Un tronçon de l’autoroute Struma, un projet financé par l’Union européenne, doit traverser les gorges de Kresna, la plus riche réserve naturelle du pays, ce qui fait craindre pour les conditions de vie de la faune locale.
L’autoroute européenne Struma doit relier la ville allemande de Hambourg à la ville grecque de Thessalonique. Ce projet se retrouve toutefois au cœur d’une polémique à cause de son tracer sur la section entre la Bulgarie et la Grève. L’axe router traverse en effet les gorges sauvages de Kresna, une des principales réserves naturelles du pays, qui abrite une grande diversité animale – 3 500 espèces, dont 92 protégées. Or, plusieurs associations de défense de la vie animale regroupées sous la banière « Save Kresna Gorge » soulignent que les 10 000 véhicules qui devraient traverser Kresna quotidiennement risque d’affecter les animaux du parc.
De fait, ces derniers sont très vulnérables à la circulation automobile : la population des espèce voisines a déjà baissé de plus de 60 % depuis 2003, selon une étude du Balkani Wildlife Society. Ce sont les populations de chauves-souris, serpents et de tortues protégées qui seraient les plus exposées. « Beaucoup des animaux que l’on retrouve écrasés sont des espèces protégées », note Dimitur Vassilev, un biologiste qui tient un centre écologique pour enfants à Vlahi, une ville voisine du parc naturel. Leur situation sera largement fragilisée par le doublement de la vitesse de circulation (elle est encore limitée à 60 km/h sur l’actuelle E79).
« De nombreuses espèces, dont les serpents sur lesquels je travaille, migrent d’un côté à l’autre des gorges, car la montagne est une barrière naturelle ; d’un côté, le climat est continental, il fait très froid en hiver et très chaud en été, tandis que de l’autre côté des gorges, c’est un climat méditerranéen », précise Petko Petkov, chercheur en biologie au sein de l’Académie des sciences bulgare. « En Europe il n’existe aucun endroit comparable, aussi petit, seize kilomètres sur cinq, avec une biodiversité si riche et autant d’espèces en voie d’extinction, assure Dimitur Vassilev, c’est un endroit unique. »
Pour ne rien arranger, le projet controversé d’autoroute est largement financé par l’Union européenne (620 millions d’euros sur 755 M€). Aussi, la controverse a poussé le porte-parole de la Commission européenne aux affaires environnementales à réagir : « Nous devrons nous assurer que le projet respecte la législation environnementale. Nous sommes en contact avec les autorités pour clarifier les effets des travaux ». Pour pouvoir modifier le tracer, la Commission doit cependant recevoir une demande du gouvernement bulgare – et celui-ci n’a pour l’heure pas donné suite aux demandes formulées par les ONG de « Save Kresna Gorge ».