Tous les chercheurs travaillant sur le climat s’accordent sur le fait qu’une crise climatique majeure est en cours. Dénier ce fait est équivalent à dénier la théorie de l’Évolution. Parce que la science du climat repose sur des faits rigoureusement établis, les chercheurs sont dans leur immense majorité convaincus de l’existence de cette crise.
Pourtant, les chercheurs, quel que soit leur discipline, en Sciences “dures” ou “humaines”, continuent sans apparente retenue à parcourir la planète pour participer plusieurs fois par an à des conférences, des réunions de jurys et commissions de toutes sortes, et des lectures et séminaires internationaux qui se tiennent dans des sites situés souvent à des milliers de kilomètres. Je le sais bien : j’ai fait pareil pendant des années. Mais une conséquence non négligeable de tous ces voyages est que l’empreinte carbone des chercheurs est généralement élevée, trop élevée !
Je ne remets pas en question l’importance des conférences. Elles permettent d’échanger les travaux les plus récents, souvent non publiés. Elles facilitent les échanges et sont des “lubrifiants” essentiels au bon fonctionnement des sciences. Elles m’ont permis de faire progresser ma recherche et aussi m’ont permis de promouvoir l’Institut de Biologie Structurale et Moléculaire de UCL et Birkbeck, l’institution que j’ai fondée et dirigée pendant de nombreuses années. Cependant, quand j’ai finalement pris conscience qu’un vol aller-retour de Londres à New York brûle aux environs de deux tonnes métriques de carbone par personne, j’étais choqué. Si nous, les chercheurs, sont parties prenantes aux solutions de la crise climatique, nous en sommes aussi en partie responsable. Nous nous devons de réduire nos émissions de carbone et, quand nous ne pouvons pas faire autrement que de voyager pour des raisons professionnelles, nous nous devons de minimiser et compenser notre empreinte carbone.
Réduire le nombre de conférences et de réunions est important. Il y a de nombreuses questions que nous devons de nous poser quand une réunion ou une conférence est sur le point d’être organisée : où faut-il la situer géographiquement afin que son empreinte carbone soit minimale ? Ne serait-il pas mieux de faire usage de la conférence vidéo pour un speaker éloigné ? Si l’avis d’experts internationaux est recherché, ne vaudrait-il pas mieux de faire appel à ceux qui peuvent se rendre à la réunion en train, plutôt que par avion ? Ne serait-il pas préférable de combiner des conférences sur des thèmes similaires ? Et bien sûr, il y a le problème du plastique qui devrait être banni de toutes conférences et réunions.
Mais même après que des réponses constructives sont apportées à toutes ses questions, il reste beaucoup de carbone à compenser parce que, quoi qu’on fasse, il y a un coût carbone qui reste non négligeable pour se rendre aux sites de conférences et réunions. Que faire ? j’aimerai suggérer que les participants et organisateurs de conférences et de réunions identifient des mécanismes de compensation des émissions de carbone et mettent en place des moyens simples pour y souscrire.
J’ai moi-même mis en place un mécanisme simple et attrayant qui permet aux chercheurs de compenser leurs émissions de carbone. Il y en a bien d’autres. En un sens, mon approche n’est pas originale parce qu’elle est basée sur la plantation d’arbres. Mais dans un autre sens, elle l’est parce que: 1- elle vise une communauté bien ciblée, celle des chercheurs, 2- elle propose à chaque conférence, à chaque université, à chaque organisme de recherche ou groupe de chercheurs quoi qu’il soit, où qu’il se trouve, de créer pour eux une “grove/woodland” (ou “bois/forêt”) auquel chacun peut contribuer des arbres qui seront plantés par des organismes partenaires réputés, 3- nos partenaires sont locaux et ne plantent que des espèces natives, 4- nous fonctionnons aussi comme groupe de pression et lançons des campagnes pour sensibiliser les chercheurs et les organismes de recherche sur notre impact climatique et trouver des solutions.
Le concept de “bois/forêt” dédié à un groupe, un organisme ou une institution est particulièrement attrayant. Par exemple, nous avons créé un “Scientists Grove (le bois des scientifiques)” auquel les chercheurs en science peuvent contribuer des arbres pour compenser le carbone émis lors d’un voyage professionnel. Contribuer des arbres à ces bois consiste en trois étapes simples : 1- le/la chercheur(e) calcule l’empreinte carbone de son dernier voyage en tonne de CO2 émis; 2- il/elle convertit ce tonnage en arbres (2-4 arbres par tonne); 3- il/elle ajoute ce nombre d’arbres au “Scientists Grove” que nous avons créé avec notre partenaire à raison de £6 par arbre. Notre partenaire, Trees For Life, est un organisme sérieux qui a pour but de reconstituer la forêt calédonienne en Écosse. Nous avons aussi créé un “bois des académiques (Academics Grove)” pour les universitaires qui ne sont pas scientifiques mais qui désirent compenser le carbone émis lors d’un voyage à but professionnel. Nous avons même créé un “bois” pour nos amis (“The Friends Grove”). Récemment, nous avons créé notre premier “bois” pour une conference, The BPE 2020 Grove, où les organisateurs ont décidé de contribuer un arbre par thésard participant à la conférence BPE 2020, et d’offrir ce moyen de contribuer des arbres pour fixer le carbone émis par les conférencier se rendant à la conférence. Nous nous apprêtons à créer “un bois des chercheurs français” avec un partenaire français, ForestAction, auquel les chercheurs français pourront contribuer des arbres pour compenser leurs émissions de carbone. Nous espérons créer des “groves/bois” pour les universités (une université s’est déjà engagée avec une annonce prévue le 19 Mars), et bien sûr, pour beaucoup d’autres conférences. Une part importante de nos activités est aussi d’encourager les chercheurs d’agir comme groupe de pression pour obtenir par exemple le remboursement des coûts de la compensation carbone. Sur ce sujet, nous sommes très encouragés par l’annonce récente du Wellcome qui maintenant autorise le remboursement de ces coûts. Nous continuons notre campagne pour que le CNRS en France fasse de même.
Je suis un biologiste et donc, pour moi, la notion d’une reforestation native est importante. Ce type de reforestation encourage la biodiversité et rétablit les équilibres écologiques. Il serait en effet dangereux d’encourager des plantations monocultures qui ont un effet préjudiciable à ces équilibres. Mais quand il s’agit de reforestation, là comme partout ailleurs, les passions peuvent nous entrainer loin de nos buts. L’économie forestière est importante dans de nombreux pays. Elle joue un rôle fondamental pour les habitants qui en vivent et aussi pour le future zéro-carbone de notre planète. Mais ce ne doit pas être au détriment de la préservation des espaces naturels. Comme pour tout, un compromis doit être trouvé et l’appel récent par la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique de sauvegarder un tiers de nos espaces pour la préservation des espaces naturels et primitifs me paraît aller dans ce sens.
La crise climatique pose une menace existentielle que les chercheurs savent réelle et urgente. Elle sera certes résolue par l’action des gouvernements. Mais elle nous obligera aussi à prendre nos responsabilités. Certaines de nos habitudes devront changer qu’elles soient professionnelles ou personnelles. Du point de vue professionnel, les temps d’une certaine insouciance concernant nos émissions carbone seront bientôt révolus. Les chercheurs trouveront d’autres moyens de communiquer, d’autres moyens de partager leur resultats, d’autres moyens d’échanger leurs idées. Et si un voyage est nécessaire, la compensation carbone deviendra un réflexe incontournable.
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> Notre partenaire, Trees For Life, est un organisme sérieux qui a pour but de reconstituer la forêt calédonienne en Écosse.
Vous pourriez aussi proposer de financer la Scottish Crofting Federation, qui aide les agriculteurs à s’installer en Ecosse. Le contexte local est difficile car les terres sont possédées par de grands propriétaires terriens richissimes.
Vous conviendrez que des agriculteurs locaux seront bénéfiques à beaucoup : moins de chômage, moins d’importation de nourriture, préservation de l’héritage culturel régional, produits du terroir de grande qualité, entretien des paysages.
> un compromis doit être trouvé et l’appel récent par la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique de sauvegarder un tiers de nos espaces pour la préservation des espaces naturels et primitifs me paraît aller dans ce sens.
Un tiers des terres… naturel et primitif… voila qui est énorme!
Si on veut vraiment aller dans cette direction là,
Si on croit vraiment que ca va faire baisser la température,
Si on croit vraiment que la biodiversité écossaise sera optimale en baissant la température,
Et bien il faudrait des gardes fous démocratiques.
– les populations locales seront consultées par referendum;
– l’introduction de prédateurs, loups, ours, sera débattu.
– les terrains seront nationalisés;
– les gens expropriés seront indemnisés.
– les populations auront accès libres à toutes les zones exclusives;
– la biodiversité sera évaluée scientifiquement;
– la biodiversité sera évaluée sans interférence avec les enjeux climatiques;
– native n’est pas obligatoire. préserver les espèces menacées exogènes en les introduisant ailleurs est important pour la conservation.
– les collectes de fonds des investisseurs privés seront publiées;
– les ong déclareront leurs conflits d’intérêt, leurs sources de financement, leurs casiers judiciaires;
– les ong ne recevront pas de subventions publiques;
– les ong ne feront pas de procès contre l’etat;
– les investissements en provenance de l’étranger seront plafonnés.