France info a relayé la tribune d’un groupe de personnalités demandant que l’écologie devienne une matière principale à enseigner dans les écoles, « pour préserver la vie et s’adapter aux bouleversements écologiques » disent-ils ! « L’écologie n’est pas un parti, n’est pas une opinion, mais une vraie discipline essentielle pour remettre de l’harmonie dans nos systèmes (1) », dit Gilles Bœuf ex-président du Museum qui s’est fait le porte-parole de ce collectif. Certes, mais le fond du problème est de savoir quelle écologie on se propose d’enseigner ? Or il est clair que ce collectif s’inscrit dans la mouvance d’une écologie médiatique, romantique et alarmiste, pas dans celle des scientifiques qui étudient la nature sans parti pris idéologique.
Pastorale et mythe de l’équilibre
La pastorale écologiste que nous content actuellement les grandes ONG et à laquelle ce collectif fait écho, nous parle sous couvert de science, d’une nature bonne et généreuse qui est mise à mal par les humains qui détruisent les équilibres et la belle harmonie de la nature. L’espèce humaine est systématiquement rendue responsable de la dégradation et de l’érosion de la biodiversité et on n’hésite pas à dire que la nature se venge en nous envoyant la Covid-19… le grand retour de la pensée magique ! Cette écologie mystico-romantique, n’est pas de la science, c’est une parodie de science issue de la société urbaine occidentale, qui repose sur des croyances, des idées reçues ainsi des concepts que l’écologie scientifique a largement remis en cause.
Ainsi, la science écologique est née au début du XXème siècle à partir d’une idée fausse, celle d’une nature qui se maintient en équilibre et qui se perpétue identique à elle-même. Le job des scientifiques était alors de rechercher les lois qui assurent le maintien de cet équilibre à l’image des lois de Newton pour la physique. Seulement voilà, le monde vivant n’obéit pas aux lois de la physique. Les sciences de l’évolution sous l’impulsion de Jay Gould ont bien démontré que la nature actuelle est le résultat de nombreux aléas, pour ne pas dire de hasards, qui ont joué un rôle majeur dans la dynamique des faunes et des flores. Ces dernières sont ainsi le reflet d’une histoire particulièrement mouvementée dans chaque région du monde en fonction de son passé climatique et géologique. L’idée d’équilibre de la nature est un donc mythe. Elle n’est pas fondée scientifiquement et pourtant les écologistes y font sans cesse allusion … On en retrouve le principe dans les programmes de restauration écologique qui se donnent pour objectif de retrouver une nature.
Le paradigme fixiste de l’écosystème
Par la suite, l’écologie s’est développée autour du paradigme de l’écosystème. On a pu comparer à une époque le fonctionnement de l’écosystèmes à celui d’un moteur dans lequel toutes les espèces jouent un rôle précis de telle sorte que la disparition de l’une d’elles entraine nécessairement des dysfonctionnements. Et d’insister alors sur la « fragilité » de la nature et la nécessité de préserver toutes les espèces de l’écosystème, cad. l’intégrité des écosystèmes. Une vision fixiste et mécaniste de la nature qui est loin de la réalité.. Les vrais scientifiques considèrent maintenant que les écosystèmes sont des entités évolutives, composées d’espèces qui réagissent en permanence aux changements de l’environnement en se déplaçant ou en s’adaptant. Plutôt que de comparer l’écosystèmes à une machine, ce sont plutôt des « hubs » qui hébergent de manière temporaire des espèces qui y trouvent à un moment précis, les conditions favorables à leur cycle de vie. Autrement dit, les systèmes écologiques se réajustent en permanence, et il n’y a pas de fonctionnement type ni d’état de référence, cet état fictif que l’on évoque souvent en biologie de la conservation comme étant un état historique qu’il nous faudrait retrouver demain ne sera jamais identique au passé.
Dynamique de l’évolution
La science écologique actuelle qui s’appuie sur les sciences de l’évolution, nous parle d’une nature dynamique, dont la trajectoire temporelle a été, à de nombreuses occasions, remise en cause par des événements aléatoires qui rebattent les cartes. Toute l’histoire de la nature en Europe est ainsi marquée au cours des deux derniers millions d’années par de nombreuses alternance de périodes glaciaires et de réchauffement qui ont entrainé, à n’en pas douter, des extinctions « catastrophiques » suivies de périodes de recolonisation.
Ici encore les écologistes vivent sur des concepts périmés. On continue à mettre en place des programmes couteux sur la base de cette fiction, en évitant de dire que les rares programmes de suivis à long terme ont infirmé l’hypothèse que l’on retrouvait une nature originelle.
Ceux qui prétendent parler d’écologie scientifique en promouvant l’idée que protéger la nature c’est protéger notre santé, à l’instar d’Isabelle Autissier sur les ondes de France Inter, nous mentent délibérément. Qui peut croire un seul instant que protéger la nature c’est se mettre à l’abri des maladies des humains, des animaux domestiques et des plantes ? Il n’y a que les occidentaux qui vivent dans un univers urbain en partie aseptisé qui peuvent tenir de tels propos qui sont indécents pour les populations déshéritées qui doivent lutter en permanence contre les nuisances de la nature. Ces populations qui subissent les ravages des criquets migrateurs sans que cela soulève la moindre émotion de la part de ces amoureux de la nature. Quand on utilise des moustiquaires imprégnées d’insecticides, dans les pays impaludés, la préoccupation des ONG conservationnistes est de savoir quel est l’impact des produits utilisés sur l’environnement, pas de savoir combien de vies on sauve ainsi… on a les valeurs que l’on peut !
Mensonge par omission et parti-pris idéologiques
Le mensonge par omission est une pratique courante chez les ONG écologistes. Ainsi, elles accordent une attention particulière à la protection des zones humides qui sont des systèmes particulièrement accueillants pour les oiseaux aquatiques. Elles ne tarissent pas d’éloges pour la qualité de ces milieux et les services qu’ils sont censés nous rendre, pour justifier leur protection. En revanche ils sont totalement muets sur le fait que les zones humides sont les principaux réacteurs de maladies parasitaires en zone tropicale ainsi que de puissants émetteurs de gaz à effet de serre (le méthane). Ce parti-pris idéologique de ne considérer que l’aspect qui leur convient et de pratiquer l’omerta sur ce qui les dérange ne fait pas preuve d’une grande objectivité scientifique.
De manière plus générale, les écologistes refusent de reconnaitre que si la nature nous fournit bien des joies, elle est AUSSI une source inépuisable de nuisances : maladies, et leurs vecteurs, ravageurs des cultures, ainsi que les aléas climatiques (sécheresses, inondations, etc. ). Ce que savent bien les agriculteurs et les ruraux qui sont confrontés à ces problèmes.
La nature ne fait preuve d’aucun sentiment, elle est indifférente à notre sort. Tous ceux qui n’ont pas les yeux de Chimène à son égard savent bien qu’elle est AUSSI une source permanente de nuisances. Demandez aux épidémiologistes ou aux agriculteurs ce qu’ils en pensent. Les livres scolaires au début du siècle dernier faisaient la différence entre les espèces utiles et les espèces nuisibles aux hommes. Le terme nuisible a été diabolisé par les écologistes, comme si, en le supprimant, on faisait disparaitre du même coup les nuisances. Ce qui est lamentable c’est que les écologistes écartent délibérément ces questions pour ne parler que des services que nous procurent la nature, alors que nous dépensons des sommes considérables afin de nous protéger de ses méfaits. Ce grossier mensonge vise à ne pas écorner l’image d’Epinal qu’ils cherchent à imposer et le juteux business de la protection d’une nature fictive.
La démarche scientifique est de considérer les deux aspects de la question, pas d’en escamoter celui qui ne convient pas à la démarche.
Puis l’homme est apparu qui a introduit de nombreuses espèces et modifié les habitats sans entrainer pour autant la disparition de la vie. Nos systèmes écologiques patrimoniaux tels que le bocage ou la Camargue, qui sont le produit d’une co-construction, entre usages de la nature et processus spontanés, sont même des milieux écologiques jugés exceptionnels par les écologistes. Ce n’est donc pas systématiquement le barbare dénoncé par les militants.
Jardin d’Eden et spectre de l’apocalypse
La pastorale écologique n’est pas sans rappeler celle de la religion chrétienne. On ne fait plus explicitement référence à Dieu, mais on fait comme si cette nature généreuse avait toujours existé. On flirte ici avec la pensée créationniste encore très vivace dans de nombreux esprits.. Les sciences de l’évolution et la paléoécologie invalident totalement cet a priori.
On parle de rétablir les équilibres et l’harmonie entre les hommes et la nature, à l’image de celle qui existe dans le fictif jardin d’Eden… Bref on a substitué la « Nature » à Dieu pour tenir un discours comparable à celui du catéchisme chrétien des siècles passés. On agite aussi le spectre de l’apocalypse si la destruction se poursuit, à moins de faire repentance en laissant la nature reprendre ses droits. Et accessoirement, en donnant de l’argent (les indulgences vertes) aux ONG qui, elles, savent comment se comporter pour la protéger.
La science écologique comme beaucoup de sciences fonctionne avec des concepts qui peuvent être remis en cause en fonction de l’avancement des connaissances.
L’écologie est une science qui ambitionne de mieux connaitre les relations que les non humains entretiennent entre eux et avec les humains. Comme les autres sciences elle ne peut laisser place aux émotions et aux idéologies et se repose sur des faits validés et la logique. L’écologie que nous proposent ces zélateurs est un mélange de croyances et de parti pris idéologiques qui sacralise la nature et fait de l’homme un coupable. Ceci n’a rien à voir avec l’écologie scientifique… Ce n’est rien d’autre que le mythe chrétien du péché originel et de l’homme qui détruit l’œuvre du créateur, c’est-à-dire la pensée créationniste qui resurgit sous couvert de protéger la nature. Enseigner cette écologie mystico-médiatique c’est une insulte à la science. C’est une manipulation à grande échelle de l’opinion pour promouvoir cette nouvelle religion de la nature qu’il ne s’agit pas de confondre avec la science écologique.
Comment peut-on imaginer l’avenir si on dit que l’homme est un intrus et que pour protéger la nature il faut en exclure les humains ? Si on ne montre que plaies et bosses en diabolisant l’homme, ce qui est la raison d’être des mouvements écologistes.
(1) francetvinfo.fr/elections/presidentielle/tribune-le-systeme-educatif-est-un-tres-puissant-levier-de-changement-scientifiques-ong-ou-citoyens-appellent-a-l-instauration-de-l-ecologie-comme-matiere-a-l-ecole_5003084.html
Livres de Christian Leveque
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