Nouveau froid entre Bruxelles et Varsovie. Les abattages dans la forêt de Bialowieza, en Pologne, enfreignent en effet la législation européenne sur la protection des sites selon les conclusions, rendues mardi, par l’avocat général de la Cour de justice européenne.
La forêt de Bialowieza s’étend sur 140.000 hectares à la frontière entre la Biélorussie et la Pologne. Inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco, elle s’est formée il y a plus de 10.000 ans. Bialowieza est protégée par la législation européenne en tant que site Natura2000 – ce qui la place au cœur d’un nouveau bras de fer entre l’UE et la Pologne et l’Union Européenne. Il y a en effet près de deux ans Henryk Kowalczyk, le ministre de l’Environnement polonais a ordonnée l’abattage massif d’épicéas à cause de la présence d’un insecte mangeur de bois – le bostryche typographe.
En juillet 2017, la Commission européenne avait introduit un recours contre la Pologne car elle craignait pour l’intégrité de la forêt. L’affaire a depuis été portée devant la Cour de justice européenne (CJUE). Dans ses conclusions présentées mardi 20 février, Yves Bot – avocat général, dont les conclusions ne lient pas la Cour – estime que la Pologne a enfreint la législation européenne sur la protection des sites naturels en ordonnant des abattages dans la forêt « primaire » européenne.
A l’heure actuelle, des dizaines de militants écologistes (Greenpeace, WWF, ClientEarth et des associations locales Pologne sauvage, Atelier pour le vivant) se relaient dans la forêt, tentant bloquer les abatteuses. « Nous avons rencontré les Français de Notre-Dame-des-Landes lors d’un séminaire en Angleterre », confiait à La Croix Michal Kolbus, une bénévole venue occuper le site. La population locale s’est, elle, en revanche majoritairement rangée du côté de l’état polonais, soucieuse de pouvoir profiter de de la vente du bois coupé.
Andrzej Antczak, un garde forestier chargé de la mission de déboisement, a expliqué à la presse que la partie de la forêt classée parc national ne serait pas touchée par les opérations de coupe. La réserve couverte par le plan d’action Natura 2000, doit en revanche faire l’objet de « certains soins ». Celui-ci explique la démarche : « Il faut intervenir, adapter la composition de la forêt à la composition du sol, favoriser la biodiversité avec la plantation de végétaux qui permettent aux grands herbivores (biches, cerfs, élans, bisons) de se maintenir. »
Pour Yves Bot, cependant la Pologne « n’a pas mis en œuvre les mesures nécessaires à la conservation du site », alors que les mesures prises « ont entraîné la perte d’une partie des peuplements forestiers ». De fait, plus de 200.000 arbres ont été abattus à Bialowieza, dont certains centenaires – Greenpeace Pays-Bas, a rapporté que « 90 % des arbres prévus dans un premier plan d’abattage avaient déjà été coupés ». L’avocat général a également souligné la « divergence des avis scientifiques » quant à la gravité de la propagation du bostryche typographe.