Il est clair que les pesticides constituent un sujet majeur de nos sociétés et l’objet de débats et controverses incessants. Alors qu’il existe de très nombreux documents (publications scientifiques, monographies, réglementations,…) représentant des centaines de milliers de pages concernant les pesticides, tout un chacun semble avoir une opinion tranchée sur les pesticides.
Actuellement, ils constituent le fer de lance de toute la mouvance « agri-bashing » de divers mouvements mais aussi de l’écologisme en les rendant responsables de toutes les maladies (dont évidemment les cancers). De manière régulière, ils jettent en pâture cette problématique dans l’espace médiatique.
On peut citer, par exemples, la critique du plan Écophyto en septembre dernier ou ces jours-ci encore, d’une nouvelle campagne de promotion de peurs des pesticides par « Générations futures » et qui a fait l’objet d’un communiqué du CA de l’AFIS dénonçant le caractère infondé des arguments utilisés.
En fait, il est de plus en plus évident que nombre de personnes, et malheureusement aussi des biologistes, n’ont pas réalisé la place essentielle que tiennent les pesticides dans et pour la Vie.
Le texte ci-dessous est une synthèse de toutes les connaissances acquises par Philippe Joudrier durant sa formation initiale en biologie mais aussi et surtout toutes celles accumulées durant 37 années de recherches en « amélioration des plantes », biochimie, biologie moléculaire, puis 17 années d’expertise en sécurité sanitaire (CSHPF, AFSSA, CSB, EFSA)
Un mot fourre-tout source de confusions, d’a priori et de polémiques
Commençons par rappeler la signification de « pesticide ».
Ce mot est composé :
- de « pest » (pest, mot d’origine anglaise signifiant, en français, peste, maladie due à une bactérie Yersinia pestis impliquée dans toutes les pestes qui ont jalonné l’histoire et responsable, en cumulé, de centaines de millions de morts). Il faut donc le comprendre comme l’ensemble des ravageurs/prédateurs des cultures utiles à l’homme mais aussi maintenant, par extension, l’ensemble des molécules (soit naturelles soit synthétiques) capables de tuer ces mêmes ravageurs.
- du suffixe -« cide » qui signifie « qui tue ».
Ce sont donc des substances qui tuent les pestes.
Il existe de très nombreux ravageurs des cultures allant des « microbes » (les virus, bactéries, les moisissures) aux organismes supérieurs (vers, insectes notamment mais aussi, moins fréquemment des petits mammifères, oiseaux).
C’est pourquoi, les pesticides sont classés en fonction de leur spécificité d’action vis à vis de telle ou telle classe d’organismes : virucides, bactéricides, fongicides, nématicides, insecticides, …
Au sein de chaque catégorie, on peut trouver, des substances tuant, par exemple, tous les insectes et d’autres étant spécifiques de certaines espèces d’insectes. D’autres, sont généralistes et capables de tuer plusieurs espèces simultanément et certains tuant toute forme de vie (exemples : eau de javel, alcool, acides et bases fortes, …).
Une classe à-part : les herbicides. Ils sont souvent « classés » parmi les pesticides mais, en fait, ils sont utilisés pour éliminer ce que l’on qualifie les mauvaises herbes ou adventices car de par leur présence dans une culture donnée, elles rentrent en compétition avec la culture, diminuant évidemment les possibilités d’avoir un rendement satisfaisant. Mais les adventices, en elles mêmes, ne peuvent être qualifiées de pestes !
Pour les herbicides, il en existe des totaux (l’exemple emblématique étant le glyphosate) et d’autres spécifiques de certaines catégories de végétaux (mousses et algues, par exemples).
D’une manière générale, tous ces produits sont qualifiés par l’expression générale de Produits Phytosanitaires (PPS) et ceci par analogie avec les produits pharmaceutiques (médicaments). De fait, tous les médicaments utilisés pour combattre les infections (virus, bactéries, champignons, …) sont des pesticides.
Peut-être est-il utile de faire remarquer au passage que antibiotique signifie anti-vie, les antibiotiques sont évidemment des pesticides et plus spécifiquement des bactéricides ! Notons que le système immunitaire est, lui-même, un système de défense particulièrement performant chez l’homme car capable de reconnaître toutes molécules étrangères (reconnaissance du non-soi) qui s’introduirait dans l’organisme ! Quel que soit le mode d’agriculture : conventionnelle ou AB, l’Homme utilise des PPS (pour les plantes qu’il cultive) aussi bien que des produits vétérinaires pour les animaux qu’il élève.
Mais, outre les médicaments/pesticides, il en utilise aussi à titre préventif afin d’être dans un milieu le plus sain possible :
En effet, tous les produits ménagers (désinfectants, nettoyants, détachants, savons, détergents, lessives, etc) sont tous des pesticides. Certains fabricants affichent même sur l’étiquette que leurs produits sont efficaces capables de tuer à 99,99% des bactéries et des virus (y compris le coronavirus 19), une grande variété de « produits ménagers » réputés naturels (et qui donc par cette seule qualification deviennent automatiquement non dangereux) tels : le vinaigre, la soude, le bicarbonate, le gel hydroalcoolique, généralement considérés comme « neutres », « doux », naturels sont pesticides …. Liste à laquelle il ne faut pas oublier tous les « ingrédients » mis dans tous les produits d’hygiène (savons, gels douches, dentifrices, crèmes, gels, hydratants, …) et des cosmétiques notamment les conservateurs, qui sont, eux aussi, des pesticides.
Le combat contre les nitrites, exemple d’incompréhension
Face aux revendications de certains qui ne veulent pas de conservateurs dans ce qu’ils achètent et même encouragent tout un chacun à faire soi-même ses propres produits, ils se trompent de combat. Car, c’est lorsqu’un produit ne contient pas de conservateurs qu’il faut commencer à être prudent !
Par exemple, une grande campagne a été faite pour la suppression des nitrites dans le jambon. Mais on a rarement entendu dans les médias le « pourquoi » de l’utilisation de nitrites notamment dans le jambon. Le jambon, comme toute viande, et celle de porc en particulier est très sensible à des infections par la bactérie Clostridium botulinum. Or cette bactérie produit une toxine : la botuline, la plus puissante connue (1 ng/kg de poids corporel suffit à tuer un individu rapidement). Un accident mortel est arrivé encore récemment (décembre 2023) avec un produit alimentaire vendu dans un restaurant servant des produits issus de l’agriculture biodynamique (qui au passage est un mode de culture s’appuyant sur un ésotérisme délirant aux antipodes de la science).
Ainsi, il vaut mieux consommer des traces de nitrites qui empêcheront le développement de cette bactérie plutôt que de la laisser se développer ! Le bénéfice/risque devrait être évident pour tous.
Or, il n’est pas prouvé à ce jour que les produits qui se substituent maintenant aux nitrites soient aussi efficaces et/ou seraient moins dangereux pour la santé que l’utilisation des nitrites (qui, pour devenir dangereux, doivent d’abord être dégradés en nitrosamines).
De Paracelse à Bruce Ames, trois principes fondamentaux
Historiquement, c’est Paracelse (1493-1541), médecin, philosophe et alchimiste mais aussi théologien (auteur de nombreux ouvrages) qui s’est fait notamment connaître par une phrase qui est sans doute à l’origine de la toxicologie :
« Tout est poison, rien n’est poison, c’est la dose qui fait le poison ».
En 1990, Bruce Ames a publié trois articles l’un à la suite de l’autre (dans les PNAS, USA), qui auraient pu (dû) modifier la perception du vivant à la fois de la communauté scientifique mais aussi de la société.
En fait, il est surtout connu comme l’inventeur d’un test de mutagenèse qui sert maintenant de référence mondiale permettant de savoir si une substance, quelle qu’elle soit, présente un caractère mutagène ou pas. Si le caractère mutagène est avéré, il est fort probable que la substance soit potentiellement cancérigène à plus ou moins long terme (Par accumulation de mutations suite à une exposition répétée à cette substance). Deux de ses 3 articles sont fondamentaux :
Le premier a pour titre : « Diet pesticides, 99,99% all natural ». Il est très concis, précis et explicite.
Autrement dit : 99.99% des pesticides que nous mangeons sont naturellement contenus dans les organismes que nous ingérons.
Il cite en exemple qu’une seule tasse de café contient autant de pesticides naturels que la quantité de pesticides qui peuvent rester (traces) sur les produits que nous mangeons au cours d’une année. On peut donc aisément paraphraser la célèbre formule de Paracelse par :
Tout est pesticide, rien n’est pesticide, c’est la dose qui fait le pesticide.
Le second de ces trois articles s’intéresse à la distinction faite par l’écologisme (ainsi que tous les mouvements se réclamant d’un ordre naturel et/ou d’une Nature déifiée) entre une substance naturelle (sous-entendu produite par un organisme vivant) et une substance obtenue par synthèse par les chimistes. « Nature’s chemicals and synthetic chemical : Comparative toxicology ».
Ainsi Bruce Ames ne trouve pas de différence entre un pesticide « naturel » et un autre « chimique ». Ce n’est évidemment pas étonnant puisqu’il n’existe qu’une seule chimie !
Or pour les tenants de la Nature, une substance naturelle ne saurait être dangereuse (puisqu’issue de la Nature – qui ne nous veut que du bien – comme chacun sait !) alors que toute substance synthétique le devient du fait de son artificialité !
Dans la réalité, les substances directement dangereuses produites par les plantes/organismes divers/animaux/microorganismes (bactéries, champignons) sont considérables. Plusieurs livres existent sur les substances dangereuses (poisons « naturels ») contenues naturellement dans divers aliments. (Nous ne les développerons pas ici !) (Cf. Références).
Dans tous les cas, le nombre de substances produites par la nature est très largement supérieur à celui que l’homme a pu créer depuis les débuts de l’alchimie puis de la chimie issues de différentes matières premières ! Le pharmacien faisant souvent par synthèse des molécules identiques à celles trouvées dans la « Nature ».
Bactéries et moisissures : deux exemples de substances toxiques naturelles
On vient de mentionner la toxine botulique, mais il existe bien d’autres toxines chez les bactéries.
Prenons, le cas des OGM Bt mentionné précédemment. Le gène introduit provient d’une bactérie largement répandue dans tous les sols et initialement trouvée dans la province de Thuringe (en Allemagne). D’ou son nom latin de Bacillus thuringiensis (Bt). Vers les années 2000, un recensement a été effectué des toxines Cry (pour Crystal) trouvées chez diverses souches de Bacillus. Ainsi plus de 200 gènes ont été trouvés codant pour la famille des toxines Cry. Le maïs Bt MON 810, seul OGM autorisé à la culture en Europe produit la toxine Cry1ab. Notons, au passage, qu’en AB des pulvérisations de bactéries Bt sont autorisées. Ces préparations sont constituées de plusieurs souches de bactéries qui produisent plus de 8 toxines Cry différentes.
A cette famille Cry, il faut aussi rajouter l’existence d’une autre famille de toxine : la famille Cyt (une trentaine de toxine Cyt -appelées cyt pour cytoplasme- sont répertoriées). Avec le refus sociétal des OGM générés par des associations faisant de l’écologisme politique, cette catégorie de toxines n’a pas encore été étudiée en vue d’applications potentielles vis à vis d’autres prédateurs. A la vue de ce seul exemple, ce bacille est « armé » pour se défendre contre certains insectes et pouvoir survivre lorsqu’il est absorbé pouvant ainsi survivre et traverser le système digestif des insectes sans être détruit.
Un autre exemple concerne E. coli. En 2011, une contamination alimentaire majeure est survenue ayant touché l’Allemagne. Elle a, en effet, provoqué une cinquantaine de décès ainsi qu’un millier de personnes atteintes d’insuffisances rénales à vie, tout cela pour avoir consommé des pousses de fenugrec germées (issues d’une ferme AB) contaminées par la bactérie E. coli O157:H7 provoquant des dommages irréversibles sur les reins notamment. (Les toxines produites par E. coli sont classées parmi les shigatoxines).
(Escherichia coli O157:H7 est un sérotype d’Escherichia coli particulier responsable de plusieurs pathologies, dont la colite hémorragique, le syndrome hémolytique urémique et le purpura thrombotique thrombocytopénique ).
Chaque année, des rappels de produits alimentaires sont effectués car contaminés par des bactéries (Salmonelles, Listeria, Campylobacter, coliformes, …).
Autre exemple, parlons maintenant des moisissures, ou champignons. De très nombreux champignons sont des ravageurs provoquant des dégâts considérables sur les plantes cultivées. De plus, « cerise sur le gâteau », ces champignons produisent des toxines, d’où leur nom de mycotoxines. Il en existe de nombreuses comme par exemple l’aflatoxine B1 (présente chez de nombreuses céréales et les cacahuètes après récolte et lors du stockage). C’est une substance connue pour être la plus cancérigène de toutes les mycotoxines. Il en existe d’autres : D.O.N., fumonisines, trichotécènes, ochratoxines, pour ne citer que les plus courantes …
Or, ces mycotoxines sont très résistantes à la chaleur, au froid, à l’oxydation et à l’acidité. Il n’existe donc que très peu de solutions pour les éliminer. Principalement la dilution du produit qui en contient ou l’addition d’argile quand c’est possible et compatible avec le produit et la prise alimentaire. Par exemple, le champignon Penicillium expansum est trouvé fréquemment sur la pomme et il produit une mycotoxine appelée patuline. La filtration des jus et extraits de pomme diminue malgré tout la quantité de toxines de même que la fermentation des jus pour l’obtention du cidre. Cependant, les mycotoxines, non détruites, restent efficaces même à faible dose. Ainsi même présente à l’état de traces, c’est à dire inférieures au centième de mg/L ou mg/kg. Elles peuvent être encore nocives pour l’homme. La patuline agit sur le système nerveux provoquant agitation et convulsion. Elle est de plus responsable de désordres gastriques ou intestinaux.
L’AB dans son site officiel, mettait en garde le consommateur sur sa page d’accueil déconseillant la consommation de pommes/jus pour les femmes enceintes et les jeunes enfants ! L’Histoire relate de nombreux problèmes liés aux mycotoxines provoquant une maladie aux noms multiples : « Feu de saint Antoine », « feu sacré », « peste de feu », « mal des ardents ». Ces mycotoxines sont certainement responsables d’un nombre de décès se chiffrant par millions depuis l’origine de l’agriculture. Elles provoquent des douleurs insupportables d’où leur nom. Le moine Adémar de Chabannes (988-1034) relate une épidémie en Limousin responsable du décès d’environ 40 000 personnes. De nombreux témoignages, images, scultpures, peintures (Matthias Grünewald dans le retable d’Issenheim présent au musée de Colmar) attestent de l’existence et de l’importance de ce mal au cours de l’Histoire. Récemment encore, l’affaire de Pont St Esprit (1951) qui aurait fait une cinquantaine de morts est attribuée à du pain de seigle selon toute vraisemblance contaminé par l’ergot de seigle (moisissure = Claviceps purpurea) produisant de l’ergotamine (dérivé de l’acide lysergique à l’origine du LSD), une autre mycotoxine). Cette cause, tout en étant la plus vraisemblable, reste encore controversée. Des cas d’élevages (porcs notamment, peut être bovins mêmes) décimés par une teneur trop élevée en mycotoxines ont été signalés durant la décennie 1990-2000.
La présence fréquente de ces mycotoxines qui sont souvent générées lors du stockage des céréales dans les silos, restent une préoccupation constante des fabricants de céréales de petit-déjeuner. Bien que surveillées étroitement, on déplore malgré tout, chaque année des rappels de produits contaminés.
Pour revenir sur les plantes GM Bt, plantes résistantes à la pyrale), on s’est aperçu rapidement qu’outre les bénéfices apportés par cet OGM (moins d’insecticides, donc moins de passages tracteurs pour les traitements, économiques, environnementaux, rendements préservés, etc), la teneur en mycotoxines des maïs étaient réduites de 90% … progrès énorme, passé évidemment sous silence par la mouvance anti-OGM niant a priori tout aspect positif que pourrait présenter quelqu’OGM que ce soit.
A l’époque, une décision sanitaire évidente et de bon sens, aurait du être d’interdire toutes les variétés de maïs conventionnelles sensibles à la pyrale car non seulement, le rendement s’en trouve fortement affecté mais ces maïs, du fait de leur forte concentration en mycotoxines (fumonisines en particulier) constituent un risque sanitaire avéré. Evidemment, grâce à la mouvance anti-OGM, il n’en a rien été !
Jusqu’à la décennie 1960-70, on enseignait dans le Secondaire les maladies que pouvaient attraper l’homme, les animaux et les plantes. Ainsi, on apprenait que le blé notamment pouvait attraper, entre autres, deux maladies : la carie et le charbon. Ces deux maladies provoquent des zones noires sur l’épi de blé devenant alors impropre à la consommation. Ces deux maladies, d’origines fongiques, produisent évidemment des mycotoxines. Avec l’utilisation des fongicides, ces maladies ont disparues durant des années. Cependant, on commence à en reparler ces dernières années avec la progression de surfaces cultivées selon le mode AB. Ce qui n’a rien d’étonnant puisque les biocides utilisés par l’AB sont globalement moins efficaces que les « méchants » pesticides issus de synthèse chimique.
Très récemment (septembre 2024, voir réf.), on vient de mettre en évidence que l’origine de la terrible maladie de Charcot (agissant sur les motoneurones) pourrait être due à l’existence de mycotoxines produites par la « fausse morille » (cluster en Savoie de 14 personnes atteintes de cette maladie dont le seul point commun a été de consommer cette « fausse morille ».
On pourrait développer d’autres exemples tirés des nématicides, des insecticides (cas des néonicotinoïdes) et évidemment avec les herbicides dont le glyphosate, sujet de nombreuses polémiques.
Pas de vie sans pesticides ?
Enfin, il faut ajouter d’autres points qui démontrent que nous ne pouvons pas nous passer des pesticides.
Comme nous l’avons précisé (travaux de B. Ames), toute molécule peut-être pesticide et plus généralement -cide !
Ainsi, une molécule aussi vitale que l’eau peut tuer si sa consommation est très élevée. Cela provoque une hyponatrémie (excès d’eau par rapport au sodium), cette hyponatrémie peut aussi être provoquée par différentes maladies métaboliques ou la consommation excessive d’alcool par exemples.
Ainsi, pratiquement toutes les molécules du vivant peuvent avoir une action néfaste vis à vis de nos agresseurs mais aussi contre nous-mêmes dans certaines circonstances (maladies auto-immunes). Mais surtout, un très grand nombre des molécules présentes dans chaque organisme ont des propriétés pesticides. Parfois, certaines sont mêmes -cides contre plusieurs espèces de prédateurs : par exemple, à la fois actives contre les bactéries et les champignons.
Chez les plantes, on a classé les protéines qui participaient à leur défense en PRP (pour Pathogenesis Related Proteins). Et au fur et à mesure que l’on étudie les protéines et leurs propriétés, on en découvre de plus en plus qui sont « PRP » alors que l’on ne leur soupçonnait pas ces propriétés initialement.
- Parce que le phénomène vital est la résultante permanente d’interactions entre molécules qui vont permettre à une cellule, un organe, un tissu, un organisme à la fois de se maintenir dans le temps (production d’énergie, stockage, reproduction) mais aussi et simultanément de « résister », aux stress abiotiques (adaptation aux conditions environnementales), y compris des mécanismes régulant l’entrée dans le système de molécules inertes ou d’interactions permettant de les neutraliser, de les détruire, lorsque finalement, elles arrivent à pénétrer le milieu cellulaire) et aux stress biotiques (agresseurs/ravageurs).
- La cellule au cours de l’évolution s’est extrêmement complexifiée (des procaryotes aux eucaryotes) ce qui a généré des mécanismes de régulation extrêmement sophistiqués. La régulation de la transcription (ADN en ARNm), par exemple, met en jeu plus de 40 protéines différentes qui agissent de concert, et si l’une d’entre elle subit une modification entrainant un changement de sa structure tertiaire, l’édifice a de très fortes chances de ne plus fonctionner.
- La création de la vie n’a pu se faire, se construire, s’organiser, fonctionner que parce que les associations de molécules réussissaient à se « protéger » les unes des autres et vis à vis de celles qui étaient capables de les neutraliser ou de les détruire.
- S’il est clair que Paracelse pressentait tout cela compte tenu des connaissances de l’époque, d’autres après lui ont toujours essayé de comprendre la Vie, son origine, son fonctionnement, son maintient. Il me parait important de citer deux médecins :
– Xavier Bichat dans ses « Recherches sur la vie et la mort » (1800) en arrive à une excellente définition de la vie :
« La Vie, c’est l’ensemble des fonctions qui résistent à la mort ».
– Peu après, Antoine Béchamp (1816-1908, Inventeur des mycrozomas ) avait une définition un peu similaire en disant :
« Rien n’est la proie de la mort, tout est proie de la vie ».
En conclusion :
Il est vain de vouloir se passer des pesticides puisqu’ils sont intrinsèques au phénomène vital.
Concernant ceux qui sont utilisés par les agriculteurs (PPS), les animaux (produits vétérinaires), les humains (médicaments), il faut donc continuer à les évaluer pour leurs risques liés à leur exposition et/ou consommation) et respecter toutes les conditions de leurs utilisations précisées dans leurs autorisations de mise sur le marché (AMM).
Il faut aussi, pour tous, ceux que l’on utilise quotidiennement (lessives, savons, détergents, désinfectants, cosmétiques, conservateurs, colorants, arômes, répulsifs … la liste est longue), les utiliser à bon escient et en faible quantité. Sans oublier les nombreux pesticides utilisés pour nous et nos animaux préférés (et notamment contre les puces, poux, insectes, tiques, moustiques (insectes), les vers, …).
Le sujet ne s’arrête pas sur les nombreux points évoqués, car il faudrait aussi traiter d’autres substances naturellement contenues dans les aliments provoquant des interactions avec certains traitements médicamenteux (exemple : naringine du pamplemousse), des poisons contenus naturellement dans divers produits alimentaires (cyanure et manioc et amandes diverses, …), mais aussi de produits générés lors de la cuisson des aliments (produits issus de la réaction de Maillard comme par exemple l’acrylamide -cancérigène- générée notamment au niveau de la croûte du pain lorsque celui-ci est trop cuit, ou lors de la cuisson des frites) ou lors de BBQ mal conduit (benzopyrènes) ou encore générés lors de la dégradation de certaines huiles lorsqu’elles sont trop chauffées et/ou utilisées trop longtemps) mais aussi de ceux provenant du milieu externe s’accumulant lors de la croissance des organismes (métaux lourds par exemple) ainsi que les transferts de matières entre les contenants (emballages) et les aliments (plastiques -par exemple, le bisphénol A -perturbateur endocrinien ?-) sans oublier les fluides corporels (urines, selles, sueur). Notons au passage que nombre des médicaments se retrouvent dans les eaux usées puis ensuite dans l’eau potable (hormones, antalgiques, anxiolytiques, antibiotiques,…) car difficiles à éliminer lors du processus de potabilité) et la genèse d’aérosols via les éternuements, toux, ou simplement la respiration qui peuvent contenir des toxines, microorganismes, des perturbateurs endocriniens…!
On ne peut clore cette liste sans parler de deux « produits » trop largement consommés malgré les avertissements récurrents depuis des dizaines d’années : le tabac, l’alcool, drogues auxquelles on pourrait ajouter maintenant le sucre (omniprésent dans notre alimentation).
Pour finir, il apparait clairement que le risque n’est pas là où tout le monde se l’imagine.
« Les traces de pesticides encore présentes sur les produits agricoles sont si faibles qu’il faudrait manger (par exemple) 25 millions de pommes pour ingérer autant de substances cancérigènes qu’en buvant un seul verre de vin ! L’alcool est en effet cancérigène ». (In Préface de Denis Corpet dans le livre de G. Rivière-Wekstein, cf réf. ci dessous).
Il semble plus facile de reporter la responsabilité des pesticides sur les agriculteurs que de réaliser que nous sommes certainement plus responsables qu’eux de notre exposition aux pesticides et/ou de leur consommation au cours de notre quotidien.
Quelques références :
https://www.afis.org/Peurs-et-desinformation-autour-de-traces-de-pesticides-dans-les-fruits-et
Ames BN, Profet M & Gold LS, 1990. Dietary pesticides (99,99% all natural). PNAS, (USA) Vol.87, p. 7777-7781.
Ames BN, Profet M & Gold LS, 1990. Nature’s chemicals and synthetic chemicals: Comparative toxicology. PNAS (USA) Vol. 87, p. 7782-7786.
Béchamp A. cf. Wikipedia.
Bichat MFX, Recherches physiologiques sur la vie et la mort, 1800.
Plant Pathologist’s Pocketbook. G.C. Ainsworth. Compiled by The Commonwealth Mycological Institute. 267p. 1968.
Bodin F. & Cheinisse C.F. Les Poisons. Hachette 256p. 1955.
Richard D. Poisons et venins dans la nature. Delaschaux et Niestlé. 2008, 185p.
Rivière-Wekstein G. Panique dans l’assiette. Ed. Le Publieur, 2017, 211p.
Une monographie sur chaque pesticide est réalisée. Ce document est un préalable obligatoire pour obtenir son AMM. Ces monographies sont disponibles en ligne sur le site de l’ANSES.
Par Matthias Grünewald — The Yorck Project (2002) 10.000 Meisterwerke der Malerei (DVD-ROM), distributed by DIRECTMEDIA Publishing GmbH. ISBN : 3936122202., Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=152335