 ans de recul sur la gestion de la faune et nous savons que les prélèvements actuels pour l’industrie de la mode sont 100 % renouvelables. Il n’y a aucun risque de disparition d’espèces ou de réduction des populations. L’empreinte environnementale est très limitée».
Empreinte environnementale de la fausse fourrure
A rebours des idées reçues, certaines études, comme celle réalisée par DSS Management Consultants en 2012 comparant les cycles de vie des différents types de fourrure, montrent en effet l’empreinte carbone très importante des fourrures synthétiques, la fausse fourrure se biodégradant lentement, entre 500 et 1000 années. La fausse fourrure peut contribuer par ailleurs à la déforestation et nuire aux animaux. Dérivée du pétrole, la fourrure synthétique requiert des énergies fossiles, et est potentiellement toxique puisque l’acrylique est issue du cyanure vinylique.
Dans la mode et le textile, il existe aujourd’hui de plus en plus de marques dites végétaliennes qui s’efforcent d’obtenir, à juste titre, une mesure fiable de durabilité dans leurs matériaux, quand certains n’hésitent plus à utiliser le label vegan à des fins marketing pour vendre des chaussures bon marché à des prix élevés. Lulu’s, Zappos et Amazon ont également utilisé leurs sections vegan pour vendre des chaussures d’origine douteuse fabriquées par des marques conventionnelles. Il s’agit en réalité du phénomène de mode qu’on appelle la « fast fashion », des vêtements bon marché, vite achetés, vite consommés et vite jetés, fabriqués en Asie, et qui tombent rapidement en lambeaux.