Le changement climatique induit par l’augmentation du dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère, la pollution, la surpêche en mer, les plastiques dans les océans ou infiltrés jusque dans notre sang et bien d’autres calamités ont exhorté plus de 15 000 scientifiques à déclarer que la surexploitation de la planète avait empiré (Ripple 2021) tandis que l’écologie politique s’est emparée de ces problèmes pour nous prédire l’apocalypse. Aucun système politique ou économique ne serait capable de gérer les catastrophes prévues (Bradshaw et al. 2021) ! Et, tandis que les appels à baisser les émissions de CO2 se multiplient, les ouvertures de centrales à charbon en font autant, tant les besoins énergétiques le commandent, qui conduisent au réchauffement climatique.
Des potentialités révolutionnaires, basées sur des solutions naturelles
De multiples possibilités existent déjà, mais la fonction des forêts dans la fixation de CO2 diminue, et les déforestations les transforment en fabriques de CO2 (Gatti et al. 2021). La végétation des continents ne suffisant pas à recapturer ce carbone, nous avons donc consulté les données scientifiques récentes concernant les capacités de l’Océan pour traiter ces calamités (Barnabé, 2022) :
– Avec quelques milliardièmes de fer répandu en haute mer, les microalgues (ou plancton végétal) qui les peuplent (95 % de leur biomasse) ont engendré d’énormes proliférations tout au long des chaînes alimentaires, jusqu’aux poissons, en fixant le CO2 atmosphérique et en diminuant l’acidification des océans. Le rôle ignoré des sulfures a rendu obsolètes les données antérieures à 2019 et engendre une révolution (Hinckley et al. 2020)
– Les grands tourbillons océaniques (40 % des océans) en constituent les déserts. Ils peuvent être revitalisés en amenant en surface les eaux plus profondes, froides et riches, pour engendrer une même prolifération de microalgues fixatrices de CO2 et productrices de vie marine.
– Les macroalgues marines sont aussi capables de fixer tout le CO2 superflu de l’atmosphère et d’inverser l’acidification des océans : cultiver un pour cent de la surface des océans permettrait de nourrir l’humanité.
– La possibilité nouvelle de reproduire en écloserie de nombreuses espèces marines par milliards transforme les océans en un nouvel et immense espace de culture, comme l’agriculture il y a 10 000 ans. Algues, coquillages, oursins, crustacés, poissons y contribuent. Les plateaux continentaux deviennent les jardins de la mer.
– Les récifs artificiels proposent des habitats spécifiques aux algues, aux poissons aux filtreurs-épurateurs (moules, huîtres, corail, etc.). Leur implantation multiplie des centaines de fois la biomasse vivante présente sur les fonds sableux et protège la biodiversité.
– Ces filtreurs constituent aussi des fonds vivants et filtrants qui épurent déjà les immenses volumes d’étangs, de baies, de rades, en quelques jours.
– Les aires marines protégées exercent de multiples impacts significatifs à la fois sur la conservation et l’expansion de la vie marine la limitation de la surpêche, et offrent de nouveaux espaces de loisirs.
– Disséminés dans tous les océans sur les fonds abyssaux, les dizaines de milliers de monts sous-marins ou guyots offrent des surfaces aussi vastes qu’un continent pour des activités humaines productrices sur ces faibles profondeurs.
– L’auto-organisation et l’auto-épuration démontrées en milieu aquatique s’ajoutent à toutes ces potentialités. Les capacités des océans à absorber tout le gaz carbonique excédentaire sont prouvées, ainsi que leurs aptitudes à régler le problème du réchauffement climatique, des pollutions, de la biodiversité, de la pêche…
Des modalités de mises en œuvre d’un coût accessible
Les solutions retenues sont fondées sur la Nature, réversibles et réalisables avec les outils techniques actuels, tandis que ces technologies progressent.
Sur le plan financier, maîtriser les risques climatiques et environnementaux menaçant l’humanité représente quelques dizaines de milliards de $ ou d’€. Transférer des financements déjà existants ou autres sources disponibles constitue une possibilité immédiate. Les capitaux sont disponibles, les outils aussi : les appels renouvelés des scientifiques peuvent donc être exhaussés.
L’approche globale devient le nouveau cadre de pensée.
En référence aux dépenses de la pandémie de COVID 19, plus de 200 revues scientifiques médicales (BMJ, 2021) demandent d’augmenter les financements pour la protection de la planète.
Les constats récents remettent en cause les données passées
Les réalités peu médiatisées des fonctions climatiques et écologiques des grands espaces océaniques constituent des faits établis, et les stratégies naturelles de la lutte contre le changement climatique et autres urgences écologiques découlent de tels faits ; on sait qu’ils sont têtus ! Nous ne proposons pas de dominer notre environnement par des contraintes techniques, mais une association durable basée sur les fonctions naturelles, pour des avantages réciproques : une symbiose.
Créer les outils de gouvernance mondiaux nécessaires pour améliorer les fonctions naturelles des océans, des terres et de l’atmosphère pour la survie de nos descendants, devient l’urgence capitale.
Avec nos moyens, l’immensité des mers devient accessible aux solutions naturelles que notre planète océane a éprouvées depuis des milliards d’années. Les mettre en œuvre suffit.
Bibliographie
Barnabé G, (2022). Urgences climatiques et écologiques : les solutions de l’Océan. EDP Sciences, Les Ulis. 408 pp
Bradshaw CJA, Ehrlich PR, Beattie A, Ceballos G, Crist E, et al. (2021). Underestimating the Challenges of Avoiding a Ghastly Future. Front. Conserv. Sci. 1:615419. doi: 10.3389/fcosc.2020.615419
BMJ 2021; 374. Climate crisis: Over 200 health journals urge world leaders to tackle “catastrophic harm”. doi: https://doi.org/10.1136/bmj.n2177.
Gatti LV, Basso L S, Miller J B et al. (2021). Amazonia as a carbon source linked to deforestation and climate change. Nature 595, 388–393 https://doi.org/10.1038/s41586-021-03629-6
Hinckley ES, Crawford J T, Fakhraei H, et al. (2020). A shift in sulfur-cycle manipulation from atmospheric emissions to agricultural additions. Nat. Geosci. https://doi.org/10.1038/s41561-020-0620-3
Ripple W J, Wolf C, Newsome T M, Gregg J W, Lenton T M et al. (2021). World Scientists’ Warning of a Climate Emergency 2021, BioScience, biab079, https://doi.org/10.1093/biosci/biab079 (accès libre).
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