Le changement climatique provoque un affaiblissement de certains arbres des forêts allemandes, qui deviennent plus vulnérables aux parasites.
« Celui qui se promène dans les bois en Allemagne verra à quel point la situation est catastrophique » met en garde la ministre de l’Agriculture, Julia Klöckner. Et si l’avertissement est alarmant, la situation l’est aussi. Peter Pröbstle, garde forestier qui officie près de Nuremberg note ainsi que la quasi-totalité des pins dans son périmètre sont morts. En cause, « l’arrivée des bostryche », un coléoptère. « Le réchauffement climatique modifie tout l’écosystème, toutes les structures changent », note-t-il.
En cause, la hausse des températures, qui produit des effets secondaires également adverses pour la flore, et favorisent la prolifération des parasites, comme le champignon chalarose. Faute d’hydratation suffisante, les conifères ne produisent pas assez de résine pour se protéger contre ces parasites. « La grosse menace en ce moment, ce sont les scolytes qui attaquent les épicéas et les sapins dans tout l’est de la France mais aussi l’Allemagne, la Tchéquie, la Belgique », souligne Antoine d’Amécourt, président de la Fédération française des syndicats de forestiers privés.
« C’est un vrai problème, énormément d’arbres vont se retrouver secs » ajoute-t-il. De fait, depuis l’année dernière en Allemagne, 110 000 hectares de forêts ont disparu, soit la superficie de 150 000 terrains de football. Afin d’enrayer le phénomène, il faut planter des feuillus, car ces arbres sont plus résistants au changement climatique que les conifères – on parle alors de reforestation d’arbres mixtes.
« Environ 500 millions d’euros pourraient être débloqués pendant les quatre prochaines années afin de mettre un terme au dépérissement des forêts allemandes » a annoncé Julia Klöckner dans le cadre d’une réunion avec les représentants de l’industrie forestière, les propriétaires de forêts et les associations de protection de la nature. L’objectif de cette rencontre était de dessiner les contours d’un plan d’aide national d’urgence pour aider à développer des espaces forestiers plus résilients.
« La surface forestière s’accroît de manière continue en Europe », tempère Fanny-Pomme Langue, secrétaire générale de la Confédération européenne des propriétaires forestiers (CEPF). Dans son ensemble le nombre d’hectares de forêts sur le territoire de l’UE a progressé de 9 millions en 25 ans, pour atteindre 183 millions. Mais il est crucial de restaurer « l’équilibre rompu » des forêts, note Brigitte Musch, généticienne au département recherche et développement de l’Office national des forêts (ONF) français.
L’idée est de planter des arbres plus adaptés aux nouvelles températures du continent. Mais la tâche n’est pas évidente : « à la vitesse à laquelle les températures progressent, il faudrait faire migrer le chêne, qui se déplace de 300 m par an vers le Nord, 10 fois plus vite ! », insiste Olivier Picard, directeur en recherche-développement du Centre national de la propriété forestière (CNPF). Faute de quoi la dynamique de reforestation pourrait rapidement s’inverser.
En Allemagne, 14 % des émissions de gaz à effets de serre sont actuellement absolbés par les arbres et les sols forestiers.