La protection européenne des espèces qui fréquentent au moins deux milieux de vie différents, dites « multi-royaumes », n’est pas adaptée d’après une étude conjointe menée par 15 pays.
Une nouvelle étude internationale menée par Sylvaine Giakoumi, chercheur au laboratoire ECOMERS (Université Nice Sophia Antipolis et CNRS) révèle que les espèces qui fréquentent au moins deux habitats de vie différents sont les grands oubliés des politiques de préservation e la biodiversité européenne. Ces espèces, poétiquement qualifiées de « multi-royaumes », constitueraient 30% de celles classées comme menacées. Aussi, pour atteindre son objectif de 2011 d’enrayer la perte de biodiversité à l’horizon 2020, Bruxelles doit adapter sont cadre législatif à ces animaux.
« Nous avons examiné les informations de 1567 projets de conservation de l’UE, financés au cours des 25 dernières années. Notre but était d’évaluer à l’échelle continentale l’adéquation des efforts en faveur de la conservation des espèces multi-royaumes » explique Sylvaine Giakoumi. Et le bilan est peu glorieux : seuls un tiers de ces espèces ont bénéficié d’actions de conservation. « Cela est insuffisant pour atteindre les objectifs d’arrêt du déclin fixés par l’Union européenne d’ici 2020 », met e garde l’étude.
Les espèces « multi-royaumes » sont particulièrement vulnérables à la dégradation de l’environnement : « elles sont exposées à des menaces sur plusieurs milieux, ce qui du coup accroît le degré de menace. Par exemple, les tortues marines peuvent bénéficier d’actions de protection des plages, là où elles pondent, mais elles sont moins bien protégées en mer ». La chercheuse déplore qu’« il existe des agences spécifiques sur les milieux terrestres, pour l’eau douce ou les milieux marins, et souvent il y a peu de communication entre elles », ce qui engendre des angles morts sur les espèces multi-royaumes.
A ce jour, 800 millions d’euros investis dans des projets de sauvegarde de la nature par l’UE ciblent des espèces multi-royaumes et comprennent des actions de conservation dans les domaines marins, d’eau douce et terrestres. Mais ils ne couvrent qu’une partie de ces espèces, laissant les autres dans protection réelle. En outre, l’étude estime que ce montant n’est pas suffisan. Pour pallier ce manque, les chercheurs suggèrent qu’une « approche intégrée » qui permette de aussi réviser les priorités de financement périodiquement « en fonction de critères précis tels que le niveau de menace ou la contribution au service écosystémique ».