La narcolepsie, maladie qui provoque des phases d’endormissement incontrôlées, pourrait également favoriser la créativité, d’après une récente étude franco-italienne
Le lien entre sommeil et créativité a été évoqué dans plusieurs études. Une sieste, incluant une phase de sommeil paradoxal permettrait ainsi une plus grande flexibilité mentale, notamment propice à la résolution de problèmes. « Il est peu probable que la créativité en soi naisse instantanément lors d’une sieste. Au contraire, le développement de la créativité s’étend probablement sur plusieurs années, y compris de nombreuses périodes de sommeil » note toutefois une équipe de l’Inserm qui a collaboré avec des médecins de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière AP-HP, des chercheurs du CNRS et de la Sorbonne Université, ainsi qu’une équipe de l’université de Bologne pour étudier le lien entre le sommeil et la créativité.
Pour ce faire, ils se sont intéressés à des « experts en sommeil : les narcoleptiques. Ces personnes souffrent d’épisodes d’extrême fatigue et peuvent s’endormir involontairement à un moment non adapté. « En rencontrant régulièrement des patients narcoleptiques au sein de mon service, j’ai remarqué qu’ils semblaient plus évoluer dans des activités créatives que la moyenne ; pas uniquement dans leur vie professionnelle mais aussi dans leurs loisirs ou leur façon de penser », explique la Pre Isabelle Arnulf, cheffe du service des pathologies du Sommeil à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière
Dans une étude publiée dans la revue Brain, les chercheurs ont établi un lien entre ce trouble rare du sommeil qui concerne environ 0,02% de la population et la créativité. Pour ce faire ils ont d’abord évalué la de la créativité subjective des sujets observés – par des questionnaires sur leurs réalisations personnelles dans des sujets dans différents domaines des arts et des sciences, en passant par l’humour, la cuisine ou encore l’architecture – puis leur performance créative à l’aide du test sur table EPoC (Evaluation du Potentiel Créatif). Ils ont découvert qu’en moyenne, les sujets narcoleptiques obtenaient des scores plus élevés que les sujets contrôles.
Les chercheurs ont expliqué ces meilleures performances par l’accès privilégié au sommeil paradoxal (phase du sommeil pendant laquelle nous rêvons), qui permet « d’incuber » leurs idées. « Il s’agit d’un argument fort pour dire que l’accès régulier au sommeil paradoxal et aux rêves favorise la créativité. Dors dessus, tu trouveras une solution ! C’est aussi la première fois que nous montrons que les sujets narcoleptiques sont meilleurs que la moyenne dans un domaine aussi important que la créativité, apportant par là même une note positive à cette maladie difficile à vivre », conclut Célia Lacaux, chercheuse à la Sorbonne Université.