Le 21 décembre 2020, l’Union européenne a autorisé le vaccin Pfizer-BioNTech pour lutter contre le Covid-19 et va probablement en faire de même prochainement avec le vaccin Moderna déjà autorisé aux Etats-Unis. Deux vaccins dits « ARN messager » faisant appel aux biotechnologies qui ont permis leur développement rapide avec une excellente efficacité.
Feu vert pour les biotechnologies rouges
Les biomédicaments synthétisés par une source biologique et non obtenus par chimie de synthèse sont en pleine expansion dans le monde depuis les années 1980 et permettent d’enrichir l’arsenal thérapeutique (vaccins recombinants, anticorps monoclonaux, thérapie génique, immunothérapie cellulaire, diagnostic prédictif, etc). Ils ont révolutionné le traitement de graves maladies comme le cancer et ouvert la voie à la médecine régénérative grâce à la thérapie cellulaire permettant de remplacer des organes défaillants.
Plus de la moitié des médicaments arrivant aujourd’hui sur le marché sont issus des biotechs. On a oublié que l’insuline pour traiter les diabétiques était autrefois extraite du pancréas de porc et de bœuf avant qu’elle ne soit produite grâce à des bactéries génétiquement modifiées. On a oublié les enfants victimes de la maladie de Creutzfeld-Jakob à cause de l’hormone de croissance prélevée dans les hypophyses de cadavres humains ou le scandale du sang contaminé avec les centaines d’hémophiles transfusés victimes du virus du SIDA. Drames qu’aurait pu éviter l’hormone de croissance recombinante ou le génie génétique utilisés aujourd’hui.
En dépit des pseudo-écologistes réfractaires aux OGM ou de quelques médecins dépassés par les nouvelles technologies, les biotechs pour les applications médicales (dites biotechnologies rouges) sont acceptées par la population. L’actualité sanitaire a banalisé une méthode de biologie moléculaire comme le test PCR permettant de détecter le matériel génétique du virus Covid-19. Quant au « vaccin biotech » contre ce virus, il sera adopté par la population à l’exception des antivax dogmatiques et malgré les réticences de la population de certains pays comme la France imprégnée par un principe de précaution constitutionnalisé et la défiance vis-à-vis des gouvernants.
Feu rouge pour les biotechnologies vertes
Dans l’Union européenne la perception des biotechnologies pour usage agricole (dites biotechnologies vertes) est étrangement différente. Technologie d’avenir pour la santé elle serait un danger majeur pour l’agriculture et l’alimentation ! Les OGM* suspectés sans preuve de tous les périls en sont l’illustration. Adoptés massivement et rapidement dans le monde depuis 25 ans ils sont interdits et diabolisés en Europe, exception faite du maïs Bt Mon 810 résistant à deux insectes prédateurs, autorisé en 1998 mais interdit depuis par la plupart des pays européens sous la pression de l’écologisme. Culture des OGM interdite mais importation autorisée pour l’alimentation animale ! La traversée de l’océan atlantique aurait-elle apporté une garantie d’innocuité aux 33 millions de tonnes de soja GM importés annuellement en Europe ? Chaque année 18 millions d’agriculteurs utilisent des semences GM dans le monde, soit beaucoup plus que les 10,5 millions d’agriculteurs européens, sur des surfaces cumulées depuis 1996 de 2,7 milliards d’hectares. C’est 16 fois les surfaces agricoles européennes !
Un retour d’expérience exceptionnel qui aurait dû ébranler les certitudes des dirigeants européens tétanisés par la pression des activistes écologistes et la réticence des consommateurs qu’ils ont eux-mêmes encouragée.
Ces responsables politiques trouvent argument dans la loi de 1992 définissant de façon ambiguë et très contestable les OGM comme des organismes « obtenus par des méthodes autres que naturelles ». Dès lors, en Europe, faute de n’avoir pas actualisé une définition obsolète, les OGM seront rejetés non pas sur leurs caractéristiques intrinsèques mais sur la méthode choisie pour les obtenir !
Plus grave, est le « refus de savoir » par les militants « faucheurs d’OGM » mais surtout par des organismes publics de recherche agronomique où les biotechnologies vertes utilisant le génie génétique sont jugées politiquement incorrectes, aboutissant à l’arrêt de toute expérimentation et au départ des chercheurs dans des pays plus ouverts à l’innovation.
Les biotechnologies évoluent vite et de nouvelles technologies voient le jour bousculant les institutions en place.
En 2017 un rapport de l’OPECST (Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques) sur les enjeux des biotechnologies s’était montré favorable aux nouvelles techniques de sélection végétale. Mais la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans un arrêt du 25 juillet 2020 a considéré que « les organismes obtenus par mutagénèse constituent des OGM et sont en principe, soumis aux obligations prévues par la directive sur les OGM ». Une institution sans aucune expertise scientifique mais dont l’avis sera vite exploité par les responsables politiques, le gouvernement des juges prenant de plus en plus le pas sur les responsables politiques élus ! Déjà le gouvernement français a « salué cette clarification attendue » oubliant l’avis étayé de l’OPECST !
En 2016, une lettre ouverte de 110 Prix Nobel avait défendu les OGM et notamment le riz doré enrichi en béta-carotène susceptible de soigner les 250 millions de personnes dans le monde carencées en vitamine A. Moins crédibles que les militants écologistes pour les politiques ! Le 7 octobre 2020, le prix Nobel de chimie a été décerné à la française Emmanuelle Charpentier et à l’américaine Jennifer Doudna pour l’invention de la technique des ciseaux génétiques CRISPR-Cas9 permettant de cibler un gène dans le génome pour le modifier, l’éteindre ou d’ajouter d’autres gènes en coupant l’ADN à un endroit spécifique.
Une invention qui a ouvert des perspectives prometteuses, faisant l’objet de milliers de publications scientifiques et de dépôts de brevets notamment dans le domaine de la santé et de l’agriculture mais que l’Europe contrairement à d’autres pays tarde à autoriser et se fourvoie dans des tergiversations interminables déconnectées de la réalité. Les travaux de ces deux éminentes scientifiques seront-ils cette fois pris en compte par les politiques ?
Après les OGM faisant appel à la transgénèse (introduction d’un gène dans le génome d’un organisme), de la mutagenèse (modification génome sans ADN étranger), va-t-on aussi priver l’Europe des avancées offertes par CRISPR-Cas9, au moment où la Chine investit massivement dans cette technologie ?
Le contraste est saisissant entre la gestion de la pandémie du Covid-19 par les gouvernements européens qui s’appuient largement sur les scientifiques et la gestion des biotechnologies vertes, où par électoralisme à court terme, ils préfèrent s’aligner sur l’idéologie de l’écologisme politique en écartant les recommandations des scientifiques y compris celles des agences sanitaires créées pour aider la décision politique. Malgré la démographie galopante, l’impact du réchauffement climatique sur les cultures, le risque de nouvelles maladies et ravageurs , l’agriculture n’est pas une priorité européenne.
Le « Pacte vert pour l’Europe » et la nouvelle PAC 2021-2027 restent centrés sur l’environnement et le climat en occultant et se privant des bénéfices offerts par les biotechnologies et plus généralement par l’innovation technologique.
*OGM : Organismes génétiquement modifiés
« L’écologie » est d’une telle évidente et urgente nécessité mondiale et locale qu’elle masque des décisions politiques dont nous ne maitrisons pas tous les aspects. L’histoire de l’Humanité et de ces décisions géo-politico-juridiques ne cesse de nous le démontrer et aujourd’hui encore dans bien des domaines – y compris religieux.
Réjouissons-nous que des esprits libres publient de tels articles « contre-tendance » …et Merci à Gérard KAFADAROFF pour cet éclairage persistant et actualisé !
A quand une interview sur France 2 au prime time de 20 h ?