La semaine dernière, aux Pays-Bas, le BoerBurgerBeweging (BBB), un « parti d’agriculteurs » néerlandais, a remporté les élections provinciales. Cette victoire peut être considérée comme la suite de la controverse sur l’azote. Pieter Cleppe, rédacteur en chef de BrusselsReport.eu répond à nos questions.
The EuropeanScientist : Aux Pays-Bas, les agriculteurs et le gouvernement de Mark Rutte s’affrontent depuis quelques mois au sujet de la réglementation sur l’azote. Que se passe-t-il ?
Pieter Cleppe : Le « parti paysan » néerlandais BoerBurgerBeweging (BBB) a réussi à devenir le premier parti dans les 12 provinces des Pays-Bas, lors des élections provinciales. Celles-ci déterminent la composition du Sénat néerlandais, qui se fera à la fin du mois de mai. Le gouvernement de Mark Rutte n’y dispose déjà plus de la majorité, mais il sera beaucoup plus difficile pour sa coalition de trouver un soutien au sein de la Chambre haute. Les gens votent pour ce parti en raison des restrictions très strictes en matière d’émissions d’azote, qui pèseront lourdement sur les agriculteurs. Le gouvernement néerlandais souhaite dépenser 25 milliards d’euros d’argent public pour indemniser les agriculteurs.
T.E.S. : Dans un récent billet pour Brusselsreport, vous avez déclaré que » la victoire du parti des agriculteurs néerlandais est un signal d’alarme pour l’UE » (1). Pouvez-vous nous en dire plus ?
P.C. : Les restrictions sur l’azote sont le résultat des règles de l’UE qui exigent que les Etats membres désignent certaines zones comme « nature vulnérable ». L’UE est très inflexible et ne permet pas aux Pays-Bas de réduire la taille de cette zone, ce qui rendrait le fardeau plus réaliste dans un pays avec un système portuaire important, beaucoup d’industrie et beaucoup d’exportations agricoles.
T.E.S. : Diriez-vous que le plan F2F est trop axé sur la réglementation pour organiser la décroissance et qu’il devrait s’appuyer davantage sur des solutions scientifiques et technologiques ?
P.C. : Il est très difficile de mesurer les émissions d’azote et d’affirmer qu’une ferme donnée est au-dessus d’un certain seuil. De nombreuses mesures ont été critiquées comme étant non scientifiques et imprécises. La technologie pourrait aider à mesurer, mais apparemment ce n’est tout simplement pas facile. Il n’est pas non plus évident de définir ce qui constitue une nature « vulnérable ». Certains types de nature prospèrent grâce à l’azote, d’autres disparaissent. Tout cela est très subjectif.
T.E.S. : Le 22 juillet dernier, Ralph Schoellhammer, de l’Université Webster de Vienne, commentait dans Newsweek (2) : « Après tout, les Pays-Bas ne représentent que 0,46% des émissions mondiales de CO2, et même si une réduction supplémentaire est souhaitable, elle ne sera pas décisive dans la lutte contre le changement climatique au cours des huit prochaines années. «
P.C. : Le changement climatique est en partie séparé de cette question. Il s’agit des émissions d’azote, mais une autre raison pour laquelle tant de Néerlandais, même dans les zones urbaines, ont voté pour le parti des agriculteurs, c’est qu’il est également hostile à la technocratie. Au nom de la lutte contre le changement climatique, de nombreuses nouvelles réglementations, souvent imposées par l’UE, font grimper le prix des logements et des transports. Elles ont souvent été adoptées au niveau européen, loin du contrôle des médias et des parlements nationaux, par des ministres heureux d’approuver ces dispositions ou incapables de contrer les fortes pressions exercées par les fonctionnaires de la Commission européenne, aidés par des ONG souvent soutenues par cette même Commission.
(1) https://www.brusselsreport.eu/2023/03/17/the-victory-of-the-dutch-farmers-party-is-a-warning-signal-to-the-eu/
(2) https://www.newsweek.com/popular-uprising-against-elites-has-gone-global-opinion-1722653
By kees torn – https://www.flickr.com/photos/68359921@N08/48826532952/in/photolist-2hoCKa3-2hoA2rJ-2hoBXab-2hoA2qM-2hoBX7A-2hoA2oN-2honxtx-2ho4T3p, CC BY-SA 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=82797749
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