Après l’avènement de la mécanisation, de la chimie et des biotechnologies, l’agriculture vit une nouvelle révolution avec l’agriculture numérique – ou agriculture 4.0. Pourtant, il n’existe pas une mais des agricultures numériques. Ces dernières partagent l’utilisation des nouvelles technologies, mais diffèrent dans leurs fins et moyens. Ces technologies peuvent notamment accompagner les agriculteurs, conseillers et chercheurs dans l’élaboration d’agroécosystèmes plus résilients, avec des exploitations agricoles gagnant en autonomie (moins dépendantes d’intrants extérieurs) et plus économes (par la réduction des coûts de revient).
Une pluralité d’agricultures numériques
L’agriculture 4.0 regroupe une pluralité de déclinaisons au service de besoins pluriels.
La smart agriculture – ou agriculture intelligente – utilise notamment la technologie Internet of thinks (IOT) ou internet des objets connectés. Différents capteurs placés sur des matériels ou au champ alimentent une plateforme (cloud) permettant la création d’un système d’information à destination des utilisateurs (professionnels de l’agrofourniture, agriculteurs, conseillers, chercheurs etc.) [1]. A titre d’exemple, on peut citer les capteurs embarqués sur des machines utilisant l’intelligence artificielle pour détecter des adventices qui feront l’objet d’une destruction localisée.
Basée sur la même technologie, la climate smart agriculture – ou agriculture climato-intelligente – est au service d’une agriculture plus durable, en tenant compte des enjeux du changement climatique Campbell, B.-M, et al. identifient trois objectifs principaux qui sont : « augmenter la productivité agricole pour soutenir l’augmentation des revenus, la sécurité alimentaire et le développement, augmenter la capacité d’adaptation à plusieurs niveaux (de la ferme à la nation) et réduire les émissions de gaz à effet de serre et augmenter les puits de carbone » [2].
Les systèmes d’information géographique (SIG) sont une autre forme d’agriculture 4.0, avec un recours important à la technologie GPS. Cette dernière permet de cartographier les parcelles afin de gagner en précision lors des opérations techniques [3]. Par exemple, la cartographie des besoins azotés d’une parcelle permet de moduler les apports, non plus à l’échelle de la parcelle mais à celle de différentes zones identifiées par satellite.
On distingue également le cofarming – ou entraide agricole. Ce terme fut développé par des entreprises permettant, grâce à des plateformes numériques, de mettre en relation des agriculteurs pour des relations commerciales sans intermédiaires (telles que la location de matériel, la vente de fourrages etc.) ou encore pour partager des savoirs et expériences [4].
Par ces quelques exemples, l’agriculture 4.0 semble donc répondre à des besoins de productivité, de durabilité, d’efficience ou encore à des enjeux socio-économiques.
Améliorer le résilience des exploitations agricoles
L’agriculture 4.0 permet de diminuer les quantités d’intrants (engrais et produits phytosanitaires), ainsi qu’à optimiser les déplacements pour réduire les charges de mécanisation grâce à davantage de précision. Ces technologies contribuent à réduire les coûts de revient des exploitations agricoles, en rendant celles-ci plus économes dans un contexte où le revenu agricole est fluctuant, plus faible que celui de la population moyenne et dépendant des subventions [5].
L’agriculteur gagne également en autonomie décisionnelle, grâce à des outils qui permettent d’effectuer des relevés au champ et de consulter une partie des données sur des plateformes dédiées. Comme toute nouvelle technologie, l’agriculture 4.0 suscite de nombreuses questions chez les utilisateurs, désireux d’échanger sur leurs doutes, leurs expériences ainsi que leurs propositions de perspectives. Cela nourrit l’échange et le partage de savoirs entre les agriculteurs, qui peuvent se retrouver dans des groupes animés par différents réseaux : Chambres d’agriculture, centres de gestion, associations, syndicats etc.
Ainsi, les nouvelles technologies n’ont pas vocation à se substituer au conseil agricole, mais à lui fournir de nouveaux outils. Si la plupart des données sont exploitées à l’échelle de la parcelle ou de l’animal, le rôle de l’agronome reste nécessaire pour exploiter les résultats dans des analyses systémiques (systèmes agraires, ou systèmes d’élevage et de culture), intégrées dans le territoire entourant l’exploitation agricole.
Il n’existe pas une mais des agricultures numériques, au fonctionnement et aux objectifs différents. L’agriculture 4.0 apparaît comme un outil affinant l’analyse et la précision des diagnostics co-formulés entre agriculteurs, conseillers, organismes techniques et de recherche ; avec des solutions pouvant servir une agriculture plus durable et résiliente. Toutefois, de nombreux enjeux se profilent, avec à court terme l’échange d’information entre les différentes plateformes (interopérabilité) ou encore la propriété des données collectées.
[1] Tonk Ke, F., 2013. Smart Agriculture Based on Cloud Computing and IOT. Journal of Convergence Information Technology (JCIT). 8. 2. En ligne : lien.
[2] Campbell, B. M., Thornton, P., Zougmoré, R., Van Asten, P., & Lipper, L. 2014. Sustainable intensification: What is its role in climate smart agriculture? Current Opinion in Environmental Sustainability, 8, 39-43. En ligne : lien.
[3] Dekhinat, S. Sahli, M. 2009. Les SIG comme outils d’aide à la décision dans le domaine agricole. In SIG 2009. Conférence Francophone ESRI. 30 septembre et 1er octobre 2009. Versailles. En ligne : lien.
[4] Farmleap. Non daté. Le Cofarming comme économie collaborative pour faire avancer l’agriculture. Farmleap. En ligne : lien.
[5] Commission des comptes de la nation. 2017. Les résultats économiques des exploitations agricoles en 2016. Service de la statistique et de la prospective. Ministère de l’agriculture et de l’alimentation. En ligne : lien.
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ces outils permettent d’accroitre la productivité et de réduire la pénibilité des travaux agricoles et de mieux respecter l’environnement avec des pratiques agricoles beaucoup plus précises, notamment en optimisant l’utilisation des intrants chimiques, mais avec de nouveaux risques ! : https://www.officiel-prevention.com/dossier/formation/fiches-metier/agriculture-4-0-et-risques-professionnels