Des travaux récents pointent vers le rôle d’une infection des gencives dans le développement de la maladie d’Alzheimer.
Avec la hausse de l’espérance de vie, en particulier dans les pays développés, un certain nombre de maladies liées au vieillissement du corps ou du cerveau sont de plus en plus fréquentes. Et si les maladies étaient historiquement classées dans des grands familles un peu arbitraires – infectieuses, auto-immunes, inflammatoires, cancéreuses, métaboliques, maladies liées au vieillissement… – la recherche a établi que bien souvent des microorganismes en sont responsables. Une nouvelle étude publiée dans la revue PLOS ONE nous apprend ainsi que le fait de ne pas se brosser les dents – et d’être en conséquence exposé à la « Porphyromonas gingivalis », une bactérie buccale – pourrait accélérer le développement de la maladie d’Alzheimer.
« Depuis quatre, cinq ans, des expériences sont menées qui examinent le cerveau de personnes décédées suite à la maladie d’Alzheimer » explique Philippe Amouyel, professeur de santé publique au CHU de Lille, directeur d’une unité Inserm qui travaille sur les maladies liées au vieillissement et directeur de la Fondation Alzheimer. « Et les chercheurs se sont rendu compte que certains germes présents dans le cerveau, en particulier le ‘‘Porphyromonas gingivalis’’, qui est à l’origine de ces rougeurs, de ces petits saignements que l’on peut avoir en cas de mauvaise hygiène dentaire, sont plus présents chez les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer que ceux qui n’en avaient pas »
L’étude précitée a cherché à prouver ce lien surprenant. Pour observer l’impact de la bactérie sur la santé du cerveau, l’équipe a appliqué la bactérie parodontale dans la bouche de dix souris sauvages. Dix autres souris ont servi de groupe témoin. « Ce germe, le « Porphyromonas gingivalis », a été déposé sur leurs dents. On s’est rendu compte que la souris commençait à développer des petits troubles qui ressemblaient à ce qu’on peut décrire chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer » explique Philippe Amouyel. De fait, l’étude a montré que les souris infectées présentaient des quantités beaucoup plus élevées de bêta-amyloïde accumulée.
Or, cette substance est présente dans les tissus cérébraux des patients atteints de la maladie d’Alzheimer. « Ce sont des associations aujourd’hui. On n’a pas réussi à démontrer que si vous vous brossez les dents vous n’aurez pas Alzheimer, loin s’en faut. Ce que l’on peut dire, c’est que les phénomènes qui sont associés au non brossage des dents et la prolifération de ces bactéries, pourraient être associés à une accélération de la maladie ». Il s’agit donc d’un début de piste, qui pourrait aider à comprendre les raisons derrière le développement de la maladie, et produire des traitements adaptés.