L’outil d’édition Crispr-Cas9 pourrait se révéler dangereux pour le génome humain. C’est le résultat de trois études récemment publiées qui offrent un panorama des risques potentiels liés à cette pratique.
La première études a été réalisée par la biologiste Kathy Niakan du Francis Crick Institute de Londres. D’après la Revue Nature, elle visait à utiliser CRISPR pour créer des mutations dans le POU5F1, un gène jouant un rôle important dans le développement embryonnaire. Sur 18 embryons édités, 22% ont affiché des changements non désirés. ces changements consistaient en des réarrangements des séquences d’ADN et à la suppression de plusieurs milliers de lettres d’ADN.
La seconde étude a été menée sur des embryons créés grâce à du sperme portant une mutation dans le EYS2, un gène causant la cécité. Ce gène a été édité à l’aide de CRISPR afin de corriger ce risque. Néanmoins les équipes du biologiste Dieter Egli de la Columbia University, ont remarqué qu’il manquait chez la moitié des embryons testés, de larges segments du chromosome sur lequel le gène est situé.
Enfin l’équipe menée par le biologiste spécialisé en reproduction Shoukhrat Mitalipov de l’Oregon Health & Science University est arrivée à des conclusions similaires avec du sperme contenant une mutation d’un gène responsable d’insuffisance cardiaque.
Commentant ces résultats, Fyodor Urnov, qui étudie l’édition génétique à l’université de Californie estime que “Pour faire une analogie entre l’édition d’embryons humains et le vol spatial, ceci équivaut à l’explosion d’une navette sur la rampe de décollage et ceci avant même le lancement.”
Pour Mary Herbert, biologiste à l’université de Newcastle, ces recherches démontrent le manque de données sur la façon dont les embryons humains réparent un découpage de l’ADN via des outils d’édition génétique. Pour elle, cette étape est vitale dans l’utilisation de CRISPR “Nous avons besoin d’une feuille de route minimale sur ce processus avant d’aller plus loin” estime la scientifique.
Mais, ces travaux sont loin de faire l’unanimité dans la communauté scientifique. D’après le site internet de Nature, ces études n’ont pas passé l’étape de l’évaluation collégiale. Du côté des scientifiques français, le biologiste, directeur de recherche au CNRS dans le laboratoire de Physiologie Cellulaire Végétale, Marcel Kuntz, estime que
“nous sommes dans le sensationnalisme journalistique. Je déplore que Nature se prête à cette dérive et cela confirme dans mon opinion que cette mode de la diffusion avant « peer reviewing est regrettable”.
Il faut noter que ces résultats interviennent alors qu’il existe actuellement un débat au sein de la communauté scientifique sur l’édition du génome humain pour prévenir les maladies génétiques. Si les recherches liées à la modification de gènes humains via CRISPR a été lancé en 2015, il faut noter que ces travaux sont rares et sévèrement encadrés.