La rapide propagation de bactéries ayant développé une antibiorésistances inquiète la communauté scientifique. Des chercheurs en ont en effet identifié dans des zones très peu peuplées, ce qui fait craindre une rapide expansion mondiale de ces superbactéries. Pourtant, certaines pistes pourraient nous apprendre à mieux les combattre.
Une nouvelle étude parue dans la revue Environment International, tire la sonnette d’alarme sur la question des superbactéries multirésistantes. Ces dernières ont en effet développé des résistances aux antibiotiques. D’après les travaux menés par David Graham, professeur à l’université de Newcastle, on trouverait des gènes de résistance aux antibiotiques dans l’archipel de Svalbard, situé dans l’océan Arctique entre la Norvège et le pôle Nord.
Parmi les gènes facteurs de résitence détectés, l’équipe de M Graham a trouvé le désormais célèbre gène blaNDM-1 New Delhi Metallo-β-lactamase), fortement médiatisé lors de son émergence en 2008 dans un hôpital de New Delhi et sa rapide propagation au nord de l’Europe. En 2013, les chercheurs l’avaient identifié dans des sols situés près d’un petit lac de l’Arctique. Maintenant, il existe différents variants de ce gène dans des dizaines de pays.
Si la nouvelle inquiète, c’est que la principale cause de développement de résistance était jusqu’alors considérée être l’utilisation excessive des antibiotiques, qui se retrouvent ensuite dans les écosystèmes. Or il s’agit d’une région du monde sensée en être quasiment exempte, n’accueillant pas de vie humaine à l’année. Et pourtant, les chercheurs ont découvert 131 gènes de résistance aux antibiotiques dans 40 échantillons de sols provenant de huit emplacements, situés le long de l’archipel.
« Ces gènes ‘étrangers’ ont été trouvés dans les concentrations les plus élevées près des sources d’eau douce – des zones où la faune a tendance à se rassembler », explique David Graham. Les chercheurs ont donc émis une hypothèse pour expliquer la propagation de ces résistances : les bactéries ayant développé des résistances ont pu être déplacées via des excréments d’oiseaux migrateurs. Cela a déjà été le cas pour le gène de résistance à la colistine, mcr-1, porté de Chine en Lituanie et en Argentine par des goélands.
L’expansion de ces bactéries multirésistantes n’est pas sans conséquences : selon une étude du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies publiée en novembre dernier, « 33 000 décès seraient attribuables à l’antibiorésistance en 2015, en Europe ». Et leur impact est plus important chez les enfants de moins d’un an et les personnes âgées de plus de 65 ans », poursuit l’étude. « D’ici cinq ans, il sera supérieur à celui du sida, de la tuberculose et du paludisme réunis » mettent engarde ses auteurs.
Il ne faut toutefois pas sombrer dans le fatalisme. Comme souvent, la solution vient d’une imitation de la nature. Un groupe de recherche britannique a publié des résultats encourageants dans une étude reprise par la revue Frontiers in Microbiology le 16 octobre dernier. L’équipe s’est rendue à Boho, en Irlande du Nord, pour y étudier son sol très alcalin – il dispose d’un pH de 7,8 en moyenne. Or, ces derniers ont découvert que ces sols ont pouvoir bactéricide qui affecte également les superbactéries.
Les chercheurs de l’Institute of Life Sciences de Swansea (Royaume-Uni) ont ainsi découvert que ces sols accueillent en effet une nouvelle espèce de bactérie, appelée Streptomyces sp. Myrophorea. Celle-ci s’attaquerait à ses consœurs multirésistantes – reste donc à découvrir quelle bactérie cette dernière produit pour tuer d’autres bactéries et s’en servir pour développer de nouveaux antibiotiques.